Hocine Aït Ahmed demande l’envoi d’une commission d’enquête internationale
Hocine Aït Ahmed demande l’envoi d’une commission d’enquête
internationale
GENEVE, 19 juin (AFP) – Le président du Front des Forces
socialistes (FFS), l’opposant algérien Hocine Aït Ahmed, a lancé
mardi un appel au secrétaire général des Nations unies Kofi Annan
pour qu’il se rende en Algérie et qu’il favorise l’envoi d’une
commission d’enquête internationale.
M. Aït Ahmed, qui est à la tête du principal parti d’opposition
algérien, très bien implanté en Kabylie, a été reçu à la Commission
des droits de l’Homme par Bertie Ramcharan, haut-commissaire
adjoint, au nom du Haut commissaire Mary Robinson, qui était
absente.
Le président du FFS a remis pour Mme Robinson une liste de 130
disparus, principalement des jeunes, depuis la grande manifestation
du 14 juin. La liste donne leurs noms et prénoms, leur commune
d’origine et leur « wilaya » (préfecture) d’origine, lorsqu’elles sont
connues.
« Je demande, au nom des victimes du peuple algérien, au
secrétaire général de rendre une visite d’amitié, et d’envoyer une
commission
d’enquête internationale pour faire la lumière sur les
événements, condition sine qua non pour rendre justice aux
Algériens », a-t-il dit devant quelques journalistes.
M. Aït Ahmed a rappelé qu’une mission d’information de l’ONU,
dirigée par l’ancien Premier ministre portugais Mario Soares,
s’était rendue en Algérie en juillet 1998 mais « n’avait pas échappé
à la manipulation des autorités algériennes ».
Le vieil opposant, qui vit aujourd’hui à Lausanne, a demandé
également l’envoi sur place des rapporteurs spéciaux de la
commission des droits de l’Homme sur la torture, les exécutions
sommaires et les disparus.
« Ils doivent se rendre d’urgence en Algérie au secours d’une
population livrée aux casseurs, aux services de police qui ont
recours à l’émeute et aux provocations. Celles-ci sont destinées à
+ethniciser+ la crise, alors qu’il est de notoriété publique que les
événements récents sont irréductibles à une région (NDLR: la
Kabylie) », a-t-il dit.
Selon lui, il s’agit d' »une lame de fonds », d' »une contestation
pacifique en train de devenir une véritable dissidence nationale
citoyenne », par une jeunesse marginalisée représentant 36 % de la
population. « Le problème d’aujourd’hui n’est pas de changer de président,
tant il est vrai que, depuis l’indépendance, ils ont été choisis,
limogés, voire tués par les généraux qui les ont choisis ». « Il
s’agit d’aller vers la refondation de l’Etat algérien », « un
véritable changement de régime », a-t-il dit en rappelant que le FFS
avait des « propositions concrètes » pour une « transition démocratique
et « la mise en place d’institutions communes par la négociation »,
sans exclure l’armée du processus.
Le 12 mai, le FFS avait adressé ses propositions au président
Abdelaziz Bouteflika, et aux généraux Mohamed Lamari, chef de
l’armée, et Tewfik Mediene, chef de la police politique.
« Nous ne sommes pas contre l’armée et les services de police.
Nous sommes contre le cartel d’une dizaine de généraux qui se sont
+bunkérisés+ derrière leur pouvoir absolu, qui n’ont pas à rendre de
comptes et qui disposent d’une impunité totale », a dit M. Aït
Ahmed.
Ce dernier a été reçu récemment aux Etats-Unis au département
d’Etat et au Congrès, et se rendra prochainement à Bruxelles et au
congrès de l’Internationale socialiste à Lisbonne.
Interrogé sur ses contacts avec des personnalités algériennes,
il s’est dit « ouvert à tous les contacts, mais pas des contacts alibis ». « La
presse est pleine d’informations sur des contacts que
nous sommes obligés de démentir », a-t-il dit.
jlv/cr/ai eaf
AFP