Conflit du Sahara Occidental: Comment Bruxelles saborde les efforts de paix de l’ONU

A. Z., El Watan, 28 juin 2018

La Commission européenne a présenté au Conseil deux propositions visant à étendre la couverture de l’accord d’association UE-Maroc au Sahara occidental, que Rabat occupe illégalement depuis plus de 40 ans.

Le Front Polisario a rejeté catégoriquement les propositions de la Commission européenne visant à étendre l’accord d’association UE-Maroc au Sahara occidental, a déclaré lundi son représentant auprès de l’Union européenne (UE), Mohamed Sidati. Dans une lettre signée par 89 organisations et associations sahraouies et étrangères, le Front Polisario a fait part «en tant que représentant légitime du peuple sahraoui (…) de son rejet catégorique des propositions de la Commission européenne visant à étendre la couverture de l’accord d’association UE-Maroc au Sahara occidental, que le Maroc occupe illégalement depuis plus de quarante ans maintenant». «Le Polisario n’a jamais été consulté par la Commission dans ce processus.

Toute déclaration contraire est fausse», peut-on lire dans cette lettre reprise par l’APS. En outre, soutient-on dans cette missive, le processus de consultation élargie mené par la Commission concernait uniquement des acteurs directement liés au gouvernement marocain.

Et d’ajouter que «cette approche était en contradiction flagrante avec la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui établissait clairement la nécessité du consentement du peuple sahraoui dans le processus». «Cela n’a pas été réalisé et a été communiqué à la Commission par un grand nombre d’organisations de la société civile sahraouie. Malgré de multiples tentatives visant à saper le statut juridique du Front Polisario, la CJUE a été claire : ‘‘le Sahara occidental jouit d’un statut séparé et distinct du Maroc’’», rappelle-t-on.

Le jeu malsain de l’UE

Le Front Polisario craint aussi que l’approche actuelle de la Commission entraînera «de nouveaux litiges et ne sera certainement pas dans le meilleur intérêt de l’UE. Il n’y a pas moyen de contourner cela». Le représentant légitime du peuple sahraoui dit préférer «éviter de prendre d’autres mesures longues devant les tribunaux et encourager les efforts à se concentrer sur ce qui compte vraiment : la réussite du processus politique — dirigé par l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU, Horst Köhler — pour une solution durable au conflit du Sahara occidental».

A ce titre, «l’UE a un rôle clé à jouer pour soutenir le processus politique. Mais son comportement à l’égard des accords commerciaux entre l’UE et le Maroc le met en péril», avertit le Front Polisario, contrebalançant les affirmations de la Commission, selon lesquelles «les amendements auraient un impact limité sur le processus politique». En tant que partie à ce processus, «ce sera dommageable», assure-t-on. Dans un moment aussi critique, dit-on, «l’UE devrait arrêter de signer tout accord commercial avec le Maroc qui inclut le Sahara occidental».

Au lieu de cela, préconise-t-on, «l’UE devrait utiliser tous les moyens crédibles pour encourager le Maroc à revenir à la table des négociations et non pour lui présenter des incitations à neutraliser les pourparlers de paix». Les amendements commerciaux proposés par l’UE, martèle le Front Polisario, «vont non seulement à l’encontre du droit international, récompensent également le Maroc pour son occupation, mais manquent une opportunité stratégique».

«L’UE devrait encourager les progrès dans le processus politique en développant un paquet commercial global qui profite aux deux parties du processus de négociation politique, un dividende pour la paix», suggèrent les Sahraouis. Par ailleurs, le Front Polisario réitère son intention de s’engager «de manière constructive avec l’UE sur un dialogue global répondant aux besoins du peuple sahraoui et respectant notre droit à l’autodétermination. La perspective d’un accord de paix mutuellement convenu offre l’opportunité d’une conclusion juste et rapide d’un accord commercial qui profitera à toutes les parties».