Pas encore Bretton-Woods II…
Un premier sommet de refondation des relations économiques internationales ?
Pas encore Bretton-Woods II…
Said Mekki, Algérie News, 16 novembre 2008
Derrière les sourires et les amabilités plus que jamais circonstanciels, la réunion du G20 qui ne pouvait en aucune façon s’achever sur un constat d’échec, a abouti à une déclaration minimaliste sur les deux points de son ordre du jour. Les dirigeants des économies dominantes de la planète se sont mis d’accord sur la mise en place d’un cadre embryonnaire de surveillance des marchés financiers et des banques et ont mis l’accent sur la nécessité d’une action concertée pour faire face à la récession mondiale. Les décisions concrètes espérées par de nombreux pays touchés de plein fouet par la crise financière sont reportées à des jours meilleurs, étant entendu que les moyens du FMI seront renforcés pour faire face aux éventualités les plus pressantes. Quand l’on sait sur quels présupposés politiques et quels postulats économiques est construite l’action du FMI, la perplexité de bon nombre d’observateurs n’est guère pour surprendre.
Ceux qui espéraient un signal fort en sont donc pour leurs frais. Il n’est pas question d’un Bretton-Woods II pas plus qu’il n’est question de la création de mécanismes d’encadrement ou même d’une organisation effective du contrôle de la spéculation financière. Rien de surprenant à cela. Les déclarations optimistes de certains dirigeants européens sur la possibilité d’atteindre un compromis opérationnel et lisible par tous les acteurs étaient clairement en porte-à-faux avec une réalité encore peu favorable à une telle évolution. Les dirigeants les plus enclins à une sorte d’interventionnisme revisité restent minoritaires dans un contexte caractérisé par la prépondérance des adeptes du monétarisme. Les cercles politiques occidentaux bénéficient paradoxalement d’un rapport de force international caractérisé par le départ imminent d’un président américain, de surcroît particulièrement affaibli. L’absence du président-élu a lourdement pesé sur les débats, car rien dit en effet que Barack Obama entérine les éventuelles décisions souscrites par son prédécesseur.. Cette situation n’a pas empêché George Bush de se poser en donneur de leçon économique en présence de leaders politiques dont certains, peu familiers des rodomontades en direct-live du locataire de la Maison-Blanche, ont été littéralement médusés par un tel degré d’outrecuidance. Le président américain s’est fait le porte-parole convaincu des forces politiques extrêmement puissantes qui résistent à toute tentative d’intervention coordonnée des états en matière économique. L’OCDE avait formellement mis en garde les participants au sommet de Washington contre toute tentative de remise en cause du dogme ultralibéral. Il faudra certainement attendre que l’incendie de la récession et de la stagflation atteigne des proportions catastrophiques pour qu’enfin les idéologues du marché libre de toute responsabilité sortent de leur aveuglement.
Il ne s’agit de fait que d’une première réunion dans une situation où le plus gros des dégâts économiques et sociaux dus à la récession est encore à venir. Il ne fait guère de doute que la prochaine rencontre au sommet du Groupe des 20, à la fin du premier trimestre de l’année prochaine, période où Barack Obama sera en fonction et très vraisemblablement confronté à une réalité objectivement désastreuse, devrait déboucher sur des résultats nettement plus tangibles. La déclaration du G20 réaffirme un volontarisme optimiste de rigueur en ces temps incertains. Le triptyque, soutien à l’économie, nouvelle régulation internationale, réforme de la gouvernance mondiale est énoncé avec conviction. Bien sur, il reste à voir dans quelle mesure ces louables intentions seront traduites dans les faits. L’accélération des événements permettra d’obtenir des réponses à cette interrogation dans des délais rapprochés.