France : le débat sur la place des musulmans atteint l’armée

Riyad Hamadi, TSA, 11 Novembre 2022

La question du voile islamique et de la place des musulmans revient au-devant de la scène en France.

La publication d’un calendrier de l’armée française avec le portrait d’une femme voilée a suffi pour déclencher une avalanche de réactions.

Le voile islamique déclenche régulièrement la polémique même quand il est porté par une collégienne dans son établissement scolaire. Il ne pouvait pas en être autrement après qu’il eût figuré sur une œuvre d’une institution aussi officielle et importante que l’armée française.

Le calendrier controversé a été repéré par Damien Rieu, l’une des figures les plus en vue du mouvement identitaire en France. L’activiste d’extrême-droite, proche d’Eric Zemmour, l’a aussitôt mis en ligne sur Twitter, son réseau de prédilection.

C’est le genre de sujet que ne manque jamais l’extrême-droite de saisir au vol pour mettre davantage de pression sur le gouvernement à propos des questions liées à l’immigration, aux musulmans et à leur place dans la société française. Le portrait en question montre une femme voilée, en tenue civile.

Le ministère des Armées a réagi, avec une certaine maladresse toutefois. Indiquant d’abord qu’il s’agit d’un photomontage, donc d’une fausse information, le ministère a ensuite reconnu la véracité du calendrier, sans l’assumer toutefois.

« Après vérification approfondie », le ministère des Armées a constaté que le calendrier a été bel bien réalisé et diffusé à l’initiative d’une « équipe d’un service du ministère », assurant toutefois qu’il ne s’agit « en aucun cas d’un calendrier du ministère des Armées comme cela a été affirmé ».

« Produit interne d’un service », ce projet « n’a jamais été validé par la hiérarchie » et « n’a aucune valeur officielle», a insisté le ministère qui, même s’il n’assume pas, a tenté d’expliquer les motivations du choix de la photo. Il s’agit de « valoriser le personnel civil de recrutement local qui contribue de manière essentielle aux missions de nos armées sur le terrain », indique-t-il.

« L’armée française compte 30 % de musulmans »

Les interrogations se sont aussi multipliées sur l’identité de la femme figurant sur le portrait.

Son style vestimentaire a fait d’abord penser à une Afghane qui aurait servi d’interprète pour l’armée française lors de ses opérations dans ce pays. Mais il s’est avéré qu’elle était une Française d’origine djiboutienne qui a servi dans l’armée. C’est elle-même qui l’a affirmé sur les réseaux sociaux.

Sur son profil sur Twitter, qui affiche le nom de Ahmed Med Nadine, elle écrit que c’est un « honneur » pour elle d’avoir été choisie pour figurer sur le calendrier, expliquant que la photo avait été prise en 2021 lors de la remise de la médaille de bronze pour ses années passées dans l’armée. Elle a servi comme comptable dans une base militaire française à Djibouti. « J’espère que le sujet sera clos », conclut-elle.

Mais elle ne semble pas avoir été entendue. En France, ce genre de polémique ne s’estompe pas aussi rapidement.

Sur les colonnes de journaux et les plateaux télé, le sujet est largement discuté, débordant sur la place des musulmans en France, y compris dans l’armée.

Sur CNews, le militant associatif et ancien député européen Karim Zéribi a par exemple évalué le nombre de militaires français de confession musulmane à près du tiers de l’ensemble des effectifs de l’armée française.

« Il y a 30 % de nos militaires qui sont de confession musulmane (…) Notre armée française, sa grande puissance aussi, c’est qu’elle arrive à faire des soldats fiers d’être français, patriotes français, des Français de confession musulmane qui s’appellent, Kamel, Mohamed… », a-t-il défendu.

Un tiers des soldats français qui sont musulmans, voilà de quoi faire sortir davantage l’extrême-droite de ses gonds. La polémique risque de durer…