Il a englouti plus d’un milliard de dollars : Le complexe Sider El Hadjar à l’arrêt
Mohamed Fawzi Gaidi, El Watan, 07 septembre 2019
L’avenir du complexe El Hadjar est menacé. L’usine est quasiment à l’arrêt depuis plusieurs jours et le haut fourneau (HF) n°2 ne produit plus. Une grande partie du staff dirigeant est en congé, les 4500 sidérurgistes sont inquiets et une ambiance pesante règne au sein de l’entreprise.
Tel est le désolant état des lieux qui prévaut actuellement à Sider El Hadjar. Djemaï Réda, le secrétaire général du syndicat, lance l’alerte rouge en appelant les autorités concernées à intervenir, car, pour lui, la situation est catastrophique et risque de dégénérer pour devenir incontrôlable. «Le danger d’une totale paralysie de l’usine n’est plus menaçant ou imminent, il est présent, dépassant même les lignes rouges. La catastrophe est désormais annoncée», a alerté, jeudi, le représentant des travailleurs dans un communiqué rendu public. Officiellement, on justifie cet énième arrêt de l’usine par le manque de minerai qui provient des mines de Ouenza (Tébessa).
Bien qu’elle soit réelle, cette justification ne semble pas être convaincante, du moins pour le syndicat de l’entreprise de Sider El Hadjar. En effet, le partenaire social dirige un doigt accusateur vers le staff dirigeant, l’accusant d’être derrière ces arrêts «programmés». «Nous informons nos travailleurs que le syndicat de l’entreprise est au fait de toutes les manigances et les véritables raisons ayant entraîné les arrêts répétitifs des unités de production.
Mais dans le seul souci de la stabilité de l’entreprise, nous avons tenté avec la collaboration des cadres dirigeants de redresser la barre. En vain…». Cette alerte intervient alors que pas moins de 37 responsables et cadres dirigeants en activité au complexe sidérurgique – Sider El Hadjar – de Annaba ont été auditionnés par la brigade de recherche et d’investigation, relevant du groupement de la Gendarmerie nationale de Annaba.
Ils sont cités, chacun en ce qui le concerne, dans des enquêtes, enclenchées depuis octobre 2018, dont l’impact a secoué les arcanes du complexe tant que les dossiers ont trait à l’atteinte à l’économie nationale où la lutte contre ce phénomène bat, actuellement, son plein. Se démarquant de cette situation, le syndicat a soutenu officiellement l’action judiciaire. «Nous avons organisé dernièrement un rassemblement des travailleurs au cours duquel nous avons clairement soutenu, loin de toutes les considérations, les efforts consentis par la justice algérienne ayant trait à la lutte contre la corruption, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’usine», a déclaré à El Watan le même secrétaire général du syndicat de Sider El Hadjar. Au niveau du complexe, la situation empire et tous les indicateurs sont au rouge.
Elle intervient au moment où le secteur commercial de l’entreprise connaît une très faible affluence des clients. La déliquescence qui y prévaut a entraîné, en juillet dernier, 21 accidents de travail, dont 17 avec arrêt. Selon le magazine info de Sider El Hadjar, ces accidents ont fait perdre à l’entreprise 165 jours. «Le taux de fréquence réalisé est de 13,75 pour un objectif de 5,67 et un taux de gravité de 0,16 pour un objectif de 0,08», lit-on dans ce document.
Ainsi, les jours du complexe Sider El Hadjar seraient comptés, sachant que le complexe sidérurgique Bellara (Jijel) entrera en production en novembre prochain, tel que l’a confirmé il y a une semaine la ministre de l’Industrie et des Mines, Djamila Tamazirt, lors de sa rencontre avec l’ambassadeur du Qatar. Elle s’est félicitée de l’avancement des travaux de ce complexe qui atteint «un taux d’exécution de 97% et dont l’inauguration officielle et l’entrée totale en service sont prévue pour fin novembre 2019».
En l’absence de réactions sérieuses du groupe Sider, la ministre doit agir rapidement pour sauver Sider El Hadjar des mains de son staff dirigeant qui, pour des raisons inavouées, le prend en otage, au grand dam de 4500 sidérurgistes.