Nezzar, la honte….

NEZZAR, LA HONTE….

Hichem Aboud, http://agirpourlalgerie.com/honte.htm

Spectacle désolant que celui offert par la 17eme chambre correctionnelle du tribunal de Paris à la veille de la célébration du 40em anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. Un spectacle organisé par l’ancien sergent de l’armée coloniale devenu général major, ministre de la défense nationale de l’Algérie indépendante, Khaled Nezzar qui poursuit devant les juridictions françaises Habib Souaïdia, ancien sous-lieutenant de l’armée algérienne, auteur du livre LA SALE GUERRE, paru aux éditions La Découverte en janvier 2001. Souaïdia n’est pas poursuivi pour le contenu de son livre, mais pour des propos tenus au cours d’une émission télévisée de la chaîne TV 5. Des propos qui sont de moindre gravite que ceux écrits dans son ouvrage.

Le linge sale de l’Algérie et de ses gouvernants, notamment, a été étalé en public dans la capitale française pour une durée de cinq jours. Des évènements, des faits, des plus anodins, des noms de ministres, d’officiers de l’armée algérienne, de policiers, de simples citoyens sont cités pèle mêle par un Nezzar dans des moments de délire hallucinant. Des évènements et des noms qui ne veulent absolument rien dire pour nombre d’observateurs francais, à commencer par le président du tribunal et ses deux assesseurs. Quant au procureur de la république, qui n’a pas intervenu une seule fois au cours des différentes séances, elle était totalement absente donnant l’impression qu’elle n’était nullement concernée.

Les Algériens présents dans la salle avaient le cœur déchiré en assistant médusés à cet affreux spectacle qui ne fait guère honneur à Algérie. Encore moins à son armée. Et, dire que notre  » brave  » général déclarait à qui voulait l’entendre qu’il était venu défendre l’honneur de Algérie, de son armée et de son peuple. Une thèse reprise par la cohorte de courtisans qui l’a accompagné à Paris aux frais du citoyen algérien qui a du mal à trouver une goutte d’eau dans son robinet.

Ayant assisté à ce procès en observateur, j’avais pensé rendre compte du déroulement des débats pour les visiteurs du site  » agir pour l’Algérie  » , mais le sentiment du dégoût qui m’a envahi le dernier jour de cet effarant spectacle a fini par m’empêcher d’écrire le moindre mot.

Que dire de ce général sénile, avant l’âge, recroquevillé sur lui-même, écoutant sans brocher la plaidoirie de Me William Bourdon qui n’avait pas lésiné sur le lexique pour affubler Nezzar de tous les qualificatifs du dictateur et du tortionnaire. L’avocat de Souaïdia commença par tourner en dérision les témoins de Nezzar. Ceux-la même qui ont eu à diriger, il fut un temps, l’Algérie. De l’ex premier ministre Sid Ahmed Ghozali, il ne trouva rien d’autre que de le qualifier de  » marionnette entre les mains des militaires « . Hélas, une vérité que confirme Nezzar en témoignant dans ses mémoires que l’homme au nœud papillon a été désigné chef du gouvernement alors qu’il n’a même pas été consulté. Sid Ahmed Ghozali se trouvait, alors, à l’étranger. Rezzag Bara qui fut ridicule tout au long de son passage à la barre pour témoigner est qualifié par Me William Bourdon de  » bureaucrate des droits de l’homme « . Hélas, autre vérité qu’il confirme lui même à la barre en avouant que la ligue des droits de l’homme qu’il avait créée sous les auspices de Belkheir na obtenu son agrément en vingt-quatre heures. En témoignant sur le traitement des dossiers des disparus par Rezzag Bara, Nacéra Dutour a ridiculisé l’ancien président de l’Observatoire des DRoits de l’Homme (un organisme placé sous la tutelle des généraux). Même l’écrivain Rachid Boudjedra n’a pas manqué de s’exposer au déluge de Bourdon qui l’a traité de  » fou du roi « . Heureusement pour lui que l’avocat ne connaît rien de ses relations avec l’ancien directeur de la police Hedi Khediri autrement, il lui aurait rendu la monnaie de sa pièce lorsque Boudjedra pour excuser son témoignage aux côtés de Nezzar cherchait à se comparer à Proust en disant qu’il était l’ami du préfet de police de Paris. Tout le monde est passé par la bassine parisienne. Même le corps de la magistrature algérienne n’a pas échappé au coup de savonnette, puisque Madame Leïla Aslaoui est aux yeux de Me Bourdon n’a pas sa place dans un pays démocratique. Du témoignage des victimes du terrorisme appelées par Nezzar à sa rescousse, l’avocat de la défense déplora la séance de tortue à laquelle les soumit le bourreau plaignant en les invitant à revenir en public sur des faits douloureux qu’elles voudraient bien effacer de leur mémoire. Nezzar a instrumentalisé la douleur de simples citoyennes pour se défendre dans un procès où l’accusateur s’est retrouvé accusé.

En me remémorant, ces affreuses scènes, je n’ai plus le courage d’écrire plus sur ces débats qui ont été l’occasion de laver le linge sale algérien dans une bassine française. Nezzar qui a entamé sa carrière dans l’armée française, il l’a terminée devant un tribunal français en déposant plainte contre un enfant du peuple algérien qui n’a connu d’armée que celle de l’Algérie. Un enfant qui n’a salué que les couleurs de son pays sous lesquelles il s’est engagé pour servir son pays.

Pourquoi cette dérive? N’étions nous pas partis sur un procès en diffamation? Pourquoi toute cette armada d’anciens ministres et de supporters venus garnir les bancs de la salle d’audience? Pourquoi évoquer l’interruption du processus électoral, le massacre de Bentalha, soulever de nouveau l’éternelle question  » qui tue qui? « , revenir sur des épisodes de la vie politique des années de larmes et de sang? Pourquoi Nezzar ne s’est-il pas tenu aux propos qu’il a trouvés diffamatoires dans l’intervention de Souaïdia sur TV 5? Dans quel dessein voulait-il entretenir l’amalgame entre sa petite personne et le peuple algérien qui le vomit? Qui lui a donné mandat de parler au nom du peuple algérien ou de son armée dont un grand nombre de ses soldats, sous-officiers et officiers souffrent au même titre que leurs concitoyens de la promiscuité, de la mal vie, de la crise de logement et du manque d’eau dans un pays pétrolier?

N’a-t-il pas engagé ses poursuites contre Souaïdia à titre personnel? Pourquoi, donc, déplacer tout ce beau monde aux frais du contribuable algérien? Pourquoi n’a-t-il pas suivi le chemin le plus simple et le plus court pour déposer une plainte pour diffamation? Il lui suffisait de faire une citation directe contre son adversaire et à ce dernier de prouver ce qu’il avançait dans son intervention télévisée. L’affaire n’aura pas duré plus d’une heure devant le tribunal. Allez comprendre pourquoi ce bourreau qui a soulevé plus d’une fois l’hilarité de la salle d’audience par ses maladresses et ses interventions intempestives.

A l’issue du procès ils étaient nombreux à s’interroger comment un homme dont le niveau est au ras des pâquerettes a pu s’imposer à tout un peuple. Sans la constitution d’un clan mafieux qui a usé de tous les moyens répressifs, Nezzar aurait été moins que rien en Algérie. Il l’a confirmé dés le premier jour du procès où l’avocat de la défense le rappela à l’ordre en lui signifiant qu’il n’était pas dans une caserne et qu’il n’avait qu’à respecter le justice  » sinon, allez vous faire juger là bas « . C’est à dire là où la justice est aux pieds des généraux. Imaginons, un seul instant si le procès s’était déroulé en Algérie. Souaïdia n’aurait jamais comparu libre. Et il ne serait pas sorti du tribunal sans une peine de trois années de prison ferme, au minimum. Pour beaucoup moins que ça, j’ai collectionné les peines de prison.

Pourtant, la justice algérienne compte des femmes et des hommes dont l’intégrité et la compétence n’ont rien à envier à leurs homologues français. Malheureusement, la mafia et sa bande de lèche bottes ils l’ont réduite au rôle d’instrument entre les mains des décideurs. Nezzar, lui même, l’a reconnu dés le premier jour du procès en déclarant que s’il avait déposé plainte devant un tribunal algérien personne n’aurait cru en son impartialité.

Nezzar qui discrédite la justice algérienne qui condamne son fils à un dinar symbolique pour avoir tabassé un journaliste et il va chercher défendre son honneur devant un tribunal de l’ancienne puissance coloniale. A-t-il vraiment un honneur pour qu’il songe le défendre?