Sans électricité, sans carburant, sans gouvernement : Le Liban s’enfonce dans la crise et craint le pire

El Watan, 22 août 2021

Rien ne va plus au pays du Cèdre. Touché de plein fouet par la pire crise économique de son histoire, le Liban s’enfonce tous les jours un peu plus dans le chaos. Les services publics, exsangues, n’arrivent plus à fournir d’électricité.

Résultat, la région d’Akkar, dans le Nord, à la frontière syrienne, déjà en deuil suite à l’explosion d’une citerne d’essence le 15 août causant la mort d’une trentaine de personnes, a été coupée du monde le 17 août avec une interruption quasi totale des réseaux de téléphonie terrestre, cellulaire, mais aussi de l’internet. La situation n’est guère plus enviable pour les propriétaires de générateurs. Ceux-ci endurent les pénuries de carburant et la hausse des prix. Et comme si cela n’était pas assez pour les habitants de cette province, les hôpitaux publics et même privés craignent de ne plus pouvoir fonctionner.

Malheureusement pour le Liban, le chaos ne se limite pas au nord du pays. «La situation est désastreuse, la descente aux enfers de la population ne va pas s’arrêter», déplore Hala Bejjani, militante politique libanaise. «Le Liban connaît la plus violente crise économique des cent dernières années. Cette crise est due à la faillite de l’Etat ainsi qu’à son secteur bancaire. Il y avait des réformes à mettre en place pour éviter une telle situation, mais les dirigeants politiques et le gouverneur de la Banque centrale ont préféré le black-out total», s’indigne-t-elle au micro de Sputnik.

En effet, le système bancaire est en faillite totale. Les banques sont insolvables. Impossible donc pour les Libanais d’accéder à leurs économies. «J’avais mis de l’argent à la banque pour payer la scolarité de mes enfants, mais aujourd’hui je ne peux plus compter dessus», s’indignait Tony, un ingénieur qui gagnait 3000 dollars avant la crise et qui n’en perçoit plus que 500.

«Le Liban a un PIB de 55 milliards de dollars et des pertes d’environ 190 milliards, réparties entre les pertes de l’État libanais, celles de la Banque centrale avec 54 milliards de pertes et du secteur bancaire lui-même. Mais le problème est que cette faillite n’a pas été déclarée et aujourd’hui le nivellement est surtout en train de toucher les plus pauvres», estime Hala Bejjani. Il y a de quoi être remonté ! Faire son plein d’essence est devenu un calvaire. Devant les stations-service, les files d’attente s’étirent sur plusieurs kilomètres. Sous un soleil de plomb, les automobilistes attendent des heures pour finalement n’obtenir que vingt litres. Rationnement oblige.

Le pays tourne ainsi au ralenti. Les habitants peinent à se rendre sur leur lieu de travail. Des magasins sont obligés de mettre la clé sous la porte par manque d’électricité. La nourriture des restaurants est avariée à cause des défaillances des réfrigérateurs. Les bars ferment à 17h, ne pouvant compter que sur la lumière du jour. Le Liban est pourtant familier des problèmes électriques et des pannes en tout genre. «La crise de l’électricité remonte à une vingtaine d’années», rappelle l’activiste. Avant la crise de 2019, le pays subissait des coupures de courant plusieurs fois par jour. Les générateurs, alimentés en mazout, prenaient le relais. Mais ça, c’était avant.