Aboud Hichem: « Jai des preuves »
Hicham Aboud à Liberté
Jai des preuves
Il demande au président de la République douvrir une enquête judiciaire sur les accusations contenues dans son livre La mafia des généraux.
Entretien réalisé par Saïd Rabia, Liberté, 27 février 2002
Liberté : Pourquoi ne citez-vous dans votre livre que 11 généraux ?
Hicham Aboud : Je veux faire la distinction entre les généraux honnêtes et intègres quils soient en activité ou à la retraite et les généraux mafieux et détenteurs de pouvoirs réels. Le but recherché cest de mettre un terme à lamalgame entretenu soigneusement par ces mêmes décideurs que je qualifie de mafia qui fait que larmée algérienne et ses forces saines sont toujours exposées à toutes les attaques. De tout temps, on a dénoncé le pouvoir et on a dénoncé les généraux de larmée algérienne dans de vagues généralités. Moi, je mets des noms et jidentifie ceux qui détiennent réellement le pouvoir.
Pouvez-vous être plus précis ?
Dans les premières pages de mon livre, je les accuse davoir commis lassassinat de Mohamed Boudiaf, du colonel Kasdi Merbah et être à lorigine de la création des premiers groupes des GIA. Je les accuse aussi davoir réduit un pays riche à la misère la plus noire, tandis quils amassaient des fortunes colossales. Je les accuse davoir tué l espoir de la jeunesse et contraint des milliers dintellectuels à choisir entre lexil et la mort. En un mot, je les accuse de haute trahison contre la patrie.
Détenez-vous les preuves de ce que vous avancez ?
Évidemment ! Je ne peux mavancer dans des accusations aussi graves avec des thèses farfelues. Si je navais pas de preuves je me serais tu. Je ne vais pas accuser des gens comme ça. Je nai aucun règlement de compte avec quiconque, et ces gens que je mets en cause, peuvent lattester. Ce qui me motive, cest lamour de lAlgérie. Un amour qui a été cultivé en moi par un père qui sest fait emprisonner, le 8 mai 1945, parce quil revendiquait lindépendance de lAlgérie ce jour-là, au moment où le père de Khaled Nezar jubilait pour la libération de la France. Cet amour a été cultivé en moi aussi par les Scouts musulmans algériens que je fréquentais depuis lâge de 7ans, et ce, jusquà 19 ans. Je nai pas fréquenté les écoles des troupes de larmée française.
Où en est le procès intenté par Larbi Belkheir contre vous ?
Larbi Belkheir ma appelé à deux reprises après la parution de mon entretien dans le Nouvel Observateur, tout comme le général Toufik par le biais dun de ses collaborateurs pour me demander gentiment de cesser de les attaquer. Le général Larbi Belkheir ma exprimé toute sa sympathie et sest même déclaré partager mon combat, et que son amitié pour moi et son affection restent indéfectibles ! Quant aux poursuites judiciaires, il dit les avoir entamées pour une question dhonneur. Je lui ai répondu que je suis pour une confrontation devant la justice avec lun des barons du régime algérien. Jai eu une convocation de la police française au mois de janvier 2002 et dans laquelle elle me demandait de les appeler par téléphone et non de me présenter. Jai eu une communication avec une femme du grade de commandant. Elle ma fait savoir que sur commission rogatoire, le juge dinstruction souhaitait avoir mon adresse en France. Comme je ny réside plus depuis fin décembre 2001, je lui ai communiqué alors ladresse du Nouvel Observateur, et à ce jour, il ny a aucune suite. Je tiens, en effet, à informer le général Larbi Belkheir que devant le juge dinstruction, je demanderai une confrontation directe, et en aucune manière, je ne me contenterai de la présence de son avocat. Je viens, dailleurs, de lui offrir une nouvelle occasion, à lui et à ses pairs, de me poursuivre en justice sils sont réellement innocents des graves accusations que je porte à leur encontre.
Êtes-vous prêt pour un procès en Algérie ?
Pour ma part, je saisis le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, en sa qualité de Premier magistrat, pour ordonner louverture dune information judiciaire sur les graves accusations contenues dans mon livre. Sur dédicace que jai apposée sur le livre que je lui ai envoyé, jai écrit en arabe : Au nom du sang des chouhada et au nom du défunt Houari Boumediene, je vous adjure dordonner une enquête judiciaire sur les accusations que je porte contre les hommes que jai cités dans mon livre. Cest ce que je lui ai également dit dans une lettre que je lui ai envoyée, vendredi dernier, par coursier à lambassade dAlgérie à Paris.
Seriez-vous prêt à rentrer en Algérie pour les besoins de lenquête ?
Évidemment ! Je ne demande quà rentrer pour éclairer la justice algérienne, à condition quils (les responsables cités dans son livre) soient en détention préventive, étant donné que je ne pourrai jamais faire confiance à ces mafieux sils sont toujours en liberté. Vu la gravité des accusations, la détention préventive simpose delle-même.