Djeddaï : « Les militaires doivent partir »

Djeddaï dans une conférence de presse

« Les militaires doivent partir »

Par Mohamed Zaâf, Le Jeune Indépendant, 23 décembre 2201

Au FFS, « l’objectif principal est le changement du régime et le départ des militaires », a déclaré le nouveau premier secrétaire national du Front, M. Ahmed Djeddaï, dans une conférence de presse, la première que tient le parti depuis le récent conseil national dont est issu un nouveau secrétariat national.

« Nous n’avons pas de problèmes avec la population, nous n’avons de problèmes avec aucun citoyen algérien. Notre seul problème est avec la hiérarchie militaire et les décideurs qui veulent régenter le pays, continuer à privatiser l’Etat et qui veulent emmener le pays au chaos », a ajouté M. Djeddaï, dans des propos qui semblaient ménager l’institution présidentielle en la tenant hors de l’attaque. Le secrétaire général abordait la situation en Kabylie où « le mouvement citoyen doit être libéré de la tenaille qui l’enserre entre le pouvoir et des extrémistes dont l’objectif est d’entraîner les jeunes dans la spirale d’une violence sans fin ». Le FFS compte s’impliquer davantage afin que le mouvement se poursuive de manière pacifique et qu’il sorte du ghetto où on veut l’enfermer, disait-il en substance. Dorénavant, « nous allons travailler à isoler les extrémistes, nous nous attellerons à réhabiliter le politique, à semer les germes de la tolérance et non les germes de la haine », ajoutait-il.

Ahmed Djeddaï a ainsi « dénoncé » le dialogue noué entre le chef du gouvernement et des représentants des aârchs. Une « mascarade » de plus d’un pouvoir habitué à « dialoguer avec lui-même » puisqu’il a toujours désigné lui-même ses interlocuteurs. Pour lui, les aârchs sont une « structure anachronique, greffée sciemment par le pouvoir » sur le mouvement contestataire citoyen avec pour objectif de le « ghettoïser ». La ghettoïsation a été, selon lui, décidée pour endiguer le mouvement qui avait touché de manière spontanée 33 wilayas à son départ et qui commençait à « prendre l’allure d’une dissidence nationale », expliquait-il.

M. Djeddaï s’est ainsi interrogé sur le rôle et l’envergure réelle des aârchs qui ne sont, en réalité, que deux aârchs, regroupant 5 communes sur les quelque 120 que compte la région, et se trouvant « dans la zone de prédilection d’un parti politique », révélait-il, faisant apparemment allusion au RCD.

Le secrétaire général du FFS s’en est également pris aux « apprentis sorciers » et aux « bourourous » qui ont appelé à l’autonomie de la Kabylie. Dans cette autre allusion à Ferhat Mehenni, qu’il ne nommait pas non plus, M. Djeddaï, fustigeait ces « alliés objectifs du pouvoir » dont la mission est d’accréditer l’idée véhiculée notamment à travers un battage médiatique sur le soi-disant « danger kabyle » qui menacerait « la stabilité nationale ».

Le FFS, qui a organisé deux marches à Alger (les 3 et 31 mai) et est parvenu ainsi à « casser le mur de la peur » s’est toujours inscrit dans le mouvement contestataire puisque les revendications, à sur les libertés, sur le rejet de la hogra, de l’injustice et de l’impunité, rejoignaient celles du Front. Cependant, s’il est hors de question de « baisser les bras », le FFS entend œuvrer à « isoler les extrémistes » du mouvement et à lui redonner une envergure nationale et un cachet pacifique. « Son action ne s’inscrira que dans un cadre national et dans l’intérêt national », a affirmé M. Djeddaï.

Quant aux prochaines élections, le Front n’a pas encore tranché la question. La commission chargée de la stratégie politique au conseil national doit y réfléchir. « Devrons-nous boycotter ? Si oui, pourquoi et avec qui ? Devrons-nous participer, pourquoi et quels sont les résultats escomptés ? », s’interrogeait Djeddaï, laissant le soin de la réponse à la commission. En revanche, il avertissait contre la « fraude annoncée » et qui serait, selon lui, le produit d’un arrangement entre le FLN et le RND, « deux partis du pouvoir, deux faces d’une même pièce ». La fraude est « la seule constance du pouvoir » et « les résultats sont connus d’avance », ironisait-il.

M. Djeddaï s’est, enfin, élevé contre l’absence de débat national sur l’accord d’association Algérie-Union européenne. « Un exemple type de la hogra politique » qui fait qu’un pouvoir « illégitime, sans idéologie, sans base sociale, sans soutien populaire engage le pays dans un accord de cette importance » sans débats ne serait-ce qu’avec ses « façades démocratiques » (allusion à l’APN et au Conseil de la nation). Pour le FFS, l’accord pourrait prolonger « la terreur  » dans le pays. Avec un tel blanc-seing, le pouvoir qui a une « capacité effarante » de se reproduire, et qui a déjà signé par le passé des dizaines de conventions internationales, notamment sur les droits de l’homme, qu’il n’a pas respectées, pourra « continuer à tuer ». Aussi, le FFS compte-t-il œuvrer à l’inclusion d’une « véritable conditionnalité politique » qui aiderait à mieux garantir les libertés, les droits humains, l’Etat de droit et la bonne gouvernance en Algérie. M. Z.