Algérie – France : l’inattendu José Gonzalez

TSA, 04 Janvier 2023

Quel mécanisme ou vicissitude de la politique a fait que José Gonzalez, député élu de l’extrême droite, de surcroît nostalgique de « l’Algérie française », accède à la vice-présidence du groupe d’amitié France – Algérie à l’Assemblée nationale ?

José Gonzalez n’est pas seulement un député du Rassemblement national, ex-Front national fondé par Jean-Marie Le Pen. C’est surtout un nostalgique invétéré de « l’Algérie française », à qui il est arrivé de déclarer qu’il ne savait pas si l’OAS (organisation de l’armée secrète) avait commis ou pas des crimes.

Au FN, il aurait travaillé avec Jean-Jacques Susini, l’un des fondateurs de la sinistre organisation qui a semé la mort dans les derniers mois de la guerre d’Algérie. En tout cas, il ne ratait pas un événement rendant hommage à ceux qui sont morts pour que l’Algérie reste française.

José Gonzalez, un nostalgique de « l’Algérie française »

José Gonzalez est le doyen (député le plus âgé) de la nouvelle assemblée française élue en juin dernier. C’est en cette qualité qu’il a présidé la séance inaugurale de la législature, au cours de laquelle il a prononcé un discours qui a choqué tant en France qu’en Algérie.

Gonzalez, né à Oran en 1943, est un rapatrié d’Algérie à l’indépendance. Dans son discours, il a exprimé toute sa nostalgie de sa « terre natale », à laquelle il a été « arraché par le vent de l’histoire », se définissant comme un « homme qui a vu son âme à jamais meurtrie ».

La nouvelle législature commençait bien. Le dérapage de Gonzalez n’était pas tout à fait une surprise, avec l’entrée en force de l’extrême-droite à l’assemblée. Signe de la montée de l’extrême-droite en France, le Rassemblement national a raflé près de 90 sièges aux dernières élections, une première depuis sa création au début des années 1970.

La surprise, c’est quand le même José Gonzalez a intégré le groupe d’amitié France-Algérie dont il a pris l’un des postes de vice-président.

Cette désignation a suscité l’incompréhension en Algérie et en France, dans les milieux de gauche et même chez l’extrême-droite dont plusieurs porte-voix ont accusé le député de trahison.

José Gonzalez, qui a annoncé lui-même la nouvelle sur les réseaux sociaux, a présenté sa nomination comme le « symbole » de son « intérêt particulier pour les relations franco-algériennes ».

Comment José Gonzalez s’est retrouvé dans le groupe d’amitié France – Algérie

Plusieurs interrogations entourent cette désignation complètement inattendue. Quels sont les desseins du député en sollicitant le poste ? Cherche-t-il réellement à promouvoir les relations avec un État souverain qu’il continue pourtant à voir comme une colonie que la France n’aurait jamais dû perdre ?

Veut-il peser et faire du lobbying en faveur du retour en Algérie de ceux qui n’ont pas le droit de le faire pour leur rôle pendant la guerre, et plaider la cause de ceux qui ne désespèrent pas de récupérer « leurs » biens perdus à l’indépendance ? Ou alors son but est-il seulement de semer la pagaille dans les relations entre l’Algérie et la France à l’équilibre déjà très précaire ?

Il y a lieu en effet de s’interroger sur les retombées pratiques de l’entrée d’une figure de l’extrême-droite, doublée d’un nostalgique de l’Algérie française, dans le groupe d’amitié France – Algérie.

Sa fonction l’amènera à traiter directement avec des parlementaires et responsables algériens de tous rangs, à les accueillir en France et même à se déplacer en Algérie. Les autorités algériennes accepteront-elles de le recevoir ? Rien n’est moins sûr.

Après une année de brouille, et au moment où elles se réchauffent sous l’impulsion des présidents des deux pays, les relations algéro-françaises avaient besoin d’autre chose que d’un tel cheveu sur la soupe.

Cela, même si, pour dédramatiser, il faut souligner que José Gonzalez n’est que l’un des neuf vice-présidents du groupe d’amitié et que sa nomination n’émane pas du gouvernement, ni même du parlement français. « Ce n’est pas une nomination politique de l’exécutif », assure une source française.

Le député s’est simplement engouffré dans la brèche du règlement de l’Assemblée nationale française qui donne le droit aux partis de choisir une vice-présidence d’un groupe d’amitié.