Rapport de la LADDH: Accablant pour le Pouvoir

Rapport de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme sur la répression en Kabylie

Accablant pour le Pouvoir

Le Matin, 4 avril 2002

Accablant est le moins qu’on puisse dire du rapport de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) sur la répression en Kabylie. Après avoir enregistré que la contestation populaire en Kabylie s’est étendue à 40 wilayas, le rapport affirme que cette contestation a pour origine « les frustrations du peuple, humilié, marginalisé et réduit à la pauvreté, la hogra, l’absence d’avenir et même d’espoir ». Lesquels sont le drame des jeunes des couches populaires dont « les aspirations en faveur de la démocratie, du pluralisme demeurent le maître mot ». En réponse à la question « qui informe qui ? », la LADDH note que de toutes les institutions sollicitées par la commission Issad, seule la Direction du renseignement et de la sécurité (DRS) a refusé de collaborer avec la commission d’enquête. Plus loin, la LADDH tente de répondre à la question « qui a donné l’ordre de tirer ? ». Le rapport relève que les témoignages et faits démontrent que les forces de l’ordre savaient très bien ce qu’elles faisaient, et leurs éléments ne faisaient qu’exécuter les ordres. Pour preuve, le rapport cite plusieurs exemples : « La présence du commandant du secteur de Tizi Ouzou dans la brigade de gendarmerie au moment du massacre du vendredi 27 avril, le chef de la brigade de gendarmerie d’Illoula a exécuté lui-même un jeune de 20 ans alors que ses éléments avaient refusé de tirer sur les manifestants (). »
Depuis onze mois, explique le rapport, la Kabylie vit au rythme de la contestation populaire pacifique et d’une répression féroce menée par les forces de sécurité et décidée par le Pouvoir. « Les personnes arrêtées ont été souvent soumises à la torture, aux mauvais traitements et parfois au lynchage à plusieurs dans les brigades de gendarmerie ou dans les commissariats : plus de 87 exécutions arbitraires et des milliers de blessés dont des handicapés à vie. » Ces pratiques, affirme le rapport, « violent de nombreuses dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIRDCP) ».
La LADDH conclura son rapport en établissant la culpabilité des forces de l’ordre dans les exécutions sommaires, les fusillades, de nombreuses victimes tuées d’une balle ou de plusieurs balles dans le dos ; l’usage d’armes de guerre telles que les kalachnikovs ou les Seminov, le recours aux snipers ; l’usage de la torture et des mauvais traitements ; le recours aux expéditions punitives, représailles et vols ainsi que la destruction de biens et des attaques et occupations des hôpitaux. « L’impunité érigée en système a favorisé l’extension de la violence », retiendra la LADDH.
Ghada H.