Polémique sur l’origine des incendies

Alors que la situation tend à être maîtrisée après un lourd bilan :

Polémique sur l’origine des incendies

par Mohamed Khellaf, Le Jeune Indépendant, 1 septembre 2007

Une polémique est née durant le week-end sur l’origine des incendies qui ont fait 8 morts et détruit 20 000 hectares de végétations, sans compter des milliers d’animaux. Tous les grands foyers d’incendie enregistrés depuis mercredi dernier ont été éteints, à l’exception de huit de moindre importance, a indiqué, hier, la direction générale de la Protection civile.

«Tous les feux sont éteints, à l’exception de huit foyers de moindre importance», a déclaré le lieutenant Yassine Bernaoui, précisant que ce bilan avait été effectué à 15h00. La tension est perceptible en Kabylie où la rumeur prête à des pyromanes l’origine des incendies.

Commentant certaines rumeurs accusant les éléments de l’ANP de passivité en Kabylie, le FFS alerte «la population sur les risques de surenchères aventuristes, comme la région en a connues ces dernières années. La région ne doit pas servir, une nouvelle fois, d’instrument de diversion ou de négociation», peut-on lire dans le communiqué de presse parvenu hier à la rédaction.

Interrogé sur l’origine des incendies, afin de savoir s’ils sont criminels, la direction générale des forêts (DGF) préfère ne pas se prononcer. Selon M. Djamel Mammeri, sous-directeur au niveau de la DGF, une enquête a été ouverte à ce sujet par les services de sécurité, mais les résultats ne sont pas encore connus.

«Franchement, je ne peux rien dire avant de connaître les résultats de l’enquête. Mais je pense qu’à l’origine de ces incendies se trouve la canicule qu’a connue le pays ces derniers jours. Je trouve que même si ces incendies étaient volontaires, les conditions climatiques les ont certainement aggravés.» Une accalmie se dessinait hier en Algérie à la faveur d’une légère chute des températures, mais les éléments de la Protection civile continuaient de combattre les derniers foyers d’incendie actifs et à surveiller tout nouveau départ de feu.

Selon le directeur de la communication de la Protection civile, Mohamed Amokrane Medjkane, il ne restait plus, en fin de matinée (hier, ndlr), que dix foyers actifs d’incendie, dont trois à Béjaïa. La radio nationale a fait état, quant à elle, de sept foyers qui subsistaient à Jijel et quatre à Skikda.

Le bilan provisoire de cet embrasement exceptionnel, établi hier par la Protection civile, est de huit morts. Six personnes, dont une femme et deux enfants, ont péri calcinées dans la wilaya de Tizi Ouzou. Deux adolescents d’une même famille, Nadir et Khaled, âgés de 11 et 16 ans, sont morts brûlés par les flammes près de Jijel aux abords d’un oued où ils se rendaient pour se baigner.

Selon la même source, 204 incendies ont affecté 23 wilayas du Nord durant les dernières 48 heures. Le brasier s’étendait, jeudi matin, de Sidi Bel Abbès à l’Ouest, à El-Tarf à l’Est, en passant par Aïn Defla, Blida, Tipaza, Alger, Béjaïa et Tizi Ouzou.

Selon un communiqué de presse de la Protection civile, le chef du gouvernement a tenu à suivre personnellement les informations opérationnelles fournies chaque heure. Les incendies, attisés par les vents chauds du Sahara, simoun et sirocco, ont été favorisés par la canicule et la sécheresse.

Malgré la mobilisation générale des agents de la Protection civile, soutenus par les éléments de l’ANP, de la direction générale des forêts et d’agents communaux, le feu a ravagé plus de 20 000 hectares de broussailles et détruit des milliers d’arbres : chênes-liège, chênes verts, cèdres, pins, ifs et merisiers.

Plus de 6 000 soldats du feu et des dizaines de véhicules spécialisés ont été dépêchés pour faire face aux brasiers. L’Algérie ne dispose pas de moyens aériens (Canadair) de lutte contre les incendies de forêts. La population a participé avec les moyens de bord aux opérations rendues pénibles par la configuration difficile du terrain et le mauvais état des pistes de montagne.

Plusieurs villages ont été évacués par mesure de précaution. Selon le bilan provisoire de la Protection civile, 29 maisons ont été brûlées à Jijel et 5 à Blida. Le massif de Chréa, qui surplombe Blida, semble le plus touché par ces incendies qualifiés d’«exceptionnels» par le directeur des forêts de Blida, Mohamed Seghir Noual.

Selon un bilan partiel pour ce seul massif, quelque 2 000 hectares d’arbres y ont été ravagés par le feu, le bilan le plus lourd depuis 1983, a-t-il précisé. D’épaisses volutes de fumée continuaient de s’échapper des flancs du massif forestier ravagé par le feu.

Des centaines d’arbres calcinés, des cadavres d’animaux sauvages, domestiques ou d’élevage, gisant dans la montagne témoignaient de l’ampleur de la catastrophe. «Il faut des années pour que la nature répare ce que le feu a détruit en quelques jours», se désolait Amar Bounous, un habitant.

Chréa abrite une cédraie, des chênes verts, des ifs et des merisiers, dont une partie a été, à jamais, engloutie dans la fournaise. M. K.