LInternational Crisis Group se penche sur lAlgérie
Mohamed Mehdi, La Quotidien d’Oran, 15 juillet 2001
Sous le titre: « La Concorde civile : une initiative de paix manquée », le récent rapport de lInternational Crisis Group (ICG), paru le 9 juillet 2001, propose en une trentaine de pages son analyse sur la crise algérienne depuis larrêt du processus électoral en 1992 à nos jours.
« La guerre civile entre larmée algérienne et la guérilla islamiste, déclenchée par le refus des militaires de reconnaître la victoire électorale du Front Islamique du Salut (FIS) en 1991, nest pas finie », affirme en introduction le rapport qui constate léchec de la loi sur la Concorde civile à ramener la paix civile. LICG estime, quaprès deux années, Bouteflika na pas tenu ses promesses « faites durant la campagne électorale des présidentielles de 1999 », et que sa position « se fragilise face à une armée soucieuse de ne pas le laisser prendre trop de liberté daction ».
Les « dirigeants militaires » nont, selon lICG, que deux options : « maintenir indéfiniment la logique de guerre jusquà la victoire totale contre le GIA et le GSPC », ou « entreprendre une réhabilitation contrôlée des islamistes de lex-FIS à travers la légalisation du Parti Wafa ».
En retournant sur la crise au sommet de lété 1998, le rapport affirme que « le haut commandement militaire (avait organisé) immédiatement en coulisses une campagne médiatique sans précédent contre lentourage de Liamine Zéroual afin de mettre en scène son échec et de faire croire quun changement à la tête de lEtat est nécessaire ».
« Lintérêt de larmée est de rester dans une logique de guerre » affirme lICG, expliquant, « du point de vue de larmée », ce « refus dune réelle démocratisation du système » par « limmaturité de la classe politique algérienne », et propose la création dun Parti « représentatif des intérêts de larmée » pour lui donner des « garanties politiques ».
« Le profit de la guerre civile pour un petit cercle du pouvoir militaire est réel et la lutte contre les islamistes est un paravent nécessaire aux détournements des fonds publics et laccaparement de nouvelles ressources » écrit lICG. Il considère que des « sanctions économiques » contre lAlgérie, « entraînerait la société algérienne dans une paupérisation dont leffet immédiat serait vraisemblablement un regain de violence ».
Mais réclame, par contre, quune « pression sur le régime soit effectuée de manière conjointe par le Gouvernement américain et par les institutions européennes » en vue de lencourager à « libéraliser lactivité politique », « améliorer la situation des droits de lHomme ainsi que de légaliser le Parti Wafa », « libérer Abassi Madani et Ali Benhadj et leur demander de lancer un appel national à un cessez-le-feu à tous les Islamistes armés qui nont pas encore déposé les armes », et à « sengager à entamer un dialogue national public et transparent qui établirait un agenda électoral pour la tenue de nouvelles élections communales, législatives et présidentielles ». Sans pour autant que de tels encouragements ne soient liés « aux négociations sur une coopération diplomatique et sécuritaire dans les dossiers du Sahara occidental et du processus de paix au Proche-Orient ».
Allusion aux plaintes déposées contre le général Nezzar, lICG préconise que les Etats membres des Nations-Unies encouragent leurs juridictions nationales « à étendre leur compétence universelle pour juger des violations graves de droits de lHomme commises en Algérie et à accélérer les procédures de plaintes déjà déposées ».
Rappelons que lInternational Crisis group est une « organisation internationale privée dont lobjectif est daméliorer la réponse internationale aux crises politiques et humanitaires ». Parmi les 55 membres de son Conseil dadministration figurent : Martti Ahtisaari (Ancien Président de Finlande), Stephen Solarz (Ancien Membre du Congrès américain), Richard Allen (Ancien Chef du Conseil National de Sécurité américain et Conseiller national à la sécurité), Louise Arbour (Juge à la Cour Suprême du Canada, ancien Procureur en chef du TPI pour lex-Yougoslavie), Wesley Clark (Ancien Commandant suprême des forces alliées de lOTAN, Europe), Jacques Delors (Ancien Président de la Commission Européenne), Matthew McHugh (Conseiller auprès du Président, Banque Mondiale), Mohamed Sahnoun (Conseiller spécial auprès du Secrétaire Général des Nations Unies), Simone Veil (Ancien Ministre de la Santé, France).
Mohamed Mehdi