Fermeture et suspension des ports secs : Le préjudice d’une situation non assainie

Mokrane Ait Ouarabi, El Watan, 14 mars 2021

L’arrêt de l’exploitation de 17 ports secs a provoqué une surcharge des ports maritimes et un surcoût dans le déchargement des marchandises qui dépasse les délais contractuels.

La majorité des ports secs se trouve actuellement dans une situation pour le moins incompréhensible. Faisant l’objet de suspension ou de réserves, des ports secs sont maintenus dans le flou total pendant de longs mois, ne pouvant plus se projeter dans l’avenir et laissant des centaines, voire des milliers de travailleurs sur le carreau.

En effet, suite aux instructions des pouvoirs publics visant à assainir les zones sous douanes et à mettre en conformité les ports secs, la direction générale des Douanes avait procédé le 20 juillet 2020 à la fermeture de six ports secs, la suspension de 11 autres pour un délai de deux mois non renouvelable et la mise en demeure de cinq autres pour le même délai de deux mois. Si la fermeture des six ports était définitive, la suspension et les mises en demeure étaient, en revanche, temporaires. Elles ne devaient pas dépasser deux mois.

Si au bout de ces deux mois, les concernés se sont conformés à la réglementation en vigueur, la direction des Douanes lèvera la suspension ou la mise en demeure. Dans le cas contraire, une décision de fermeture sans préavis sera prise à leur encontre. Mais voilà que les délais ont expiré depuis plus de cinq mois et aucune décision n’a été prise ni dans un sens ni dans l’autre.

«On nous a donné deux mois pour pallier les manquements et défaillances. Nous avons effectué des travaux et installé des équipements exigés dans les délais. Mais huit mois après la suspension, nous attendons toujours la décision finale de la direction des Douanes qui tarde à venir», nous confie une source interne à l’un de ces ports secs, selon laquelle la situation actuelle des ports secs est inexplicable, en ce sens que la décision de suspension devait durer deux mois.

Une fois ce délai passé, il devait y avoir soit une levée de suspension ou de réserves, soit une décision de fermeture sans préavis. «Mais jusqu’à aujourd’hui, il n’y a eu ni l’une ni l’autre. Les choses devaient pourtant être clarifiées au bout de deux mois : soit on nous signifie une cessation définitive d’activité, soit on nous autorise à reprendre le travail», ajoute notre source.

Cette situation pénalise en effet ceux qui ont fait le nécessaire pour se conformer à la loi et profite à ceux dont l’activité n’a pas été mise à l’arrêt, malgré la persistance des réserves. Des ports secs qui ont fait l’objet d’une mise en demeure continuent leurs activités, malgré le constat de manquements à la réglementation, a-t-on appris de sources sûres. «Pour justifier leur maintien en activité, la direction générale des Douanes a créé un groupe de suivi qui permettrait d’élargir indirectement les délais bien fixés dans la décision», ont poursuivi nos sources.

Aussi, la suspension des 11 ports secs est maintenue au-delà du délai de deux mois. Si l’on se fie à la décision de la direction des Douanes, ceux qui se sont conformés à la réglementation devaient bénéficier de la levée de suspension il y a quelques mois. Quant à ceux qui ne s’y sont pas conformés, ils devaient être fermés. Mais, ils n’ont reçu ni décision de fermeture ni celle les autorisant à reprendre leur activité. Pourtant, il y a ceux qui ont fait l’effort de se conformer aux exigences réglementaires.

Cette situation est préjudiciable à la fois aux exploitants, à leurs employés ainsi qu’au Trésor public. En effet, l’arrêt de l’exploitation de 17 ports secs a provoqué une surcharge des ports maritimes. Cette surcharge a eu un impact direct sur le séjour des marchandises dans ces ports.

La surcharge des ports maritimes induit automatiquement un retard dans le chargement ou le déchargement des navires. «Ce retard se répercute sur les surestaries et fait augmenter les indemnités versées en devises à des armateurs étrangers», ont indiqué nos sources, qui sont en train de quantifier le préjudice causé par cette situation. Une situation qui est à l’opposé de la doctrine du gouvernement, qui vise à réduire les dépenses et à économiser les devises pour préserver les réserves de change dans ce contexte de crise économique acerbe.