Un nouveau texte pour la privatisation
NOUREDDINE BOUKROUH
Un nouveau texte pour la privatisation
Par Djamel Amrouche, El Watan, 23 août 2001
M. Noureddine Boukrouh, ministre de la Participation et de la Coordination des réformes a présenté hier à lintention de la presse nationale les grandes lignes de lordonnance 01-04 du 20 août 2001, relative à lorganisation, la gestion et la privatisation des entreprises publiques.
M. Boukrouh entamera son exposé par un constat sur les réalisations des ordonnances 95-22 et 95-25 daoût et septembre 1995, relatives à la privatisation des entreprises et gestion des capitaux de lEtat : 1000 entreprises dissoutes, 400 000 travailleurs licenciés, 3 entreprises en Bourse et seulement 4 contrats de partenariat. Et zéro entreprise privatisée. M. Boukerouh sen remet aux lacunes constatées ici et là dans le dispositif législatif et organisationnel ayant entouré ces deux textes pour expliquer la situation de blocage qui caractérise ces réformes. Autant dintervenants, autant dobstacles, dira-t-il.Il nest pas étonnant que lon ne puisse même pas sauvegarder les capacités de production des entreprises publiques, développer le partenariat, malgré les offres émanant dinvestisseurs étrangers. Les mêmes blocages sont constatés chaque fois quil est question de procéder à louverture du capital dune entreprise, ou à sa privatisation. «Pourtant, dira encore M. Boukrouh, ce nest pas tant de privatiser les entreprises publiques que de leur offrir de meilleures conditions dévolution qui nous intéresse.» Il fera remarquer que pour cela il faudra libérer lentreprise des lourdeurs qui lempêchent de se développer. «Il faut les amener sur le marché et les aider à se diversifier.» Et de procéder à une classification des entreprises par ordre de capacité de production : celles dites «en bonne santé» financière qui disposent dun marché, dun produit technique et dune main-duvre qualifiée ; celles souffrant de déstructuration financière ; les autres, enfin, pourront être cédées aux salariés, celles notamment prises en charge par les holdings régionaux. Cest tout lobjet de la réforme. Et celle-ci passe nécessairement par «le renforcement des capacités de lEtat à exercer son rôle de propriétaire des entreprises publiques, comme le dira encore M. Boukrouh, le renforcement de lautonomie de gestion des entreprises, la flexibilité du programme de privatisation». Ces initiatives nécessitent, bien sûr, la mise sur pied dun cadre législatif unique approprié, à même d«harmoniser» toutes les stratégies de gestion des participations de lEtat et de privatisation des entreprises publiques. A titre dexemple, on verra la naissance du CPE (Conseil des participations de lEtat) à la place de lex-CNPE, la dissolution des holdings et autres Secrétariat aux participations de lEtat, Conseil de privatisations… Les prérogatives des holdings comme propriétaires des actions représentatives des capitaux marchands de lEtat seront confiées au CPE. Le MPCR, quant à lui, sera érigé en secrétariat du CPE, et aura en charge les missions qui étaient jusque-là dévolues au délégué aux participations de lEtat. Il faut peut-être dire aussi que les innovations du nouveau projet se voient surtout en la volonté affichée par ses initiateurs den finir avec la «ségrégation» dont sont victimes les postulants à linvestissement, quils soient publics ou privés, nationaux ou étrangers. Une façon délargir la notion dinvestissement à ceux réalisés en concession et, ou en licence, et autres prises de participation. Et cest au seul Conseil des ministres que revient le pouvoir de décider de la stratégie ainsi que du programme de privatisation, sur proposition du Conseil des participations de lEtat, et cest au ministre chargé des participations quil revient dexécuter le programme en question, en collaboration avec les entreprises publiques concernées, les experts aussi. Ceci dit, M. Boukrouh ne manquera pas dinsister sur le fait que toutes les entreprises sont privatisables, «même si pas une na été privatisée jusquici». Il expliquera qu«il ny a pas de privatisation quand lEtat garde le monopole de gestion sur lentreprise». Même si, pour lui, seule la privatisation peut sauver aujourdhui les entreprises de la faillite totale. Il en voudra, pour preuve, le coût global de lassainissement des entreprises, durant les années 70-78, estimé à quelque 10 milliards de dinars pour le compte de 80 sociétés seulement, dont les dettes avaient atteint 179 milliards de dinars. De 1983 à 1987, cette somme a été portée à 60 milliards de dinars, et pendant la dernière décennie, elle a avoisiné les 1200 milliards de dinars. Cela fait le point. Lavantage, dira M. Boukerouh, on le verra avec le complexe dEl Hadjar. Les Indiens ont, en effet, versé la somme de 50 milliards de dinars lors de la signature de laccord de partenariat, et assuré le maintien en poste des 13 500 employés. Autre argument ; 60 entreprises publiques sont actuellement en cessation de payement. 200 000 employés risquent, ainsi, de se retrouver au chômage dans les mois à venir. Linvestissement est lautre chapitre abordé par le ministre. Les obstacles à linvestissement auront lhonneur dêtre cités en premier, à commencer par la lourdeur des procédures administratives doublée dune multiplicité des centres de décision, sans quil y ait de promoteur réel. La centralisation du fonctionnement au sein de la seule APSI narrange pas les choses non plus. Cest dans cet esprit quil a été décidé de «substituer au code de linvestissement de 1993 une ordonnance pour le développement de linvestissement, qui réserve le régime dérogatoire aux zones et projets nécessitant un soutien de lEtat».