Bouteflika : « LAlgérie risque dêtre recolonisée »
Après les attentats contre les Etats-Unis
Bouteflika : « LAlgérie risque dêtre recolonisée »
De notre envoyée spéciale à Jijel Sihem H., Le Jeune Indépendant, 25 septembre 2001
La situation délicate qui prévaut actuellement dans le monde interpelle, plus que jamais, lAlgérie pour quelle dépasse le stade de la concorde civile, et quelle aille vers la réconciliation nationale. Cest ce qua déclaré le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, en visite officielle, hier, dans la wilaya de Jijel.
Ainsi, dans un discours improvisé au port de Djendjen, le premier magistrat du pays a affirmé que lAlgérie est « une sorte de laboratoire qui attire les regards du monde entier ». « On na plus le droit à lerreur », a-t-il affirmé.
Pour M. Bouteflika, les attaques perpétrées récemment contre les Etats-Unis auront des conséquences désastreuses sur les petits Etats dont lAlgérie. Il tire ainsi la sonnette dalarme en affirmant que si « lAlgérie ne fait rien pour sortir de sa situation dembrasement qui lendeuille, elle risque douvrir grandes les portes aux étrangers et dêtre par le fait recolonisée ». Lheure est donc grave et les répercussions des attaques contre le Pentagone et le World Trade Center « ne seront pas du tout simples ». Tout en reconnaissant que la violence continue, il estime que « lAlgérie doit agir au plus vite ». Et la seule solution, pour le Président, cest la réconciliation nationale.
« Lheure nest pas à la vengeance, il faut que les Algériens comprennent une bonne fois pour toutes quils ont tous une place dans leur pays », déclara le Président. « Mais que celui qui osera prendre les armes contre ses concitoyens ne bénéficiera daucun secours », a-t-il avertit. « Cela ne veut nullement dire que celui qui recourt aux armes nest pas musulman. Tout simplement, il ne partage pas notre manière de concevoir les choses », expliquera-t-il. Il profitera ainsi de cette occasion pour lancer un message à ses « frères » du Front islamique du salut (FIS), en implorant le bon Dieu pour quil remette sur le droit chemin tous les égarés.
Ce nest sans doute pas fortuit si le premier magistrat du pays a choisi la wilaya de Jijel pour parler, encore une fois. Mais cette fois-ci, cest dans une conjoncture internationale spéciale marqué par laction spectaculaire du fléau terroriste.
En effet, cette ville de lest du pays a souffert longtemps des actes terroristes. Pendant la période allant de 1993 à 1998, certaines localités de la wilaya de Jijel étaientt carrément considérées, selon les autorités locales, comme « des zones de la mort ». Madani Mazrag, émir de la région, installé dans cette wilaya, et ses troupes y ont semé la terreur traumatisant ainsi une population déjà meurtrie par les conditions socio-économiques déplorables.
Concernant les problèmes dans lesquels se débat le wilaya, le chef de lEtat a estimé que « lAlgérie est un beau pays qui a beaucoup de capacités mais qui sont très mal exploitées ». Il conditionnera la sortie du marasme dont souffre lAlgérie non seulement au retour au calme mais aussi à la participation de tout un chacun à son développement. « Même le bon Dieu qui gère très bien ses affaires a besoin dune main duvre pour les mener à terme », ironisera le Président. S. H.
Belkhadem concernant la lutte antiterroriste internationale
LAlgérie contre loption militaire
Par Idir Dahmani, Le Jeune Indépendant, 25 septembre 2001
Le ministre dEtat, ministre des Affaires étrangères, M. Abdelaziz Belkhadem, a réitéré hier, devant un parterre de journalistes, la position officielle de lAlgérie par rapport à « la coalition internationale de lutte antiterroriste ». Le ministre a également évoqué, lors dun briefing animé au siège du ministère, les objectifs de la visite du sous-secrétaire parlementaire des Affaires étrangères britannique et le cas des activistes islamistes algériens réfugiés à létranger.
En réponse à une question, M. Belkhadem dira : « Jespère que la lutte antiterroriste internationale sera menée avec des procédés autres que laction militaire ( ) LAlgérie veut être certaine que cette action assure les intérêts de tous, pas ceux dun seul Etat ou peuple ( ) LAlgérie est pour lanéantissement du terrorisme international, mais sans cibler un pays, une culture, une civilisation, un peuple ou une religion. » Ce sont là les réserves les plus fondamentales qui conditionnent la participation de lAlgérie à une action mondiale contre le phénomène du terrorisme. Dautres réserves, il y en a. Concernant la politique du gouvernement, le ministre dEtat déclare : « La politique de la concorde civile et de la réconciliation va continuer, dautant plus quelle a réalisé des résultats. Mais la lutte contre « les poches du terrorisme » continuera aussi. Sous réserve, fait observer M. Belkhadem, « de ne pas faire lamalgame entre lIslam en tant que religion et le terrorisme, un phénomène international avec plusieurs têtes, contre lequel lAlgérie a consenti des efforts draconiens ».
Dans le cadre des consultations entre les pays arabes, quant à une position commune par rapport à la coalition mondiale contre le terrorisme, le ministre a révélé quAmr Moussa « sest entretenu avec nous au sujet dun sommet des ministres des Affaires étrangères arabes ». La Tunisie, ajoute-t-il « a demandé lavis de lAlgérie concernant une rencontre des ministres des Affaires étrangères de lUMA ». Et de préciser : « En effet, une date a été arrêtée, mais ajournée à la demande du Maroc. De son côté, la Libye est entrée en contact avec notre pays pour les mêmes objectifs. » A ce propos, révélera M. Belkhadem « le SG des commissions populaires libyen se rendra en Algérie aujourdhui ». Quant à la position de lAlgérie concernant les attentats qui ont ciblé, le 11 septembre dernier, New York et Washington et qualifiée « dabsente », le ministre fait remarquer que lAlgérie nest pas restée silencieuse. Aux yeux du ministre, la position algérienne a été exprimée, pas une seule fois, mais trois fois. Dabord, par le biais de la lettre de condoléances adressée par le président de la République à George W. Bush. La position algérienne a été, ensuite, rendue publique par le communiqué du gouvernement. Et, enfin, lors du dernier Conseil des ministres présidé par Abdelaziz Bouteflika. Au-delà des communiqués et lettres, le ministre des Affaires étrangères a déclaré, hier, que lAlgérie qui connaît, plus que tout autre pays, les affres du terrorisme, a condamné vivement et sincèrement les attentats qui ont endeuillé les Etats-Unis. Bien avant, « notre pays na pas cessé dappeler à une coopération internationale pour une lutte antiterroriste ». Hélas, dira Belkhadem, « on na pas compris le message de lAlgérie où on a feint de ne pas le comprendre ». Il a fallu donc assister à ce qui sest passé aux Etats-Unis pour venir écouter la voix de lAlgérie. Ainsi, la communauté internationale veut et demande de lAlgérie un rôle dans la lutte antiterroriste. Encore une fois, notre pays, dira le ministre, est convaincu que léradication du terrorisme international est conditionnée par léradication de ses bases arrière. Elles sont multiples : économiques, militaires, financières, politiques, diplomatiques et autres. LAlgérie est aussi convaincue que la lutte contre ce phénomène ne servira pas de moyen pour sattaquer à un pays, une civilisation, une religion I. D.