Réforme du système de santé: Les mises en garde du SNPSP

Nawal Imès, Le Soir d’Algérie, 3 juin 2021

En matière de réformes du système de santé, beaucoup de temps a été perdu. Le constat est établi par le Dr Lyes Merabet, président du syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) pour qui «beaucoup aurait pu être déjà fait». Il met en garde contre la répétition de ce scénario à l’occasion de la réouverture du dossier de la réforme.
Nawal Imés – Alger (le Soir) – La réouverture du dossier de la réforme suscite autant d’espoirs que de craintes chez les partenaires sociaux. C’est le cas du syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) qui craint que le processus ne connaisse le même sort que toutes les tentatives de réformes initiées jusque-là.
Invité de la rédaction de la Chaîne 3 de la Radio nationale, le Dr Lyés Merabet a regretté tout le temps perdu depuis le lancement du premier chantier de réformes, estimant que «beaucoup de questions auraient pu être réglées. On a perdu beaucoup de temps. Beaucoup de compétences sont parties, soit dans le secteur privé ou à l’étranger».
Pour lui, le problème réside dans le fait qu’il n’y ait pas de tableau de bord et que la course derrière les questions d’urgence ait prédominé. «Beaucoup d’argent a été dépensé, beaucoup de plans élaborés n’ont jamais été mis en œuvre».
Effectuant un bilan de ce qui a été élaboré depuis des années, l’invité de la radio assure que «le constat est qu’on n’a pas beaucoup évolué, notamment en matière de prise en charge du cancer, en raison des pannes de matériels, des traitements qui ne sont pas dispensés, de la prise en charge des enfants cancéreux avec des schémas thérapeutiques qui ne sont pas disponibles».
«Actuellement, ajoute le Dr Merabet, la crainte, c’est que justement cette réforme ne prenne ce même cheminement. C’est pour cela que nous interpellons les plus hautes autorités.» Il rappelle qu’une feuille de route a déjà été présentée, des échéances ont été arrêtées, un travail a déjà été engagé avec l’espoir «d’arriver rapidement à travers des ateliers régionaux, puis des assises au niveau national à présenter un projet consensuel qui réponde aux aspirations de tous». Quelles sont les priorités ? Pour le Dr. Merabet, il faudra d’abord «organiser déjà ce qui est disponible avec une redistribution équitable des moyens humains existants, dégager les besoins, trouver des solutions aux déserts médicaux, mais le nerf de la guerre, c’est l’argent : il faudra trouver la ressource financière pour soutenir cette réforme, mais surtout trouver les moyens de pérenniser ces financements. Il faut mettre en place des structures qui répondent aux normes mais aussi s’organiser en pôles et en régions sanitaires avec un CHU, une faculté et des terrains de stage, des laboratoires de recherche. C’est à travers cette organisation qu’on peut arriver à un équilibre des moyens humains et financiers».
Le Dr Merabet ajoute qu’il fallait également lancer le débat sur la contractualisation des actes médicaux et paramédicaux en raison des grosses contraintes rencontrées par le citoyen en matière d’exploration même pour les assurés sociaux. Une réflexion devrait également être menée sur la sortie du personnel de la santé de la fonction publique expliquant que «d’autres pays l’ont déjà testée. Le schéma actuel est figé, inextensible, et ne répond pas aux besoins de la santé en raison de sa spécificité : amplitudes horaires par exemple. La situation épidémiologique a remis cette question au cœur des débats dans de nombreux pays. Une réflexion doit s’engager pour ramener des solutions qui n’ont pas pu être mises en place».
Un système de santé, dit-il, c’est d’abord une ressource humaine avec la valorisation de la situation sociale, des projections en matière de carrières, déplorant que plus de 15 000 Algériens aient été contraints de choisir d’exercer en France.
N. I.