Banques publiques: Relance du projet d’ouverture du capital

A. Maktour, Le Soir d’Algérie, 10 août 2021

Aux grands maux, les grands moyens, dit-on. La structure de l’économie algérienne a montré ses limites depuis bien longtemps, avec les dégâts que l’on sait, et malgré les «retouches» apportées ici et là depuis quelque temps, la vie économique du pays demeure toujours aussi fortement tributaire des recettes des hydrocarbures. Plus encore, même ces dernières ne s’avèrent pas d’une grande utilité pour une économie qui, on s’en rend compte finalement, a besoin d’une nouvelle orientation, d’une nouvelle philosophie. C’est ce que suggèrent les décisions annoncées à l’issue de la dernière réunion du Conseil des ministres.
La longue liste des orientations données par le président de la République s’est allongée d’une nouvelle batterie énoncée dimanche à l’issue de la réunion du Conseil des ministres dominée par les questions liées à la situation sanitaire et aux questions économiques, soit les urgences de l’heure. Sur le plan économique, l’industrie, qui focalise l’attention avec la série de rencontres initiées depuis deux semaines, est revenue au-devant des préoccupations, à commencer par la question qui n’en finit pas de traîner depuis des lustres ; le foncier industriel. En effet, après l’audit exigé il y a une dizaine de jours pour le recensement du patrimoine foncier industriel, notamment les espaces inexploités qu’ils aient été attribués ou non, le premier magistrat du pays a livré une nouvelle piste à ceux chargés de défricher le terrain en suggérant la création d’agences du foncier industriel, agricole et urbanistique. Une exigence, évidemment, puisée de la dure réalité à laquelle sont confrontés les investisseurs lorsqu’ils énumèrent les embûches, parmi d’autres, auxquelles ils font face parfois jusqu’à carrément abandonner. Dans le même ordre d’idées, et afin de redynamiser l’investissement, en dehors du règlement des problèmes des zones industrielles, de leur exploitation et leur gestion, il s’agira de créer dans l’immédiat et à travers toutes les communes des zones d’activités destinées aux projets portés par les jeunes promoteurs de PME.
L’investissement a requis, encore une fois, toute l’attention. Pour encourager le partenariat et créer des opportunités d’emploi, tout en veillant à opérer un équilibre en matière d’investissement entre les régions, la panacée, c’est d’accélérer la promulgation de nouveaux textes de loi sur l’investissement, suggère Abdelmadjid Tebboune. Là, ce dernier s’est employé à donner des idées à son exécutif pour trouver des ‘’solutions efficaces’’. Dans cette optique, l’ouverture du capital des entreprises publiques, dont les banques, a été évoquée. Certes, ce n’est pas la première fois qu’est mise sur la table la lancinante, voire sensible pour certains, question de la privatisation ou l’ouverture à la mixité du capital, privé et public, des entreprises étatiques, mais, cette fois, l’idée prend des allures de solution définitivement arrêtée. Des faits récents appuient cette option de l’ouverture du capital des entreprises de l’État. A commencer par la réunion, tenue récemment, dédiée à la potentielle ouverture du ciel algérien à l’investissement privé, voire même le changement de statut de la compagnie nationale. En tous les cas, il est maintenant clairement admis par les autorités du pays que l’ambition de redonner au pays une industrie digne du nom est un fardeau que les entreprises du secteur public ne peuvent porter à elles seules.

Et l’on reparle de l’ouverture au capital privé

Mais le plus «parlant» des exemples de potentielles ouvertures de capital demeure sans conteste la ‘’grande nouvelle’’ annoncée il y a plus d’une année maintenant, lorsqu’il avait été fait état de l’ouverture de deux banques publiques au capital privé. Annoncée de façon quasi solennelle, mais sans lendemain. Ensuite, c’est à peine si la création d’une banque spécialisée dans le commerce extérieure a été annoncée au début de cet été. Sinon, du projet de la semi-privatisation de deux banques publiques, point d’éclairage, hormis ceux apportés par de nombreux spécialistes des questions économiques et financières, dont certains n’ont pas manqué d’afficher leur scepticisme sur l’idée en raison de l’état général des banques primaires algériennes, à l’instar d’entreprises d’autres secteurs d’activité, en perpétuelle demande de refinancement public, d’une manière ou d’une autre. Comme le financement par la planche à billets a ses limites et ses risques, et le recours à l’endettement extérieur est honni, en haut de l’État on semble désormais privilégier l’ouverture au privé, c’est ce que semble suggérer l’orientation du président de la République. Une ouverture par paliers d’autant que la loi 49-51 n’a plus cours que dans les secteurs dits stratégiques. L’objectif non dit c’est, également, d’attirer les capitaux privés dormants ou ceux injectés dans les circuits de l’économie parallèle.
En parallèle à ces «orientations» destinées à redynamiser l’industrie, l’agriculture a, elle aussi, eu son lot de décisions, en plus de celles qui ont été énoncées dans la feuille de route 2020-2024. Ainsi, la réunion du Conseil des ministres de dimanche a abouti à des orientations pour la création, «aux frais de l’État», d’unités pilotes de l’industrie de transformation pour la production de la betterave sucrière et de l’huile végétale, l’encouragement de l’arboriculture fruitière, l’accélération de l’entrée en service avant la fin de cette année de l’usine de production des huiles végétales dans la wilaya de Jijel, un recensement des terres agricoles et détermination de leur nature, la revue du mode de financement des éleveurs, et confier l’importation du blé à l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) à titre exclusif, et ce, suite à l’enregistrement de dépassements en la matière.
Azedine Maktour