Prison pour les agresseurs d’un Algérien victime d’une chasse à l’homme

Prison pour les agresseurs d’un Algérien victime d’une chasse à l’homme

COTTBUS (Allemagne), 13 nov (AFP) – Les onze jeunes skinheads allemands auteurs d’une chasse à l’homme qui avait entraîné la mort d’un demandeur d’asile algérien en février 1999 ont été condamnés lundi à Cottbus (est) à des peines allant jusqu’à trois ans de prison.

Crânes fraîchement rasés, rangers à lacets blancs, les accusés ont accueilli le verdict sans ciller. Les trois meneurs de la chasse à l’homme, âgés de 17 à 20 ans lors des faits, ont été condamnés à des peines allant de deux à trois ans de prison, tandis que les autres ont eu des peines avec sursis ou des avertissements assortis de travaux d’utilité collective.

Le Parquet avait réclamé des peines allant jusqu’à trois ans et demi de prison. La Cour a estimé qu’aucun des accusés n’avait voulu sciemment la mort de la victime mais l’avaient causée par négligence.

Le 13 février 1999, l’Algérien, Omar Ben Noui, pris en chasse par les accusés, s’était tranché une artère en sautant à travers la porte vitrée d’un immeuble de la ville de Guben (est), à la frontière polonaise. Il s’était vidé de son sang en quelques minutes.

Poursuivi pour des raisons politiques en Algérie, Ben Noui avait demandé l’asile sous un faux nom en Allemagne, Farid Guendoul.

La défense lui a reproché d’avoir, en tant que demandeur d’asile, « profité de prestations sociales ». Guendoul rêvait de faire des études d’aéronautique.

La plaque posée en sa mémoire a déjà été profanée à six reprises. Ses frères, Malik et Kamel, étaient venus spécialement d’Algérie pour assister au verdict. Ils sont ensuite sortis de la salle sans un mot.

Un autre Algérien, Khaled Bensaha, et un Sierra-Léonais, Issaka Kaba, avaient également été blessés, après avoir été pris en chasse par les skinheads rendus furieux par un incident survenu dans une discothèque où l’un de leurs camarades avait été blessé d’un coup de couteau, vraisemblablement par un étranger. Ceux-ci scandaient « étrangers dehors – hôpital » en poursuivant leurs victimes.

Agé de 27 ans au moment des faits, Bensaha, titulaire d’une maîtrise en chimie, souffre encore d’un traumatisme, qu’il compte faire soigner en Allemagne. Après plusieurs mois de querelles juridiques, Bensaha devrait bientôt recevoir un permis de séjour à cette fin, a précisé son avocat.

La troisième victime des skinheads, Kaba, actuellement âgé de 18 ans, avait dû endurer fin 1999 une nouvelle attaque raciste. A Potsdam (est), deux néo-nazis l’avaient frappé et insulté dans un tramway. Il avait toutefois reçu presque immédiatement de l’aide.

Persécuté pour raisons politiques dans son pays, où ses parents sont décédés pendant la guerre civile, Kaba travaille dans la restauration à Potsdam.

Selon le tribunal, les skinheads pratiquent entre eux une violence quasi-quotidienne, les meneurs incitant les autres à torturer les plus jeunes d’entre eux. Ils enferment ainsi des adolescents dans des bouches d’égoût et leur urinent dessus chacun leur tour. Ils prennent également plaisir à lier pied et poings des plus faibles pendant toute la nuit, mettant le feu à leurs poils.

La longueur du procès de Cottbus — 81 jours — avait suscité une vague de protestations. Le président du Bundestag, chambre basse du parlement allemand, Wolfgang Thierse, s’est emporté lundi contre cette durée qu’il juge excessive. « La justice doit entamer des procédures énergiques pour rendre des jugements plus rapidement », a-t-il déclaré à la radio.

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