Honteuse défense
Honteuse défense
Dans le mémoire qu’il a adressé au Procureur de la République du tribunal de Grande instance de Paris, en réponse à la plainte qui a été déposée contre lui pour « torture et traitement inhumain », le général major Khaled Nezzar utilise, pour se défendre, la législation coloniale, s’agissant du maintien ou du rétablissement de l’ordre. En effet, l’ancien membre du Haut Comité d’Etat, ancien ministre de la Défense nationale, ancien chef d’état-major de l’ANP, cite les lois d’exception françaises pour mater la lutte algérienne de libération nationale assimilée à une affaire ordinaire de maintien d’ordre. Insultant la mémoire algérienne, les morts et les vivants, Khaled Nezzar s’appuie, pour ce qui est de l’instauration de l’état d’urgence, sur la loi n° 55-385 du 3 janvier 1955 modifiée par la loi n° 551080 du 7 août 1955 et l’ordonnance n° 80-372 du 15 avril 1960. Concernant l’état de siège décrété en octobre 1988, Khaled Nezzar s’appuie sur la loi française du 9 août 1849 modifiée par la loi du 3 avril 1878 ; décret du 16 juin 1940 et l’article 36 de la Constitution de 1958. Pour sauver sa tête, dans une période où le dossier de la torture pendant la guerre d’Algérie est ouvert, le général major Khaled Nezzar n’hésite pas de comparer les deux périodes pour conclure à la nécessité de l’intervention de l’armée devant la carence des services de l’ordre public. Ses avocats précisent : « en ce qui concerne l’emploi de la force et l’usage des armes, la réglementation algérienne s’inspire étroitement de l’instruction interministérielle française n° 500-SGDN/AC/REG du 20 juillet 1970 relative à la participation des forces armées au maintien de l’ordre ». La défense de Nezzar cite même l’annexe 3 : » Défense, Protection et Sécurité du Territoire », notamment les pages 29 et 30 pièce 1 relatives aux états d’exception, pièce 2 de la page 10 article 25 relatif à l’emploi de la force, ainsi que les articles 41 à 45 pages 16 et 17 ; page 27 article -R-431-1 relatifs à la dispersion des attroupements et l’emploi de la force armée. D’abord, les Algériens ignoraient que leur pays continuait à être soumis à la loi française et qui plus est d’exception, près qu’un demi siècle après avoir accédé à l’indépendance qui s’avère tout à fait formelle. Ensuite, les dernières dispositions citées par les avocats de Khaled Nezzar ont été prises à la suite des événements de mai 1968, qui n’ont pas tourné au drame comme cela fut le cas en Algérie sous administration d’une junte militaire en octobre 1988 et en juin 1991. Contrairement à ce qui s’est passé à Paris, l’armée » algérienne » a sauvagement réprimé à Alger, des centaines de personnes ont été massacrées à l’arme lourde et des milliers de jeunes manifestants aussi bien en 88 qu’en 91 ont subi d’affreuses tortures, certains ont même été castrés. Khaled Nezzar qui déclare dans son mémoire adressé au Procureur ignorer ce qui s’était passé alors qu’il gérait en personne la répression, apporte de l’eau au moulin des généraux français frappés d’amnésie dès que l’on évoque la torture que les vrais nationalistes algériens ont eu à souffrir. Le dernier débat que France 3 a organisé en est une illustration. Khaled Nezzar fait comme ancien DAF cause commune avec ses anciens chefs et collègues.