Au moins trois morts dans des émeutes en Kabylie

 

Au moins trois morts dans des émeutes en Kabylie

Libération, 29 mars 2002

Jour après jour, la situation se dégrade en Kabylie, où de violentes émeutes opposent manifestants et forces de l’ordre depuis près d’une semaine. Deux personnes ont été tuées, hier à Tizi Ouzou, et un jeune manifestant, blessé mercredi à Abi Youcef, en Grande Kabylie, est mort hier. A Tizi, Rabah Hamdi est décédé après avoir été atteint par une grenade lacrymogène tirée à bout portant par un policier juché sur un chasse-neige fonçant à toute allure pour dégager la voie. «Les blessés arrivent par dizaines», affirmaient des médecins de l’hôpital de Tizi Ouzou, où de très violents affrontements ont opposé des milliers de manifestants aux forces de l’ordre à l’occasion d’une marche interdite.

Avant le début de ce rassemblement, les policiers antiémeutes avaient littéralement noyé la ville sous les gaz lacrymogènes, pour contraindre les habitants à rentrer ou à rester chez eux. En vain. La marche s’est ébranlée aux cris, désormais traditionnels, de «pouvoir assassin» et d’«ulac smah ulac («pas de pardon»)». Elle a été bloquée un kilomètre plus loin par des véhicules de police mis en travers de la route. Après un face-à-face de quelques minutes, les policiers ont lancé des lacrymogènes et foncé avec des chasse-neige sur les manifestants. Les émeutes se sont alors étendues à toute la ville, qui a pris l’allure d’un champ de bataille. «Les gens sont pourchassés jusqu’à leurs domiciles, qui parfois sont pillés», raconte un commerçant de Tizi.

Cette marche était appelée par la coordination des archs (tribus), pour protester contre l’occupation par la police, depuis lundi, de leur siège à Tizi et contre l’arrestation, ces derniers jours, de dizaines de responsables de ce mouvement. Ces interpellations, qui ont eu lieu dans plusieurs villes de la région, ont mis le feu aux poudres. Mercredi déjà, des affrontements avaient eu lieu notamment à Tizi, Bouira et Bejaïa, où, pour la première fois, la police a interdit une marche par la force.