L’onde de choc touchera-t-elle l’Algérie ?
Incertitudes sur l’avenir de l’Euro
L’onde de choc touchera-t-elle l’Algérie ?
El Watan, 6 décembre 2011
Le Fonds monétaire international (FMI) a confirmé récemment le risque de récession en révisant fortement à la baisse sa prévision de croissance pour la zone euro, l’an prochain, à seulement 0,5% contre 1,8% attendu auparavant.
Une prévision confirmée aussi par la BCE. Techniquement, une récession se définit à partir d’au moins deux trimestres consécutifs de recul de l’activité économique. Mais le «trou d’air» en Europe pourrait aller au-delà.
Cette crise de la dette publique qui frappe l’Europe aura-t-elle un impact sur l’économie algérienne ? Affirmatif, s’accordent à dire des économistes algériens. Et ce, sur plusieurs plans. «Le risque que l’Algérie soit touchée est plutôt à long terme étant donné la santé financière du pays», affirme l’économiste Mohamed Bahloul dans une déclaration à El Watan. A cause des politiques d’austérité adoptées par les pays touchés par la crise, «la demande mondiale en pétrole pourrait chuter si la crise dans la zone euro et aux USA persiste, selon un scenario catastrophe. Du coup, les recettes pétrolières de notre pays seraient affectées», prévient notre interlocuteur.
Les exportations d’hydrocarbures représentent 97% de l’ensemble des exportations et 60% des revenus de l’Etat. Aussi, l’Algérie fournit à l’Europe 25 à 30% de ses besoins en gaz naturel. Après la Russie et la Norvège, l’Algérie est le troisième fournisseur de gaz de l’Europe. Economiste et vice-président du CNES, Mustapha Mekidèche soutient, quant à la lui, que la crise de l’UE «aura un impact important sur l’Algérie». «Nos programmes d’exportation d’hydrocarbures vers l’Europe, notamment l’Italie, l’Espagne et plus tard l’Angleterre, vont trouver des marchés déprimés si la croissance n’est pas au rendez-vous ou, pire, si ces pays entrent en dépression», dit-il dans une déclaration à la presse. Cet économiste a, en outre, évoqué une éventuelle chute des prix de pétrole : «Notre position d’exportateur d’hydrocarbures sera aggravée car les prix du pétrole risquent alors de chuter lourdement au moment où notre déficit budgétaire est de plus en plus financé par la fiscalité des hydrocarbures.»
Autre menace : un accroissement sensible de la facture des importations de l’Algérie. «Avec ou sans crise, nos importations se sont emballées, notamment avec les biens d’équipements», rappelle M. Bahloul. Et la crise de la zone euro vient un peu plus compliquer les choses. Selon lui, l’Algérie sera aussi confrontée au spectre d’une inflation importée due essentiellement au renchérissement des produits alimentaires. A titre d’exemple, les gouvernements de la zone euro optent pour l’abandon des subventions au secteur agricole. De mauvais augure, cette mesure aura des répercussions sur les caisses de l’Etat, qui débourse des dizaines de milliards de dollars pour couvrir la facture alimentaire.
Dans la loi de finances pour 2012, le budget de l’Algérie accuse un déficit de 25%, couvert par le Fonds de régulations des recettes. «A court terme, il n’y a aucun danger puisque l’Algérie dispose d’une marge de manœuvre financière» pour couvrir ses importations, rassure M. Bahloul. Les pays de l’UE sont les principaux partenaires commerciaux de l’Algérie avec 51% des importations en 2010. Après les USA, l’Italie est le deuxième client de l’Algérie, suivie de l’Espagne, la France et les Pays-Bas. Les importations en provenance de l’UE ont enregistré une hausse de 19,5% au premier semestre 2011 par rapport à la même période de 2010, en passant de 10,5 milliards de dollars à 12,5 milliards, selon les chiffres du CNIS.