Le champ d’exploitation de pétrole d’El Merk à l’arrêt

Une inquiétante série d’incidents au niveau des installations de Sonatrach

N. B., El Watan, 25 octobre 2020

Que se passe-t-il donc à Sonatrach ? La série noire des incidents se poursuit alors que la compagnie affiche un manque à gagner de 10 milliards de dollars à cause de la pandémie de coronavirus, assorti d’une baisse de 41% de son chiffre d’affaires à l’exportation.

Le niveau de la production étant déjà très faible par rapport à la demande à la fois nationale et extérieure, voilà qu’un nouvel incident vient encore frapper la machine de production et affaiblir davantage les capacités de la compagnie à répondre à l’urgence de l’heure de faire preuve de plus d’efficacité.

Le deuxième plus grand gisement d’hydrocarbures après celui de Hassi Messaoud est désormais à l’arrêt après le constat, mercredi soir, d’un incendie au niveau du four du 2e train du centre de traitement du champ d’El Merk, relevant du groupement Berkine.

Le champs d’El Merk est, rappelons le, constitué de deux trains de traitement de brut et de condensat d’une capacité de 63 500 barils par jour, d’un train de traitement de GPL de 30 000 barils par jour, avec une capacité totale de stockage de brut estimée à 320 000 barils (50 000 m3), et de stockage de condensat de l’ordre de 24 000 m3.

L’annonce de l’arrêt de la production a été faite hier par le ministre de l’Energie, Abdelmadjid Attar, en déplacement sur les lieux de l’incident dont les causes demeurent inconnues. «J’attache une grande importance à la question de la sécurité des installations.

Il ne faut pas non plus se précipiter pour reprendre la production», exige A. Attar en notant que l’arrêt de la production au niveau de ce site sera compensé par d’autres champs d’exploitation. Le ministre de l’Energie, qui a instruit les dirigeants de la compagnie Sonatrach à évaluer l’état du four et de ne pas procéder à son redémarrage jusqu’à sa réparation totale, a également souligné que s’il était nécessaire, ce four sera complètement remplacé.

L’incendie a, pour rappel, été signalé mercredi soir à 20h17 par un opérateur qui avait constaté une fumée dégagée par le four du train 2 et suivie de jet de flammes. Le même opérateur a déclenché l’alerte et l’arrêt d’urgence du champ a été effectué. L’incendie n’a pu être complètement maîtrisé qu’à 4h après l’intervention du protocole d’assistance mutuelle de HGNS et d’Ourhoud.

Dès aujourd’hui, une équipe d’investigation multidisciplinaire, composée d’experts en exploitation, maintenance et instrumentation, s’attellera à la détermination des failles ou des raisons qui ont provoqué l’incendie. Il est heureux que cet incident n’ait pas causé de pertes humaines ou de blessures parmi les équipes de travailleurs.

Abdelmadjid Attar a insisté dans son intervention sur le rôle de la formation dans la maîtrise des risques industriels et la préservation des installations pétrolières ainsi que sur l’amélioration du système d’alerte du groupe Sonatrach. Insinuant ainsi l’existence de failles dans le système d’alerte au niveau des installations de la compagnie.

Il est utile de rappeler que l’incident au niveau du champ d’El Merk – exploité en partenariat par Sonatrach, Anadarko, Total et ENI – est le troisième enregistré par Sonatrach en l’espace de quelques semaines d’intervalle. Il intervient quelques jours après les fuites de pétrole survenues sur l’oléoduc situé dans la commune de Ghamra, à 20 km de la ville de Touggourt.

L’incident s’était déclenché à la mi-octobre au niveau du PK143 de l’oléoduc OB1 reliant Haoudh El Hamra à Béjaïa et dont les premiers examens ont déterminé l’existence de corrosion d’un des plus vieux pipelines construits en Algérie depuis les années 1950.

En septembre dernier, deux autres fuites ont été constatées au niveau de l’oléoduc OK1 reliant toujours le bassin d’El Hamra (à Hassi Messaoud) à Skikda. Une première fuite avait été enregistrée à la sortie de la station de pompage SP2 à Djamaa, située dans la commune d’El Oued, au point kilométrique 190-200.

Et la seconde fuite a, quant à elle, été constatée au niveau du point PK263 situé dans la région d’El Baadj, à El M’Ghair. D’importantes quantités de pétrole se sont déversées et ont nécessité de grandes opérations de pompage pour nettoyer les terrains alentours.

Que cachent tous ces «accidents» successifs qui renseignent assurément – en attendant le résultat des enquêtes devant en déterminer les causes – sur l’inquiétante vétusté de certaines installations de la première compagnie du pays ?