Détenus d’opinion : le Gouvernement persiste et signe

Lynda Abbou, RadioM, 13 novembre 2022

Alors que des dizaines de détenus d’opinion croupissent toujours dans les différentes prisons du pays et au moment où des défenseurs des droits humains dénoncent des poursuites arbitraires dont certaines sur la base d’accusations infondées, selon leurs avocats, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Abderrachid Tabi, a réitéré vendredi à Genève (Suisse) l’ »engagement ferme » de l’Etat algérien à œuvrer au renforcement et à la protection des droits de l’homme en Algérie tout en niant, toutefois, l’existence de détenus d’opinion.

Droit dans ses bottes, le gouvernement algérien persiste et signe: il maintient son déni concernant l’existence des détenus d’opinion en Algérie. Lors de son discours à l’occasion de l’examen périodique universel au Conseil des droits humains de la situation en l’Algérie, Abderrachid Tabi a affirmé qu’« en Algérie, le crime d’opinion et de presse n’existent pas, ni même les peines privatives de liberté pour les journalistes dans le cadre de l’exercice de leur métier ».

Il a également fustigé ce qu’il a appelé des « cas rares, délibérément surexploités sur les réseaux sociaux, concernant des individus poursuivis en Justice sur la base du droit public, et qui n’ont rien à voir avec la liberté d’expression », selon des propos repris par l’agence officielle. Selon lui, « ces individus ne disposent pas d’un statut de journaliste ni d’une accréditation nationale au profit d’un organe de presse étranger donné ».

Pourtant, rien que ces derniers jours, un journaliste du quotidien Echourouk, Belkacem Haouam a quitté la prison après avoir purgé une peine de deux mois de prison ferme. Il a été incarcéré suite à un article de presse sur l’exportation des dattes algériennes.

Un autre journaliste, Ihsane El Kadi en l’occurrence, directeur du pôle éditorial d’Interface médias, entreprise d’édition des sites d’informations Radio M et Maghreb Emergent, comparait devant le juge de la Cour d’Alger le 20 novembre 2022 suite à une plainte de l’ex ministre de la communication, Amar Belhimer après publication d’un article d’opinion sur le Hirak.

D’autres journalistes sont passés par la case prison, tandis que d’autres sont sous le coup de poursuites: c’est le cas des journalistes, Rabah Karech, Khaled Drareni, Hassan Bouras, Abdelkrim Zeghilech, Abdelmoundji Kheladi, Lynda Nacer, Zoheir Aberkane, Kenza Khatou, Mustapha Bendjamaa, Said Boudour, Djamila Loukil.

Des hommes politiques ou militants, dont des chefs de partis, ont connu des fortunes similaires, à l’image de Fethi Ghares, coordinateur du MDS, Karim Tabbou, coordinateur de l’UDS( non encore agrée), Mohcine Bellabes, ex Président du RCD ou encore l’actuel Président de ce parti, Athmane Mazouz.

Aussi, plusieurs détenus d’opinion ont quitté récemment la prison, avec acquittement pour certains, après plus de 15 mois de prison préventive. Pour les avocats, cette libération est une preuve du caractère infondé des accusations.

A Genève, le ministre de la justice a affirmé que « la démocratie ne s’accommode pas des comportements portant atteinte à la dignité des personnes, tout comme la liberté d’opinion, d’expression ou de réunion ne peut (être) fondée sur la logique de la subversion, des appels à l’insubordination, voire au séparatisme, ou à d’autres fins et tentatives de contourner le processus électoral afin d’accéder au pouvoir loin des voies constitutionnelles ». Des propos considérés comme un « déni » par les défenseurs des droits de l’Homme.