Financement des entreprises par les banques et établissements financiers en plein Covid-19 : Le rappel à l’ordre de la Banque d’Algérie
Ali Benyahia, El Watan, 09 mars 2021
L’autorité monétaire et financière vient de lancer un avertissement à l’adresse des banques et établissements financiers de la place pour se conformer aux directives émises au sujet de l’accompagnement des entreprises dans le contexte très particulier de la pandémie du coronavirus.
La Banque d’Algérie vient, dans une note adressée aux pdg de banques et établissements financiers de la place, un sévère rappel à l’ordre quant aux manquements constatés dans l’application des mesures d’accompagnement des entreprises intervenues en pleine pandémie de la Covid-19. L’autorité monétaire a rappelé à ce sujet les mesures d’ordre monétaire et prudentiel arrêtées dès avril 2020 suite à l’avènement de la pandémie de Covid-19.
Ces mesures, a-t-elle expliqué, étaient destinées à leur permettre d’assurer un «accompagnement adéquat» des entreprises de production des biens et services, à l’effet de juguler les effets négatifs de la pandémie sur l’économie nationale. A ce titre, la Banque centrale fait remarquer : «Il semble toutefois que certaines banques n’aient pas saisi le sens des mesures initiées par la Banque d’Algérie et continuent à appliquer aux entreprises affichant des situations de difficulté passagère des mesures de recouvrement coercitives».
Il s’agit en l’occurrence, selon la note de la BA, de «l’application de pénalités de retard sur le paiement des échéances de crédit, permettant ainsi à certaines banques d’augmenter leurs revenus en contradiction avec l’éthique, et l’émission de saisies-arrêts par certaines banques à l’encontre de leur clientèle en difficulté de remboursement de crédit». L’autorité monétaire a ainsi attiré l’attention des responsables de banques sur le danger que ce comportement pourrait engendrer à l’avenir.
«Mesures létales»
«Ces mesures sévères, voire létales à l’encontre de l’entreprise dans ce contexte particulier, a-t-elle souligné, exposent les banques recourant à ce genre de pratiques à détenir dans leur portefeuille un volume plus élevé de créances irrecouvrables, susceptibles d’obérer à terme leur situation bilancielle». Et ensuite de déclarer que «cette façon de faire s’inscrit totalement en porte-à-faux par rapport aux objectifs visés par la Banque d’Algérie ainsi que les raisons ayant motivé les facilitations consenties et avantages accordés, à titre exceptionnel, aux banques, en leur permettant notamment la libération davantage de fonds propres afin de préserver leur capacité à poursuivre le financement des entreprises durant cette période de crise sanitaire».
Expliquant le sens des dernières mesures intervenues durant la crise sanitaire qui a affecté lourdement l’activité économique, la Banque d’Algérie souligne que «les assouplissements et allègements exceptionnels ont été adoptés dans l’objectif de soutenir et de préserver la résilience des banques face aux difficultés auxquelles seraient confrontée leur clientèle, impactée par la crise sanitaire».
Par cette action, la Banque d’Algérie affirme avoir compté sur «un engagement solidaire et un esprit de discernement» des banques de la place à l’effet d’apporter le soutien nécessaire à leur clientèle en cette période difficile. Le maintien et le développement de l’activité des entreprises, a-t-elle fait remarquer, constitue un gage de pérennité de l’exercice de l’activité des banques qui concourt, in fine, à la préservation de leurs propres intérêts. Enfin, la BA affirme être disposée à prendre, ce faisant, «à sa discrétion, les mesures appropriées contre tout manquement qu’elle aura à constater».
Selon la note de la Banque d’Algérie de fin février dernier retraçant l’évolution de situations monétaire et prudentielle à fin 2020, il ressort que les crédits à l’économie affichent une croissance de 3,05% en 2020 contre 8,84% en 2019.
Aussi, les crédits accordés en 2020 pour les entreprises publiques et privées ainsi qu’aux ménages ont augmenté respectivement de 2,57%, de 3,45% et 4,15%. Les crédits accordés au secteur public représentent 51,67% du total des crédits, le privé ayant obtenu 48,32% dont 8,2% sont accordés aux ménages. En termes prudentiels, la note de la Banque d’Algérie fait constater que l’analyse de la situation du système bancaire à fin 2020 en matière de solvabilité et de niveau de liquidités fait ressortir des «niveaux largement supérieurs aux minimas réglementaires exigés».