M. Bouteflika entend être le président de tous
M. Bouteflika entend, malgré les critiques,
être « le président de tous »
samedi 17 avril 1999, 13h37
ALGER, 17 avr (AFP) – Le nouveau président algérien Abdelaziz Bouteflika, élu sans opposition vendredi avec 73% des suffrages exprimés, a balayé les critiques contestant sa légitimité et entend bien être « le président de tous les Algériens ».
Dès sa première déclaration après avoir été proclamé, il s’est dit résolu à concrétiser « la réconciliation nationale et mettre fin à l’effusion de sang ». Il a souligné que sa préoccupation essentielle était de rassembler tous ses compatriotes sur le brûlant dossier de la violence islamiste.
En plein scrutin, huit personnes ont été tuées dans des actions liées aux groupes islamistes armés. Depuis début mars, près de 350 personnes ont trouvé la mort dans des attentats des groupes islamistes ou lors d’opérations des forces de sécurité.
Le nouveau président a annoncé que, dès sa prise de fonction, il examinerait le dossier de l’Armée Islamique du Salut (AIS, branche armée du Front Islamique du Salut – FIS, dissous), qui observe une trêve unilatérale depuis le 1er octobre 1997, afin de lui donner une « couverture juridique et politique ». Jusqu’à présent, les autorités avaient gardé un silence gêné sur les négociations qui avaient abouti à cette trêve.
Pendant la campagne électorale, M. Bouteflika avait indiqué qu’il était prêt à discuter avec « tous les égarés », dans une allusion aux islamistes armés, à condition qu' »ils n’aient pas les mains tachées de sang ».
Il entend ainsi faire de ce thème le test de sa volonté d’être le président de tous les Algériens sans exclure ceux qui n’ont pas voté pour lui.
Il a tenu à rassurer très fermement ces derniers en affirmant que, en tant que président de la République, il agirait « en toute impartialité et en toute justice » et qu’il solliciterait l’aide de tous afin d’oeuvrer, « au-delà des différences partisanes », à « tourner définitivement les pages sombres » de l’histoire du pays.
La violence liée aux actions des groupes armés a fait entre 30.000 et 100. 000 morts depuis 1992.
M. Bouteflika, qui a également longuement développé dans sa campagne le thème du retour à la dignité et à l’espoir, s’est déclaré « profondément choqué » par la réaction de la France, ancienne puissance coloniale, qui a fait part de sa « préoccupation » sur les circonstances de son élection.
Les deux pays entretiennent épisodiquement des relations tumultueuses.
Nationaliste ombrageux, le président Bouteflika, a invité la France à s’occuper moins de l’Algérie et l’a avertie qu’il n’acceptait pas « cette forme de protectorat ». « Les relations avec la France sont normales, mais je n’accepterai jamais ni tutelle, ni ingérence », a-t-il souligné.
Il s’est déclaré disposé à renforcer les relations avec son voisin marocain, mais entend s’en tenir aux résolutions des Nations unies quant à la question du Sahara occidental qui empoisonne les relations entre les deux pays.
Le nouveau chef de l’Etat ne procédera pas à un changement de gouvernement. Le cabinet de M. Smaïl Hamdani, investi en décembre dernier pour préparer l’élection présidentielle, restera en place au moins juqu’à la tenue du prochain sommet de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), en juillet prochain à Alger.
M. Bouteflika a exclu des élections législatives anticipées. Les quatre partis qui l’on soutenu disposent de 80% des sièges à l’Assemblée populaire nationale (APN).
vendredi 16 avril 1999, 21h50
Le « renouveau national » selon Abdelaziz Bouteflika
By Rachid Khiari
ALGER (AP) — Abdelaziz Bouteflika n’hésite pas à se déclarer « rassembleur ». Si l’on considère le contenu de son programme électoral, le cinquième président algérien va tenter, au besoin en bousculant l’ordre politique et économique établi, de concrétiser un « renouveau national » et une « nouvelle place pour l’Algérie ».
Les proches collaborateurs de M. Bouteflika font valoir qu’il dispose de la légitimité populaire avec près de 74% des suffrages exprimés et précisent qu’il ne « cherche pas à être aimé, mais respecté » et qu’il dirigera les affaires de son pays avec une « nécessaire détermination ».
« Arrêtez de faire la sieste et de compter sur l’Etat », a-t-il déclaré à ses compatriotes, lors de sa campagne électorale. A ses rivaux qui l’accusent d’avoir « forcé » le scrutin de jeudi, il répond: « Vous avez fui le verdict des urnes. »
Son programme, d’inspiration autoritaire, entend « relever les défis du monde » en essayant de concilier « pluralisme, démocratie et rassemblement » afin de « rebâtir la confiance et faire renaître l’espoir ».
Ce programme accorde la « priorité des priorités » à la « fin de la violence » et à l’affermissement de l’unité nationale » et envisage la « réconciliation » avec « ceux qui n’ont pas de sang sur les mains ».
M. Bouteflika s’engage à constuire un « cadre de vie institutionnelle et sociale ouvert, transparent et participatif », permettant « l’exercice des libertés publiques et individuelles et l’ouverture politique ».
Il se réfère constamment à la Constitution de 1996, mais projette des « aménagements » du système institutionnel existant. Il envisage notamment de supprimer l’une des deux chambres au Parlement afin de prévenir les « blocages », et de réviser le rôle « trop effacé » du Conseil constitutionnel.
M. Bouteflika préconise la « relance du secteur public économique », relayée, en cas de besoin, « par l’investissement privé » qui « peut et doit concourir de manière déterminante, à terme, au développement national ».
Le nouveau chef d’Etat fait en outre valoir que l’Algérie ne peut « ignorer le caractère évolutif et instable des équilibres internationaux ».
Dans son programme électoral, il déclare qu’il veut faire « de la modernisation constante et de l’adaptation permanente de son système de défense l’élément essentiel de la stratégie » militaire de l’Algérie. M. Bouteflika souhaite « une professionalisation progressive » de l’armée, « creuset permanent de la cohésion nationale ».
En relations extérieures, il s’agit, selon lui, de faire respecter « strictement le principe de non-ingérence », de mener « une diplomatie active » et de faire retrouver à l’Algérie une « juste place dans le monde ».
Interrogé vendredi soir sur sa conception des relations entre l’Algérie et les Etats-Unis, il a déclaré qu’il souhaitait « oeuvrer » à leur renforcement. »