Plus de 4000 diplômés des ENS au chômage

Ils réclament leur embauche «automatique» comme le stipule leur contrat

Iddir Nadir, El Watan, 27 octobre 2020

La situation des ENS, une dizaine au niveau national, reste tendue depuis la grève nationale de 2017 : des étudiants ont revendiqué un «engagement» de leur ministère de tutelle (Education nationale) de les recruter à la fin de leur formation, comme l’exige le contrat signé au début du cursus. La clause (article 4) liée au lieu de résidence a été modifiée, mais on n’a pas trouvé de solution au problème.

Plus de 4000 nouveaux diplômés des 11 Ecoles nationales supérieures (ENS) du pays attendent leur recrutement «direct» dans les établissements scolaires. Des actions de protestation périodiques sont organisées dans plusieurs chefs-lieux de wilaya par ces futurs enseignants, mais à ce jour, le ministère de tutelle (Education) refuse de dialoguer et satisfaire leurs revendications. «4400 diplômés sont actuellement au chômage.

Pourtant, le contrat qui nous lie au ministère de tutelle (Education) est clair : il prévoit notre recrutement immédiat à la fin de notre cursus de formation. Il y a eu 8000 diplômés des dernières promotions, dont moins de la moitié a été embauchée», précise un diplômé de l’ENS, qui a souhaité gardé l’anonymat, «par crainte de représailles».

La situation des ENS, une dizaine au niveau national, reste tendue depuis au moins 2017 : des étudiants ont revendiqué, durant plus de cinq mois, un «engagement» de leur ministère de tutelle de les recruter dans leur lieu de résidence à la fin de leur formation, conformément à l’article 4 du contrat qui les lie au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique et au ministère de l’Education nationale. En 2018, le ministère de tutelle a modifié la clause (article 4) relative à l’embauche dans la wilaya d’origine.

A ce jour, on n’a toutefois pas trouvé de solution à ce problème, puisque des étudiants des anciennes promotions attendent leur recrutement. «Le ministère a cru pouvoir en finir avec la protestation en modifiant l’article 4, qui a été reformulé comme suit : les diplômés sont certes recrutés automatiquement, mais sans spécifier le lieu de résidence.

Nous rejetons cette décision prise sans concertation et qui nous pénalise, surtout que les conditions de travail hors wilaya sont inexistantes : pas de logement de fonction, ni aucune mesure incitative. Je précise que cette situation met dans l’embarras les filles», s’offusque un diplômé.

Un surplus d’ENS ?

La situation se serait dégradée, semble-t-il, suite à l’ouverture en 2015 de nouvelles écoles, principalement dans des wilayas du sud du pays : des diplômés du Sud, fraîchement sortis de l’ENS de Béchar, se retrouvent ainsi «concurrents» pour les mêmes postes, dans des wilayas qui en sont déjà suffisamment pourvues.

«C’est une décision irréfléchie prise sans concertation et sans étudier les spécificités locales. Les écoles régionales, comme celle de Béchar, reçoivent les étudiants des villes d’Adrar, Béchar, Tindouf, El Bayadh, Naâma. A la fin de leur cursus, ils sont candidats pour un nombre de postes réduits. A Adrar, dix enseignants stagiaires ne peuvent pas être recrutés pour un nombre réduit de postes.

Par ailleurs, il y a eu l’abaissement de la moyenne d’accès aux ENS, d’où une certaine massification de l’offre», souligne un nouveau diplômé du Sud. Les futurs enseignants dénoncent la «sourde oreille de la tutelle, le ministère de l’Enseignement n’acceptant jamais de recevoir les protestataires».

«M. Oudjaout ne reçoit personne. Son directeur des ressources humaines a signalé à nos représentants qu’il ne peut pas s’asseoir à la table des négociations avec des camarades dépourvus d’une quelconque qualité syndicale. Il n’y a pas de volonté de prise en charge de nos revendications», s’insurge un des représentants des nouveaux diplômés des ENS, sous le sceau de l’anonymat.

Agacés par cette situation, les protestataires soulignent que les pouvoirs publics, qui font face à la situation liée à la crise sanitaire, peuvent ouvrir de nouveaux postes budgétaires. «Nos camarades sont à bout. La mobilisation faiblit à cause du mépris de la tutelle. Des gens préfèrent aller dans des wilayas éloignées pour les postes, même sans perspective», met en avant le représentant. D’autres actions de protestation seront engagées pour «amener la tutelle à reconsidérer sa position», conclut le représentant.