Testament de Hocine Aït Ahmed à la jeunesse algérienne
Leçons à tirer de sa vie et de sa mort
Testament de Hocine Aït Ahmed à la jeunesse algérienne
El Watan, 25 janvier 2016
C’est désormais une évidence : même mort, Hocine Aït Ahmed est rebelle, imprévisible, rassembleur. Ce qui n’arrange pas trop ses détracteurs, toujours indignes d’être ses adversaires politiques.
Son sens de l’honneur a fait de lui un humain qui a irrémédiablement vaincu la Faucheuse aux yeux du peuple algérien. Il a ainsi sans doute, d’une certaine manière, savouré son dernier exploit de s’offrir un dernier bain de foule réchauffant, car sincère, à travers d’historiques funérailles nationales et populaires.
Historique aussi était l’escorte populaire et spontanée du cortège funéraire au bord des routes et des ruelles, depuis le siège national du Front des forces socialiste (FFS), à Alger, jusqu’au fin fond de sa dernière demeure, aux côtés de sa mère biologique. Je précise biologique, car sa mère, sans aucun adjectif derrière, pour laquelle il a sacrifié l’essentiel de sa jeunesse et consacré 70 ans de sa vie, n’est autre que l’Algérie, notre Algérie à tous. Discrète est sa tombe, devant l’imposant mausolée de son aïeul, Cheik Mohand Oulhoucine.
Dans sa mort, comme dans sa vie, Aït Ahmed donne l’exemple d’un être exceptionnel qui refuse de s’auto-honorer, se «contentant» des majestueux honneurs que lui réserve le peuple. Il est décédé en grand homme et aussitôt renaît en symbole rassembleur pour le peuple algérien, particulièrement sa jeunesse. Nos vieillards, qui nous servent de responsables politiques et militaires, même si l’espoir est infime, devront s’en inspirer.
Il a refusé El Alia, non pas par mépris envers ses frères d’armes qui y étaient avant lui, mais par volonté de contourner toute récupération politicarde. C’est également un refus d’un protocole dépassé par le temps. Une sorte de système de pouvoir post-mortem arbitraire qui enferme les grands noms de femmes et d’hommes de ce pays entre sépultures en marbre afin de pouvoir mieux torturer leurs mémoires et en sortir tout le contraire des idéaux pour lesquels ils se sont battus de leur vivant.
En effet, en toute débilité décisionnelle, et ce n’est qu’un exemple, des jeunes algériens sont empêchés et arrêtés, le 29 juin de chaque année, pour le seul délit de vouloir se recueillir sur la tombe du président d’espoir, Mohamed Boudiaf.
UN PATRIMOINE À PRÉSERVER
Celle de Si L’Hocine sera, sans doute, la Mecque de tous les démocrates algériens et maghrébins, lui qui a cru énergiquement à l’unité du Grand Maghreb arabo-berbère depuis les années 1950. Ce sera certainement un haut lieu de rencontre entre des jeunes algériens, venus des quatre coins du pays, afin qu’ils méditent et échangent autour de l’idéal démocratique et unitaire qu’il a tracé pour l’Algérie avant et après l’indépendance.
D’ailleurs, l’un des faits très marquants de la cérémonie d’inhumation est la présence de milliers de jeunes. Surexcités par les youyous qui retentissaient du Djurdjura et la présence d’une si valeureuse dépouille, certains d’entre eux ont voulu carrément empêcher les officiers de la Protection civile de mettre la terre au-dessus de son cercueil.
Au-delà d’une certaine intention «égoïste» de se réserver cet honneur, cette baraka, la symbolique de l’enterrement est effectivement très forte. Le verbe enterrer est souvent utilisé dans le sens de «tuer» ou d’«oublier». Cependant, mes congénères doivent comprendre que nous n’avons enterré d’Aït Ahmed que la chair. Ses idées et ses idéaux survivront encore pour longtemps, très longtemps. Ses écrits, ses paroles et ses interventions filmées ne pourront jamais êtres enterrés.
En tout cas, pas avec notre génération, celle d’Internet et des réseaux sociaux numériques. Celui qui a tout lu d’Aït Ahmed et lu tout ce qu’on a pu écrire, à charge ou à décharge sur sa personne, décryptera aisément son testament, légué à notre génération et aux générations futures. Il voudrait que nous reprenions le flambeau, que nous assumions notre responsabilité historiques comme il l’a fait en son temps avec les Ben M’hidi, Ben Boulaïd, Abane et tous les autres ; que nous continuions le combat jusqu’à l’aboutissement du projet «Algérie», tel que dessiné par la proclamation du 1er Novembre 1954 et la plateforme du Congrès de la Soummam du 20 août 1956. C’est-à-dire une Algérie unie, plurielle, démocratique et sociale.
Ceux qui n’ont pas compris cette devise, et ils ne sont pas près de la comprendre car ils ne veulent pas la comprendre, ont repris les spéculations politiciennes et les polémiques stériles et sans fin dès le lendemain de sa mise sous terre contre la direction nationale du FFS et sa famille auxquelles on reprocha tout et son contraire.
Comme cela ne suffisait pas pour ébranler la communion nationale suscitée par la mort de notre «dernier historique», les «sauveurs» de la République, fidèles à leurs «principes», n’hésiteront pas à le traiter de menteur, tout en s’automutilant ! De là-haut, au lieu d’être consterné, il est certainement amusé par un spectacle affligeant qui le réconforte dans ses convictions et les choix qu’il a faits, particulièrement durant les années 1990.
Au-dessus de toutes ces bassesses, surtout depuis qu’il est au ciel, Si L’Hocine ne peut qu’être fier de ses descendances, biologique et politique. Les deux ont su se montrer dignes, matures et lucides. Les décisions à prendre ont été convenablement prises, à temps, le reste a été laissé à l’appréciation du peuple qui, par milliers de personnes, en a fait bon escient. Malgré l’arrogance d’une certaine élite qui ne le supporte pas, le peuple a toujours raison.
Et nous sommes, jeunes algériens, les représentants légitimes de ce peuple, juvénile dans sa majorité écrasante. Il nous appartient donc de se réapproprier l’héritage d’Aït Ahmed et des martyrs ; gloire à eux tous. Cet héritage va aux antipodes de tout ce qui a été défendu depuis l’indépendance par trois courants politiques qui s’autoproclament détenteurs de la «vérité absolue», une vérité exclusive, et donc excluante : les nationalistes «complexés», les islamistes «passéistes» et les identitaires «illusionnistes».
Depuis 1963, au sein du FFS, Dda L’Hocine a lutté contre ces trois entités claniques au profit d’une pensée patriotique, pluraliste, inclusive, moderniste et universaliste. En tant que jeunes Algériens (nationalistes, islamistes, socialistes, libéraux, apolitiques, etc.), nous devons cesser de donner du crédit à tous les discours de haine, cherchant une légitimité historique qui n’existe plus depuis 54 ans, voire qui n’a jamais existé.
Hocine Aït Ahmed, l’un des neuf historiques qui ont fondé le Front de libération nationale et déclenché la révolution de Novembre 1954, a lui-même rejeté toute idée de légitimité historique. Nous devons, en tant que jeunes rivés sur l’avenir, refuser de rentrer dans le jeu malsain et destructif des uns et des autres qui voudraient toujours diviser le peuple algérien en langues, en idéologies, en ethnies, en régions et en religion, avant des les monter les unes contre les autres par une propagande bien rodée. Face à tout cela, la pensée «aïtamedienne» est un remède naturel et efficace. A comprendre, sans formule compliquée aux effets secondaires parfois ravageurs.
UN VRAI HOMME CULTIVÉ
Pour une toute première illustration du débat futile, interminable entre «intellectuels» francophones et arabophones, l’artisan de Bandung s’est auto-éjecté. Lui, comme à ses habitudes, ne fait rien comme les autres. Il n’accepta jamais qu’il soit assigné à choisir un clan quelle que soit sa nature, au point d’être lui-même souvent un «clan», certes éclairé, mais un clan à part entière. Celui d’un grand intellectuel polyglotte et forcément universaliste.
Il savait très bien que les langues ne peuvent servir qu’à cumuler les savoirs et les connaissances, surtout quand elles sont toutes empruntées, des «butins de guerre». Nous devons donc se réapproprier pleinement les langues nationales, l’arabe et tamazight, et s’ouvrir sur les langues étrangères, le français, l’anglais et d’autres encore. Ce sont des armes d’avenir et de devenir pour notre nation. Ensuite, Si L’Hocine, par amour véridique à son pays et fidélité «pathologique» à l’histoire, ou plutôt aux histoires, de sa nation, il a de tout temps associé dans sa réflexion générosité et sagesse.
Ce sont là les qualités des vrais femmes et hommes cultivés ; ceux qui associent la question intellectuelle à la question spirituelle, tout en restant ouverts sur les pensées, les positions et les prises de décision des autres. Un homme de culture essaye de se mettre, ne serait-ce qu’une seconde, dans la peau d’autrui afin de comprendre – sans nécessairement le justifier – son mécanisme de réflexion. Il faut sortir de l’analyse simpliste qui est utilisée à tort et à travers par la majorité de la classe politique depuis l’indépendance et par certains «intellectuels». Elle consiste à personnifier le débat et à avoir recours à la formule «apostasiante» de la trahison.
Aït Ahmed lui-même a fait les frais de ce procédé plusieurs fois dans sa vie, en 1949, en 1963 et en 1995. Refusant de rentrer dans cette logique, l’un des éléments qui construiront sa grandeur d’homme avec le temps, il n’a jamais accusé quiconque de trahison, même pas ses anciens bourreaux.
Au contraire ! Pour ne citer que cet exemple, il est l’un des premiers hommes politiques à avoir réhabilité Messali Hadj après l’indépendance. Mieux encore, Si El Madjid, de son nom de guerre, n’a jamais établi une quelconque hiérarchisation ou nié le rôle révolutionnaire de ses adversaires, y compris Ben Bella, Boumediene et Bouteflika plus tard. Il n’a pas, non plus, opposé et jugé les positions des uns et des autres, comme chez certains qui s’amusent – par ignorance et inconscience – à opposer le nom de Krim à celui d’Abane, celui de Ben Khedda à celui d’Abbas, ou encore celui d’Oulhadj à celui d’Aït Ahmed.
Ce dernier était convaincu, à raison, que chaque acteur du mouvement national indépendantiste et de la vie politique depuis l’indépendance, y compris durant les périodes les plus sombres de notre histoire, a pris les décisions et soutenu les actions qu’il considérait «justes» en son âme et conscience.
LA RÉPARTITION DU PAYS, SON CAUCHEMAR
Nous, jeunes Algériens, libérons-nous donc des conflits du passé qui mettent en péril notre avenir et celui de notre patrie. Si
L’Hocine avait comme seul cauchemar, durant toute sa longue carrière militante, la répartition de l’Algérie. Ce ne sont pas, d’ailleurs, quelques aventuriers identitaires extrémistes, essayant de récupérer sa mémoire à travers des happenings vulgaires et des déclarations mensongères, qui vont pervertir sa conviction patriotique indiscutable en faveur de l’unité nationale.
Ce ne sont que les enfants spirituels de ceux qui reprochaient au Zaïm de ne pas avoir sollicité le soutien du Makhzen et du général Franco en 1963 ! Ce sont les mêmes personnes qui le traitaient d’«arabo-islamiste», et ce n’est pas un complément dans leurs bouches, juste parce qu’il n’avait aucun complexe avec la langue et la religion majoritaires de son peuple.
En même temps, il luttait – avec l’acharnement qu’on lui connaît – contre ceux qui le traitaient de «berbériste», et ce n’est pas un compliment dans leurs bouches, juste parce qu’il n’avait aucun complexe avec son histoire millénaire amazighe. Cette histoire, avec un grand H, est celle que partagent tous les Algériens, dignes et fiers, avec tous leurs frères d’Afrique du Nord.
Anticipant ces reproches, Si L’Hocine, pour qui rien n’est fortuit, a donné les prénoms de Jugurtha et Salah Eddine à ses deux fils. Le premier, du nom du roi numide qui mena une guerre anticolonialiste contre Rome durant presque une décennie.
Le deuxième, du nom de Saladin, le reconquérant musulman de la Palestine où il a installé un réel système de vivre-ensemble entre les croyants des trois religions monothéistes et fait de la tolérance un mode de gouvernance. La question identitaire de notre société a été tranchée depuis longtemps par la loi suprême du pays : nous sommes arabes et berbères, les deux en même temps, non pas l’un sans l’autre, et encore moins l’un contre l’autre. Dans notre pays, l’Islam est la religion d’Etat mais subsistent des minorités religieuses à respecter.
En somme, en 2016, un jeune algérien ne doit pas se préoccuper de tels sujets. Il se doit d’être tout simplement un Algérien, sans aucun complexe d’infériorité ni de supériorité, sans aucun sentiment d’exclusion ni de haine. C’est cela qui renforcera l’unité nationale. Le legs de Dda L’Hocine, dans ce sillage, voudrait surtout que nous rétablissions le débat politique, avec une touche jeune, apaisée, honnête et instruite. Tout le contraire de ce qui se fait actuellement.
Si nous voulons sauver notre pays des griffes des prêcheurs de la haine, de la «fitna», de tous bords politiques, nous devrons nous engager civiquement et réinvestir le terrain politique afin de leur faire barrage, mais aussi pour s’opposer aux corrompus qui nous gouvernent. Nous devons casser le mécanisme machiavélique du pouvoir, des hommes du pouvoir et de leurs enfants. Ils font tout pour accentuer notre peur et notre dégoût du politique et de l’action politique afin qu’ils y règnent en maîtres sans partage. Jusqu’ici, ils l’ont réussi parfaitement bien.
Après le Big Brother algérien, incarné par la Sécurité militaire à laquelle a succédé le DRS, on nous fomente un nouveau seigneur de l’Algérie, le frère de… La peur doit enfin changer de camp. Il n’y a de pouvoir qui fait réellement peur que celui du peuple, et nous sommes le peuple. Notre engagement leur fera assurément peur.
Et s’engager ne veut pas dire forcément s’encarter dans un parti. On peut aussi rejoindre les syndicats estudiantins, les syndicats autonomes, les sections locales de l’UGTA, adhérer à des associations et en créer d’autres dans tous les secteurs possibles, investir les quartiers et les réseaux sociaux par toutes sortes d’initiatives citoyennes (sociales, culturelles, etc.). C’est comme cela qu’on assumera notre responsabilité historique. Il faut imposer notre propre agenda politique et nos choix d’avenir, comme l’ont fait Aït Ahmed et ses camarades à partir des années 1940 alors qu’ils n’avaient qu’une vingtaine d’années en moyenne, contre le gré des vieux politicards du mouvement national.
CONTRIBUER à LA SAUVEGARDE DE L’ALGÉRIE
Nous, jeunes Algériens, comment pouvons-nous exploiter l’héritage du moudjahid Aït Ahmed pour contribuer à la sauvegarde de l’Algérie ? L’urgence est d’imposer une vraie réconciliation nationale – encore une idée «éternelle» de Si L’Hocine, récemment relancée par la proposition du FFS pour un Consensus national – qui pourrait permettre à notre pays de sortir de la crise multidimensionnelle qui menace sa cohésion sociale et son unité territoriale.
Contrairement aux thèses fanfaronnes alléguant un deal entre le FFS et le pouvoir – certains qui n’ont de journalistes que le nom ont affirmé même, sans aucun scrupule, que feu Aït Ahmed avait lui-même rencontré secrètement le président Bouteflika –, le projet de Consensus national apparaît aujourd’hui comme la seule proposition sérieuse et intelligente de sortie de crise.
C’est une copie remise à jour de plusieurs propositions et d’occasions ratées pour l’Algérie depuis l’indépendance. Il n’y a que le contexte et le nom qui changent, le fond, lui, reste le même : l’accord FFS-FLN en 1965, la Rencontre de Londres en 1985, la Plateforme de Rome (Saint-Egidio) en 1995 et l’Initiative des trois en 2007.
Sans prétendre à l’objectivité qui ne peut être que l’addition de nos subjectivités à tous et sans aucun esprit partisan, nous, jeunes algériens, quelles que soient nos couleurs politiques et nos convictions idéologiques, devons crier haut et fort que nous voulons une sortie de crise pacifique, peu importe le nom qu’on peut lui attribuer. Il est urgent de se réunir autour d’une même table sans aucune exclusion possible, ni envers les islamistes ni envers les hommes du pouvoir politico-militaire dans l’unique objectif est de se mettre d’accord sur l’essentiel.
C’est-à-dire la sauvegarde de l’Algérie. Il faut aller vers une transition réfléchie et négociée. C’est désormais une question vitale pour notre pays. Il faut réussir le pari d’enclencher un long processus de démocratisation purement algérien qui ne sera importé de nulle part. Un processus de démocratisation adapté aux spécificités nationales, historiques, économiques et culturelles.
Cela peut passer, à titre d’exemple, par un mandat transitionnel après la fin de celui du président actuel ; sans tomber dans des conflits de non-sens comme la remise en cause de la constitutionnalité de la présidence de la République et d’autres institutions de l’Etat algérien ; ou la revendication d’une élection présidentielle anticipée qui, de toute façon, ne va rien changer à notre réalité vu le contexte actuel et la configuration de la classe politique nationale.
A la tête de l’Etat, on pourrait élire une personnalité nationale, choisie par consensus, capable de constituer un gouvernement d’union nationale de «salut public». Néanmoins, notre contribution, en tant que jeunes algériens, à ce genre de solutions, certes idéalistes, peut-être même utopiques, n’est certainement pas de gaspiller notre énergie dans des questions organiques. Nous, jeunes algériens établis en Algérie ou qui se forment à l’étranger, devons être une force de propositions. C’est à nous et non pas à nos patriarches septuagénaires de moderniser notre pays à travers des idées novatrices qui permettent de lancer des réformes profondes de l’école, de l’université, de la culture, de la justice et de l’économie.
Des solutions alternatives existent aussi sur le plan de la gestion décentralisée, légitimement revendiquée par certaines régions d’Algérie, sans tomber dans les folies du racisme, du régionalisme ou du séparatisme. Il «suffirait», et cela reste une idée primaire, d’instaurer un fédéralisme à l’algérienne, encore une idée de Hocine Aït Ahmed depuis la fin des années 1970. Ceci n’a même pas besoin d’une «révolution» constitutionnelle. Des exemples européens l’ont prouvé dans le passé, parfois très proche, en Allemagne, en Suisse, en Belgique et même en France, avec son système jacobin que nous avons copié pratiquement à tous les niveaux.
En l’espace de quelques mois, le gouvernement français a fait passer une loi de réforme territoriale, entrée en vigueur au début de cette année 2016, qui va dans ce sens. Chez nous, il est également possible de créer des grandes régions (fédérations), chacune d’elles constituée de plusieurs wilayas, et à sa tête un président et un conseil (un Parlement), élus par le suffrage universel.
Cela pourrait non seulement créer des grands pôles économiques régionaux, concurrentiels et compétitifs, mais surtout mettre un terme au procès de «régionalisme» et de «racisme» qu’on colle, à tort ou à raison, au gouvernement d’Alger, particulièrement par la Kabylie et quelques régions du Sud qui souffrent d’un manque terrible de projets de développement local.
Une réelle démocratie participative où le peuple dans sa diversité détient un réel pouvoir électoral et décisionnel sur ses gouvernants locaux – et non pas le contraire comme dans le système actuel de wilayas et de walis – est seule capable d’anéantir le sentiment d’exclusion qui hante une grande partie de nos concitoyens, désespérés par l’attitude trop régionaliste du gouvernement.
Ainsi, le peuple pourra avoir un pouvoir de sanction contre ses gouverneurs locaux quand il s’agit d’affaires locales. Une telle autonomie de gestion politique et budgétaire ne peut que renforcer le sentiment d’égalité sociale et d’appartenance à la même patrie chez toutes les Algériennes et les Algériens.
Pour nous, jeunes algériens – chômeurs, ouvriers, techniciens, étudiants, universitaires, cadres de l’Etat, soldats, officiers de l’armée, etc. –, tous fiers de leur appartenance algérienne, l’idéal «aïtahmedien» n’est pas mort avec lui. Il restera un repère à suivre une fois que nous nous déciderons à agir en ne privilégiant que l’intérêt national sur les intérêts personnels, idéologiques et régionaux.
Dans la paix et la sérénité de l’unité nationale, nous aurons le temps de réfléchir, de proposer et d’expérimenter des choses, ayant comme seul arbitre le peuple algérien, jusqu’à «atteindre un point de non-retour démocratique», selon le vœu Hocine Aït Ahmed.
Par : Samir Ghezlaoui
Doctorant en communication, journaliste et militant pour la démocratie