Bouteflika se rend aujourdhui en Allemagne
Bouteflika se rend aujourdhui en Allemagne
Le partenariat et léquation sécuritaire
Ahmed Kaci, La Tribune, 2 avril 2001
Les visites queffectue le président Abdelaziz Bouteflika à partir daujourdhui en Allemagne et en Russie revêtiraient une importance particulière. Notamment en Allemagne, où cest la première fois, depuis lindépendance de lAlgérie, quun chef dEtat se rend dans ce pays. Lors de cette visite, Bouteflika aura à rencontrer le chancelier Gerhard Schröder, le président Johannes Rau et le ministre des Affaires étrangères Joschka Fisher. Pour rappel, lAllemagne a joué un rôle de premier ordre dans léquipement de lindustrie algérienne au cours de la période des fameuses «industries-industrialisantes». Les investissements allemands sont évalués à hauteur de 30 milliards de dollars.Cependant, ces relations privilégiées ont connu un net recul depuis 1992 avec léruption de la violence terroriste en Algérie. Lasile politique octroyé à un représentant de lex-FIS à létranger, Rabah Kebir, serait pour quelque chose dans le refroidissement des relations entre Berlin et Alger. Ce recul est manifeste quand on constate que les échanges commerciaux entre les deux pays sont de 1,136 milliard de dollars. En termes dinvestissements, la seule opération digne dêtre citée concerne le groupe allemand Henkel qui a investi 135 millions de dollars dans le secteur des détergents (voir article de Ghania Amriout). Les discussions entre Bouteflika et ses hôtes, qui se dérouleront sur fond de «qui tue qui ?» à lextérieur de lAlgérie, pourraient déborder sur la situation des droits de lHomme en Algérie et, en particulier, le sort des Algériens demandeurs dasile politique en Allemagne, évalués à quelque 8 000 personnes. Dautant que larrivée de Bouteflika à Berlin risque dêtre perturbée par les protestations de lassociation Pro Asyl qui a exigé des autorités allemandes dinterroger Bouteflika sur «le rôle de larmée dans les massacres en Algérie». Cette organisation estime, dautre part, que cest «une valorisation inutile» du pouvoir dAlger à un moment où de graves accusations sont portées contre lui. Pro Asyl exige enfin du gouvernement allemand de se prononcer clairement pour lenvoi dune commission denquête internationale en Algérie. Si jusquici lAllemagne sest gardée dinterférer dans le débat algérien, comme lattestent les déclarations de son ministre des Affaires étrangères Klaus Kinkel (SPD) au plus fort des massacres de décembre 1997 à janvier 1998 qui avait proposé laide de son pays pour venir à bout du terrorisme et lenvoi dune troïka européenne en Algérie, les choses risquent de se présenter différemment aujourdhui. En effet, les appels pour lenvoi dune commission denquête internationale en Algérie deviennent insistants depuis quelques semaines au point où il serait difficile pour lAllemagne de se singulariser par une position différente du reste des pays de lUnion européenne. Cette dernière vient, par la voix de son représentant, le Suédois Johan Molander, de demander devant la Commission des droits de lHomme de lONU lenvoi dun rapporteur spécial en Algérie. Toute la mission de Bouteflika à Berlin et à Moscou consisterait à convaincre les anciens partenaires de lAlgérie de la contribution quils pourront apporter à ses efforts pour extraire le pays de léquation sécuritaire présente et satteler aux tâches de développement à travers une coopération mutuellement bénéfique. Mais pour ce faire, il faudrait que Bouteflika arrive à convaincre ses vis-à-vis que cette équation pourrait trouver sa résolution dans la problématique de partenariat et dinvestissements massifs extérieurs.
A. K.