La chaîne Al-Manar cherche un soutien à Alger
EN MARGE DE LA REUNION DE L’ASBU
La chaîne Al-Manar cherche un soutien à Alger
Le Quotidien d’Oran, 20 décembre 2004
Au moment où l’affaire d’Al-Manar faisait les titres de la presse occidentale et arabe, le directeur général de la chaîne libanaise, proche du mouvement chiite du Hizbollah, était à Alger pour participer à la 24ème assemblée générale de l’ASBU.
En effet, le DG d’Al-Manar TV, Mohammed Haïder, qui n’était pas attendu à cette rencontre, était très sollicité et même disponible pour la presse algérienne, qui trouvait là un sujet captivant pour dépeindre une réunion des télévisions et radios arabes, dont les rencontres sont à huis clos.
Ainsi, et concernant la décision d’inscrire la chaîne libanaise sur la liste des organisations terroristes et d’interdire sa diffusion sur le satellite Eutelsat et sur le territoire américain, le responsable de la chaîne libanaise a déclaré: «La décision des Américains de mettre une télévision indépendante sur une même liste que des groupes terroristes est un précédent grave dans le monde audiovisuel. Malgré l’arrêt de sa diffusion en Amérique, la chaîne reste encore captée dans le monde arabe à travers le satellite Arab Sat et Nil Sat». Il ajoute encore: «Je ne suis pas étonné que les Américains soutiennent la position israélienne. Ce qui m’étonne en revanche est que l’administration américaine nous qualifie et nous taxe de chaîne de télévision terroriste, tout cela parce que nous défendons dans nos sujets la cause palestinienne». Le responsable d’Al-Manar a déclaré qu’il n’en veut pas au CSA ni à la France, estimant que cette décision a été prise après les protestations d’Israël.
Interrogé sur les rapports de la chaîne avec le mouvement chiite libanais, le directeur général d’Al-Manar a indiqué qu’il y a des actionnaires qui sont membres ou sympathisants du mouvement Hizbollah, et que la loi sur l’information libanaise n’interdit pas que des partis politiques ou des mouvements participent au développement audiovisuel. «C’est pourquoi la ligne éditoriale de la chaîne reste proche du mouvement chiite libanais», affirme-t-il.
Invité à réagir sur cette affaire, le DG de l’ENTV, M. Hamraoui Habib Chawki, a déclaré qu’une télévision ne doit pas servir de tribune pour appeler à la guerre, précisant que celle-ci reste un espace de dialogue, d’information, de divertissement. Avant d’ajouter: «La chaîne Al-Manar a commis quelques erreurs. Mais par la suite, elle s’est rétractée et a adhéré au cahier de charges du CSA. Nous nous sommes opposés à toute tentative de suspension d’une télévision. Nous pensons qu’il doit y avoir quelque part un dialogue entre les responsables d’Al-Manar et le CSA».
Pour sa part, le représentant et président de l’Union européenne de radiodiffusion, le Français Jean Réveillon, a déclaré qu’Al-Manar a commis des erreurs qui ont heurté la sensibilité des téléspectateurs français, ce qui a conduit le CSA à prendre des mesures.
Il s’est montré en revanche confiant pour la suite de l’affaire, indiquant que la chaîne Al-Manar a montré sa disponibilité pour améliorer sa ligne éditoriale. Le comité exécutif de l’ASBU s’est réuni hier pour justement prendre des décisions dans cette affaire.
Salim Bey
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Mohamed Haydar, directeur général d’Al Manar, déclare :
«Les autorités françaises ont cédé aux pressions du lobby sioniste»
Par Lyes Malki, La Tribune, 20 décembre 2004
En marge des travaux de la 24e session de l’assemblée générale de l’ASBU, le président du conseil d’administration et directeur général de la chaîne de télévision libanaise Al Manar, Mohamed Haydar, a indiqué, au sujet de l’interdiction qui vient de frapper la chaîne en France et aux Etats-Unis, que cette décision entre dans le cadre d’une campagne israélienne organisée contre Al Manar pour l’empêcher de transmettre les faits de la lutte israélo-arabe et les crimes commis par Israël. «Les autorités françaises ont cédé aux pressions du lobby sioniste et se sont vues contraintes d’annuler le contrat qui nous lie au CSA», explique M. Haydar. Ce dernier affirme que «sur les 672 minutes des différents programmes diffusés, le CSA n’a retenu que 3 minutes seulement et les a présentées comme une preuve de l’antisémitisme dont on nous accuse». Quant à l’autre accusation portée contre Al Manar, à savoir l’apologie du terrorisme, le même responsable affirme qu’il s’agit d’«une lettre laissée par un martyr de l’Intifadha lue en direct sur la chaîne par un téléspectateur». M. Haydar, qui affirme n’avoir aucun lien organique avec le Hezbollah, précise cependant que «la chaîne compte parmi les associés des représentants de toutes les factions libanaises mais sa ligne politique est beaucoup plus proche du Hezbollah étant donné que ce dernier est le leader de la résistance contre l’occupation israélienne». S’agissant de la réaction du gouvernement libanais, le directeur général d’Al Manar souligne que le principe de «réciprocité devrait être appliqué dans ce genre d’affaire» et que l’ASBU, outre l’appel qu’il a lancé pour régler ce différend avec sagesse, «devrait prendre concrètement une position plus claire». Rappelons que l’interdiction d’émettre sur toute l’Union européenne qui frappe Al Manar porte sur un passage précis du journal en français, du 2 décembre, qui disait en substance qu’Israël s’efforçait d’empêcher Al Manar de «révéler aux téléspectateurs européens les crimes contre l’humanité perpétrés par Israël». Des propos susceptibles, selon le CSA «de constituer une incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de religion ou de nationalité».
L. M.