Diverses condamnations de manifestants

Des condamnations et un report à Tizi Ouzou

Marche à Boghni

Quotidien d’Oran, 16 avril 2002

Une importante foule s’est rassemblée, hier matin, vers dix heures, devant le lycée Zamoum de Boghni, dans la wilaya de Tizi Ouzou, pour entamer une marche en direction de la stèle érigée à la mémoire de Rachid Bougara, tué lors des évènements de Kabylie. Le calme qui a marqué cette marche aura permis aux délégués de prendre la parole à la fin de ce mouvement, qui s’est transformé en un véritable meeting populaire. Ainsi, le délégué de Mechtras a tenu à féliciter «la population qui a répondu pacifiquement et qui n’est pas tombée dans le jeu du pouvoir, qui a voulu rééditer 1991. «Le délégué de Boghni, de par ses propos, a, quant à lui, ciblé le corps de la police qui «a voulu faire échouer la marche en arrachant les affiches». Un autre délégué a, pour sa part, eu à expliquer qu’il rejette la clandestinité. Il qualifie le pouvoir de «clandestin» et rassure qu’il est déterminé à poursuivre le combat. Pour lui, il s’agit «d’être ou ne pas être».

Par ailleurs, le procès des cinq délégués de Draa El-Mizan, qui devait se tenir, hier, a été reporté à lundi prochain. A Boghni, sur les quatorze manifestants arrêtés, douze ont été condamnés à des peines allant de quatre mois de prison ferme à deux ans avec sursis. A Tigzirt, près de vingt délégués ont entamé, hier, leur deuxième journée de travaux pour «trouver et proposer les voies et moyens permettant de redonner un souffle nouveau à la contestation citoyenne».

M. Maokli

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Béjaïa

Des peines de six mois à un an de prison et des relaxes

Quotidien d’Oran, 16 avril 2002

Le procès des «prévenus» de la ville de Béjaïa s’est déroulé hier au tribunal du chef-lieu et au terme duquel 34 personnes arrêtées lors des émeutes du 27 mars passé ont été condamnées à six mois de prison ferme alors que quatre ont bénéficié de la relaxe. Lors de son réquisitoire, le procureur de la République a réclamé des peines de prison allant de trois à cinq années.

Une partie des prévenues d’Amizour et d’El-Kseur, au nombre de 23, se sont hier, à leur tour, relayés devant le juge pour répondre des chefs d’inculpation retenus contre eux. Maître Hammoudi, l’un des avocats du collectif chargé du dossier des prévenus, a tenu à dénoncer et à contester la «procédure de transfert des compétences du tribunal d’Amizour (incendié lors des émeutes) au tribunal de Béjaïa». Pour lui, «cette procédure est en violation flagrante de l’article 148 du code de procédure pénal». Une requête a même été remise au président de la cour hier lors du procès. Alors que le verdict à l’encontre de cinq prévenus de la ville de Sidi Aïch a été reporté au mois prochain, les 23 autres, des deux localités d’Amizour et d’El-Kseur, continuaient hier en fin d’après-midi de se présenter devant le juge. Les «prévenus» étaient dans leur grande majorité des jeunes adolescents. A l’issue de l’audience, le tribunal a condamné 19 prévenus à des peines allant de six mois à un an de prison ferme, assorties d’une amende de 3 000 dinars. Trois autres prévenus, des lycéens, ont été condamnés à deux ans avec sursis, alors qu’un autre mis en cause a été relaxé.

En tout état de cause, les sentences prononcées à l’encontre des jeunes manifestants confirment au moins une chose: c’est que les rumeurs colportées ici et là depuis quelques jours à propos de la libération de tous les détenus est dénuée de tout fondement puisque la majorité ont été condamnés à des peines de prison ferme.

Selon le député Abdelkader Hammoudi, que nous avons rencontré hier au tribunal, «il est clair qu’on veut faire taire le mouvement à travers une ‘parodie’ de justice».

Pour le député de Béjaïa, ces peines de prison ne visent réellement qu’à décapiter le mouvement citoyen.

Enfin notons que les familles des détenus ont pu hier assister au procès de leurs enfants, contrairement aux audiences précédentes où ces mêmes familles ont été contraintes de se rassembler devant le portail du tribunal tout au long du procès qui dure à chaque fois toute la journée.

A signaler que les élus FFS, dont le sénateur Abid et le député Bouaïch, ont observé hier matin un sit-in devant le tribunal de Béjaïa pour exiger la «libération de tous les détenus» ainsi que pour dénoncer «l’instrumentalisation de la justice par le pouvoir».

Le sit-in, selon le député de Béjaïa, M. Bouaïch, entre dans le cadre de la «dissidence citoyenne nationale», afin, soutient-il, «d’instaurer une dynamique pour changer le système».

Le sit-in s’est déroulé sans aucun heurt, et les quelques dizaines d’élus qui se sont rassemblés hier matin devant le tribunal où se déroulait le procès des détenus, se sont dispersés dans le calme.

Z. Mehdaoui

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Procès des 29 détenus à Bouira

Des peines de un an de prison ferme à six mois avec sursis

Quotidien d’Oran, 16 avril 2002

Comme prévu, les 29 détenus accusés d’attroupement illégal, d’atteinte à l’ordre public et de diffusion de tracts subversifs ont comparu, hier, en correctionnelle devant le juge près le tribunal de Bouira. La salle d’audience où se déroulait le procès n’accueillera que quelques privilégiés, parents de détenus, député RCD, sénateur FFS et autres politiques responsables de bureaux régionaux.

Dehors, devant le tribunal, des dizaines de citoyens et autres animateurs du mouvement citoyen à qui l’accès à la salle d’audience avait été refusé, spéculaient, à la faveur de la «rumeur» selon laquelle l’ensemble des détenus seraient libérés avant le 18, sur l’issue du procès. Pour les uns, les verdicts sont déjà prononcés; pour d’autres, les peines seraient largement moins lourdes que celles de la semaine dernière.

Tout au long de leurs plaidoiries, les avocats se sont appliqués à démontrer la non-consistance des griefs retenus contre leurs clients. Ainsi, hormis les PV dressés par la gendarmerie, il sera prouvé que les dossiers sont vides. Cet état de fait fera dire à un avocat qui exigeait l’acquittement des détenus: «Sinon, retenez les mêmes charges contre l’ensemble des citoyens de la région et, pourquoi pas puisqu’on y est, en faire une prison grandeur nature».

Cela étant, le procès se soldera par 14 acquittements, 1 année de prison ferme pour 4 détenus, 8 mois de prison ferme pour 5 autres, 6 mois de prison ferme pour 4 détenus et enfin 6 mois avec sursis pour 2 détenus.

T.O.A.