Près de 50 migrants algériens annoncés comme morts ou disparus
Drame en haute mer
Liberté, 27 septembre 2021
Quatre embarcations parties d’Oran, d’Alger et de Boumerdès ont fait naufrage sur les côtes espagnoles, causant la mort ou la disparition de près d’une cinquantaine de harraga algériens. Une nouvelle tragédie qui doit impérativement interpeller les consciences.
L’alerte a été donnée par Francisco José Clemente Martin, membre du Centre international pour l’identification de migrants disparus. Il a fait état de la mort ou de la disparition de près d’une cinquantaine de harraga algériens dans les eaux territoriales espagnoles après l’arrivée massive de plus de 1 000 migrants clandestins principalement dans l’archipel des Baléares. Parmi les victimes, des hommes, mais aussi des femmes et des enfants, ajoute la même source d’informations.
Ce bilan serait l’un des plus lourds enregistrés par le service maritime de la Garde civile, les gardes-côtes espagnols. Un drame en haute mer. C’était prévisible au regard des vagues incessantes d’embarcations de fortune qui quittent les côtes algériennes depuis quelques semaines, tout particulièrement.
José Clemente Martin, devenu celui qui alerte sur le drame migratoire du côté espagnol, a indiqué que quatre embarcations ont fait naufrage. Selon lui, deux d’entre elles avaient pris la mer à partir d’Oran, une d’Alger et une des plages de Boumerdès.
“Femmes, enfants et hommes ont perdu le bien le plus précieux, qu’est la vie. Pour chacun d’eux, il ne reste plus que la famille et leurs amis ; rien ne pourra les réconforter”, a écrit l’humanitaire espagnol en guise d’hommage aux victimes. Sitôt révélée, l’information de ce naufrage a eu un effet désastreux en Algérie. Plusieurs familles de jeunes harraga connaissent vite une forte angoisse. Chacune d’elles devait se dire que “mon fils fait partie des victimes”.
C’est le cas des familles de la région de Seddouk ou encore de Bouandas à Béjaïa. Leurs enfants n’ont pas donné signe de vie depuis leur départ.
Pour rappel, la presse espagnole avait indiqué, la semaine dernière, que huit corps de harraga, dont deux femmes et un enfant, probablement de nationalité algérienne ou marocaine, avaient été repêchés au large de sud de l’Espagne, précisément sur les plages de la province d’Almeria.
Le porte-parole de la Garde civile d’Almeria avait précisé que les cadavres retrouvés n’avaient pas encore été identifiés. Pourtant, une mauvaise météo avait été annoncée, ces derniers jours, sur toute l’Espagne avec des vents violents et une forte houle. Ainsi, de forts orages étaient attendus sur le pays après la fin d’un violent épisode d’intempéries sur le sud-est de l’Espagne.
Malgré le mauvais temps attendu, les embarcations des harraga continuaient de prendre le large en direction des côtes d’Almeria, de Murcie, d’Alicante et des îles Baléares. Jeudi dernier, trois pateras transportant une quarantaine de personnes sont parties d’Oran en fin de matinée, alors que d’autres départs étaient signalés un peu partout depuis des plages et criques algériennes.
Ce mois est particulièrement favorable aux traversées clandestines, puisqu’on a enregistré, du 1er au 23 septembre, plus de 2 200 Algériens qui ont débarqué sur les côtes espagnoles à bord de 150 embarcations ou plus. Des chiffres qui ne concernent que les clandestins secourus ou interceptés par le service maritime de la Garde civile.
Si Francisco José Clemente Martin regrette les pertes humaines, il déplore, en revanche, l’attitude de beaucoup de jeunes qui prennent la mer sans être vraiment dans le besoin.
“Je dis aussi que personne n’oblige ces jeunes à sortir et ces harraga paient de très grosses sommes d’argent en contrepartie. Je remarque que beaucoup d’entre eux viennent en Espagne juste pour s’amuser sans se soucier des circonstances. Beaucoup de jeunes n’ont pas besoin d’embarquer”, a-t-il écrit sur sa page Facebook.
Cette nouvelle tragédie qui se déroule en Méditerranée doit interpeller au plus haut point. Jusqu’à quand laissera-t-on les jeunes Algériens (garçons et filles) risquer leur vie en mer ? Mais surtout, jusqu’à quand resterons-nous dans le déni de la crise profonde que révèle le phénomène de la harga ?
SAïD OUSSAD