La crise financière mondiale est loin de se terminer
Démarrée en août 2007
La crise financière mondiale est loin de se terminer
El Watan, 22 août 2012
La crise financière mondiale, qui a commencé en 2007, a affecté les banques, les Etats et les entreprises de nombreux pays capitalistes.
Elle s’est notamment traduite, pour certaines banques et Etats, par une subite crise de liquidités et de solvabilité dont les entreprises ne tarderont pas à subir les conséquences en termes de rupture de sources de financement pour leurs investissements et leurs cycles d’exploitation en raison de la raréfaction des crédits bancaires. Enclenchée au milieu de l’été 2007, cette crise trouve son origine essentiellement dans le dégonflement de la bulle immobilière américaine des années 2000 et dans les pertes gigantesques subies par certaines grandes banques et établissements financiers en raison des créances irrécouvrables des désormais sinistres «subprimes».
Il est bon de rappeler que la présence en masse de ces créances toxiques a été révélée à l’opinion publique par les médias américains, contre la volonté des banquiers les plus influents qui souhaitaient la cacher, au deuxième semestre 2006 avec l’annonce du krach des prêts immobiliers octroyés à des millions d´emprunteurs américains incapables de les rembourser du fait de leurs modestes revenus. La crise d’insolvabilité à grande échelle ainsi provoquée a mis en difficulté toute la chaîne des acteurs mêlés de près ou de loin à ce type d’emprunt immobilier, au point d’entraîner pratiquement toutes les places financières américaines et leurs partenaires étrangers dans la tourmente.
La propagation de cette crise à l’échelle mondiale, dont les médias feront rapidement écho, ne tardera pas à provoquer une chute des cours des marchés boursiers et la faillite de nombreux établissements financiers parmi lesquels des banques et fonds d’envergure mondiale comme Lehman Brothers. Pour éviter une crise du système capitaliste pouvant déboucher sur les pires scénarios, certains Etats ont dû se résoudre à intervenir pour sauver les banques en difficulté au risque d’alourdir leurs dettes, et souvent même leurs déficits publics.
Les banquiers n’auront du reste pas de difficulté à les convaincre en exerçant sur leurs dirigeants un chantage consistant à exiger des renflouements financiers au risque d’entraîner toute la machine économique dans la tourmente. Ils sont de ce fait parvenus à arracher des centaines de milliards de dollars pour la recapitalisation de leurs banques, sans pour autant avoir été contraints à changer leurs méthodes de travail, centrées comme on le sait sur la spéculation, ni même leurs objectifs en matière d’affectation de résultats financiers dont une bonne partie finit dans les poches des actionnaires. C’est en grande partie pour cette raison que de nombreux experts demeurent, aujourd’hui encore, convaincus que la crise financière mondiale est loin de se terminer et que, bien au contraire, le plus dur reste à venir.
Cette crise financière mondiale, qui sévit depuis cinq années, est en grande partie responsable de la récession et des reculs de performances économiques qui touchent d’une manière ou d’une autre tous les pays de la planète. Ce krash financier à grande échelle, que l’opinion publique américaine, et bien plus tard mondiale, imputera aux manipulations malsaines de certains banquiers et courtiers en Bourse, provoquera toutefois un mouvement en faveur d’une meilleure régulation du système bancaire et financier qui, s’il venait à être mis en œuvre et appliqué rigoureusement, pourrait contribuer à moraliser utilement les pratiques financières en prenant soin notamment de les canaliser vers les entreprises créatrices de richesses et d’emplois plutôt que vers la spéculation, comme c’est malheureusement le cas aujourd´hui.
Pratiquement tous les Etats de la planète se sont lancés dans cette course à la régulation faisant intervenir les Banques centrales et le Trésor public pour contenir la crise qui, malgré tout, perdure.
L’Algérie s’y est mise elle aussi en promulguant, notamment par la voie de la Banque centrale, un certain nombre de directives visant à restreindre l’endettement en devises des entreprises aujourd’hui contraintes de payer cash leurs importations, en dévaluant le dinar dans le but de réduire les importations, en limitant les transferts de dividendes et en incitant les entreprises étrangères à se financer au moyen des ressources disponibles dans les banques algériennes.
Pour conjurer le mauvais sort, les autorités feront tout pour éviter que le système financier ne soit arrimé sur le système financier mondial par qui le malheur de la crise serait, selon eux, arrivé. Nos banques ont de ce fait été confinées et sans doute pour longtemps encore dans l’état d’archaïsme qui les caractérise. Alors que le pays a l’inestimable privilège de posséder de très importantes réserves de change, rien n’est également fait pour saisir l’opportunité de la crise financière mondiale pour acheter ou s’associer au capital d’entreprises ou établissements financiers internationaux viables ayant un besoin urgent de liquidités.
Le cas du constructeur suédois Volvo, racheté par une société chinoise au moment où l’Algérie s’entêtait inutilement à convaincre Renault de construire une usine de montage à Djendjen, est un parfait exemple des occasions ratées. On ne comprend également pas pourquoi le gouvernement algérien ne prend pas l’initiative de créer des fonds souverains comme le font pratiquement tous les pays pétroliers, quitte à confier la gestion très compliquée de ces établissements à des sociétés fiduciaires étrangères placées sous le contrôle (conseil d’administration, commissaires aux comptes) de l’Etat algérien. Le cas des équipements de production neufs (notamment de BTPH) bradés par les nombreuses entreprises européennes qui ont déposé leurs bilans en raison de la récession est également à relever ; on s’est volontairement privé de ce privilège en interdisant, au moyen de la loi de finances complémentaire pour 2009, l’importation de matériels et d’équipements d’occasion.
Nordine Grim