Imposante marche nocturne contre la prolongation du confinement à Jijel : La population exprime sa désapprobation

Fodil S., El Watan, 02 février 2021

C’est surtout la situation socioéconomique qui semble peser dans ce cri à l’unisson de la population d’une wilaya qui accusait déjà des retards bien avant la survenue de la pandémie de Covid-19.

Pour la deuxième nuit consécutive, la ville de Jijel a vibré, hier, au son des chants et autres slogans entonnés dans une imposante marche, qui a vu la participation de jeunes et moins jeunes qui voulaient montrer leur désapprobation de la mesure de prolongement du couvre-feu.

Outre les manifestants, la marche a rassemblé une escouade de motocycles la devançant, alors qu’à l’arrière, véhicules légers et autres fourgons terminaient la procession bruyante et pacifique.

Par moments, une grosse cylindrée déchirait la nuit avec ses assourdissants vrombissements, suscitant parfois des olas enthousiastes des jeunes, mais aussi de l’agacement chez beaucoup de manifestants.

D’aucuns estiment cette mesure de prolongement du couvre-feu injuste et inéquitable, vu les chiffres officiels diffusés à propos des cas de contamination par le coronavirus.

Certains dans la foule parleront même d’une mise à l’index de la région. Et c’est surtout la situation socioéconomique qui semble peser dans ce cri à l’unisson de la population d’une wilaya qui accusait déjà des retards bien avant la survenue de la pandémie de Covid-19.

Peu avant l’entrée en vigueur de la mesure de confinement à partir de 20h, rien n’indiquait que la population allait sortir une deuxième fois crier son désarroi après la manifestation de samedi soir. Mais à 20h sonnantes, les premiers slogans commençaient à fuser ici et là dans la ville, sonnant le clairon pour les rassemblements «d’échauffement».

Les premiers sont signalés dans au moins trois points : Ouled Aïssa et Ayouf dans la haute ville, et la cité Hellala Hocine, dans la basse ville. Ainsi, après la première manifestation spontanée de la nuit de samedi, la deuxième marche d’hier a réuni beaucoup plus de monde.

Le premier groupe, qui s’est ébranlé d’Ouled Aïssa, rejoindra un deuxième qui manifestait bruyamment sa désapprobation à Ayouf, près de la trémie, avant de descendre par le centre-ville, en longeant le siège de la wilaya, grossir à Village Moussa puis au centre-ville, notamment à l’avenue Abdelhamid Benbadis et celle de l’Emir Abdelkader, pour se terminer à la place faisant face au siège de l’APC.

Une grande banderole, sur laquelle on pouvait lire : «Les politiques ayant échoué sont plus dangereuses que le corona», a été accrochée à un mur, sur l’avenue Benbadis, avant d’être reprise pour ouvrir la marche au centre-ville, alors que les manifestants n’ont cessé de scander «Makanch el hadjr !» (Il n’y aura pas de confinement) et de reprendre de vieux slogans du hirak comme «Lebled bladna wen dirou raïna !» (Ce pays est le nôtre et nous ferons ce qui nous plaît).

Les chants chers aux arènes footballistiques accompagnés d’une derbouka étaient aussi de mise tout le long du parcours. «Tout ce qu’on demande, c’est qu’ils suppriment ce confinement», lançaient de temps à autre des jeunes.

Mohamed, un sexagénaire interrogé sur ces sorties nocturnes, nous dira : «Notre wilaya est déjà en retard par rapport à beaucoup d’autres, et si on lui ajoute un confinement serré, c’est carrément une double sanction.» Avant d’ajouter : «En tout cas, je trouve cette sortie justifiée, bien que certains essaient de lui prêter de mauvaises intentions.»

Il continuera en expliquant que «la situation sociale est critique dans la wilaya et ils peuvent dire ce qu’ils veulent, car pour nous l’intérêt de la nation prime toujours».

Il y a lieu de mentionner que les deux marches pacifiques se sont déroulées sans le moindre accroc. De leur côté, les services de sécurité se sont fait très discrets.