Plus de six ans après le premier procès: L’affaire Sonatrach 1 revient devant la chambre criminelle

Salima Tlemcani, El Watan, 16 juin 2021

Le procès en appel de l’affaire Sonatrach 1 s’ouvre aujourd’hui devant la cour d’Alger. Une quinzaine de personnes, dont l’ancien PDG du groupe Sonatrach, Mohamed Meziane, ses deux enfants et huit membres de l’exécutif du groupe pétrolier, ainsi que quatre sociétés étrangères doivent répondre des faits de corruption, qui leur sont reprochés et pour lesquels le tribunal criminel près la cour d’Alger avait prononcé, il y a plus de 6 ans, des peines allant de 18 mois de prison ferme à 6 ans.

Le procès Sonatrach 1 revient aujourd’hui devant la chambre criminelle près la cour d’Alger. Près d’une quinzaine de personnes, dont l’ancien PDG de Sonatrach, ses deux enfants, huit anciens membres de l’exécutif du groupe pétrolier et quatre sociétés étrangères sont appelés à comparaître pour «association de malfaiteurs», «passation de marchés en violation de la législation et du règlement», «octroi d’avantages injustifiés au profit d’autrui» et «augmentation des prix lors de la passation des marchés», «dilapidation de deniers publics», «corruption, abus de fonction et blanchiment d’argent», «violation de la réglementation de change».

Des griefs pour lesquels 12 personnes morales et physiques ont été jugées et condamnées, il y a plus de six ans, à des peines allant de 18 mois avec sursis à 6 ans de prison ferme assorties d’amendes, et sept autres ont obtenu l’acquittement.

Sentence contre laquelle, aussi bien le représentant du ministère public que les accusés, se sont pourvus en cassation devant la Cour suprême, laquelle a cassé le verdict et renvoyé toutes les parties devant la chambre criminelle près la cour d’Alger, pour un deuxième procès. Programmée une première fois, il a été renvoyé en raison de l’absence des représentants de trois sociétés étrangères, bloqués à l’étranger en raison de la crise sanitaire.

Ainsi, l’ancien PDG de Sonatrach, Mohamed Meziane, qui, faut-il le préciser, fait l’objet de trois autres poursuites, encore en instruction au niveau du pôle pénal financier près le tribunal de Sidi M’hamed, comparaîtra, aujourd’hui, avec ses deux enfants, deux de ses vice-présidents, Amar Zenasni, Belkacem Boumediene, l’ex-directeur général du CPA, Hachemi Maghaoui, son fils Yazid, Mohamed Réda Djaâfar Al Smail, patron de la société algéro-allemande Contel-Funkwerk, ainsi que quatre entreprises étrangères, dont Contel-Funkwerk, Saipem Contracting Algérie (italienne) et Funkwerk.

Après avoir purgé leurs peines, tous devront répondre des accusations d’«association de malfaiteurs», de «passation de marchés en violation de la législation et du règlement», «d’octroi d’avantages injustifiés au profit d’autrui et augmentation des prix lors de la passation des marchés», de «dilapidation de deniers publics», de «corruption, d’abus de fonction, de blanchiment d’argent», et de «violation de la réglementation de change».

«Conditions douteuses, voire frauduleuses»

Les faits remontent aux années 2004-2010 et concernent l’octroi de marchés de gré à gré d’une valeur de 11 milliards de dinars, dans des conditions «douteuses», voire «frauduleuses», ayant abouti à plusieurs condamnations.

Au centre du scandale, Réda Djaâfar Al Smail, patron du groupe Contel Algérie Funkwerk Pletac, considéré par l’enquête judiciaire comme principal accusé, dont les sociétés qu’il détient ont obtenu des «privilèges injustifiés», alors que les offres présentées étaient plus élevées que celles des autres soumissionnaires.

Il est donc reproché à l’ancien PDG de Sonatrach d’avoir «facilité» l’octroi des marchés de télésurveillance à Funkwerk, en contrepartie de la cession d’une partie des actions de cette société à ses deux enfants, mais aussi d’avoir accordé un important contrat à Saipem Algérie, filiale du groupe pétrolier italien, Eni, pour la réalisation du gazoduc reliant l’Algérie à l’Italie, au moment où l’un des deux fils du PDG du groupe pétrolier travaillait comme conseiller de l’ex-directeur de la filiale italienne en Algérie.

Facilitations d’octroi de marchés

Mohamed Meziane a été condamné à 5 ans de prison et une amende de 2 millions de dinars pour avoir «facilité» l’octroi des marchés d’installation de systèmes de télésurveillance à la société allemande Funkwerk en «contrepartie» de la cession d’actions à ses deux enfants, mais aussi d’avoir privilégié Saipem, filiale du géant italien de l’énergie ENI, dans un contrat de 586 millions de dollars pour la réalisation d’un gazoduc entre l’Algérie et l’Italie, (qu’elle a sous-traité avec une société française Piecapag, concurrente lors de la soumission), alors que l’un de ses deux enfants était conseiller du directeur de cette société italienne à Alger. Mohamed Meziane a écopé d’une peine de 5 ans de prison et une amende de 2 millions de dinars, ses deux enfants, Réda et Bachir-Fawzi, ont été condamnés à des peines, respectivement, de 6 et de 5 ans de prison ferme.

Le tribunal criminel d’Alger avait également prononcé des sanctions pécuniaires de 5 millions de dinars contre Funkwerk, de 6 millions de dinars contre la Sarl Contel Algérie et le groupe algéro-allemand Contel-Funkwerk (dont le patron Mohamed Réda Djaâfar Al Smail a écopé de 6 ans de prison ferme).

Lors du premier procès, le nom de l’ancien ministre de l’Energie, Chakib Khelil, réfugié aux Etats-Unis, a été cité à plusieurs reprises, de même que celui de son homme de confiance, Réda Hamech, chef de cabinet de Mohamed Meziane. Les deux font l’objet de mandats d’arrêt internationaux dans le cadre du dossier Sonatrach 2, mais aussi en ce qui concerne Chakib Khelil, qui est impliqué dans d’autres affaires pendantes au niveau du pôle pénal spécialisé de Sidi M’hamed, à Alger.