Assassinat de l’ancien DGSN, Ali Tounsi: Le procès en appel reporté au 4 mars
Liberté, 24 février 2021
L’affaire revient après l’avis favorable prononcé par la Cour suprême au pourvoi en cassation introduit par Chouaib Oultache, l’ancien chef de l’unité aéroportée de la Police contre le verdict du mois de mars 2017.
Le procès en appel de l’assassinat de l’ex-directeur général de la Sûreté nationale Ali Tounsi, qui devait se tenir à la Cour d’Alger hier, a été ajourné au 4 mars à la demande de l a défense. Les avocats des parties civiles et de l’accusé se sont présentés en audience, sans leur toge noire, pour expliquer à la cour qu’ils étaient en grève, en solidarité avec leur collègue de Blida, placé, il y a cinq jours, en détention préventive.
Le report s’imposait, dès lors qu’un procès en criminel ne peut s’ouvrir sans la présence du collectif de défense. L’affaire de l’assassinat le 25 février 2010 d’Ali Tounsi dans son bureau revient (reprend), après l’avis favorable prononcé par la Cour suprême au pourvoi en cassation introduit par Chouaib Oultache, l’ancien chef de l’unité aéroportée de la Police contre le verdict du mois de mars 2017, le condamnant à la peine capitale pour homicide volontaire avec préméditation et guet-apens.
Au bout de deux jours d’audience, de nombreuses zones d’ombre ont persisté à l’époque. Les affirmations livrées par l’accusé étaient en totale contradiction avec le rapport d’autopsie, l’enquête balistique et les investigations judiciaires. Oultache avait soutenu à la barre qu’il avait blessé Ali Tounsi au bras parce qu’il le menaçait avec un coupe-papier.
“Les balles qu’il a reçues à la tête ne sont pas les miennes. Ce sont des balles de 8 mm et mon pistolet fonctionne avec des balles de 9 mm”, avait-il avancé. Il maintiendra cette version jusqu’au bout, relayé par sa défense qui base également sa plaidoirie sur le principe de la légitime défense.
Le rapport d’autopsie, lui, évoque l’impact de deux balles de 3 cm à la tête, dont un orifice sur la joue avec un ricochet sur l’épaule. Le déroulé de la version retenue par la justice est le suivant : l’alerte sur une personne menaçant le DGSN dans son bureau a été donnée à la salle des opérations de la sûreté de wilaya d’Alger à 11h30, le 25 mars 2010
. À son arrivée sur les lieux, l’équipe d’intervention a trouvé Oultache assis sur un fauteuil, à droite de l’entrée du bureau du DGSN, avec dans la main une arme de marque américaine Smith & Wesson dotée d’un chargeur à six balles dont deux sont retrouvées sans douilles, utilisées dans le crime, et les quatre autres bloquées dans l’arme après une tentative d’utilisation.
Il était blessé au ventre et à la jambe gauche par des balles tirées par la garde rapprochée du défunt. Le défunt DGSN gisait, lui, sur le ventre, les jambes croisées, dans une mare de sang. Il avait dans la main une lettre sortie de son enveloppe et un coupe-papier. Tounsi a reçu, conclut l’enquête judiciaire, deux projectiles mortels à la tête.
Au cœur de cette affaire, un article paru dans le journal Ennahar. Le matin du drame, le défunt Tounsi demande une traduction en français de l’article en question évoquant une transaction douteuse concernant l’acquisition d’onduleurs par la Sûreté nationale, dans laquelle serait impliqué le colonel Oultache.
Le journal annonce également le limogeage de ce dernier. Oultache a, de son côté, lu cet article au cours de son trajet vers le siège de la DGSN. Dès son arrivée, il se précipite dans le bureau de Tounsi et lui demande s’il a réellement l’intention de mettre fin à ses fonctions. Le ton monte rapidement entre les deux hommes. Mais le dossier judiciaire ne contient pas la décision de fin de fonction contre Oultache.
Alors, d’où provenait l’information d’Ennahar ? Son ex-directeur de la publication Anis Rahmani a déclaré au juge d’instruction qu’il l’avait obtenue au téléphone auprès d’un informateur anonyme. Et que c’est lui en personne qui avait briefé la journaliste auteure de l’article.
Il s’est abstenu, toutefois, de se présenter à l’audience en 2017 pour apporter son témoignage. Si Oultache maintient cette version au procès, à savoir ne pas avoir tiré sur Tounsi, se posera alors la question de savoir qui l’a fait.
Nissa H.