Deux lois retirées en un mois

Deux lois retirées en un mois

Recul tactique ?

Par Aït-Chaâlal Mouloud, Le Jeune Indépendant, 4 novembre 2002

Après le retrait de l’APN de la loi sur la réforme du statut de la Fonction publique, en septembre, le gouvernement fait encore une fois machine arrière en mettant sous le boisseau le projet de loi relatif à l’exploitation des terres agricoles publiques. Le gouvernement, en majorité issu du Front de libération national (FLN) dans lequel gravite l’influente Union nationale des paysans algériens, qui a constitué, en tout temps, un réservoir électoral obèse, a préféré taire un texte des plus brûlants et qui fait l’objet d’une guerre idéologique acerbe depuis le gouvernement de Mouloud Hamrouche.

Le ministre de l’Agriculture, M. Saïd Barkat, qui bénéficie de la bénédiction du président Bouteflika, avait pourtant promis de présenter le projet – divisé entre ceux qui plaident pour le maintien des terres sous la tutelle de l’Etat et ceux militent pour leur privatisation – lors de la session d’automne de l’APN. Ce retrait intervient un mois après celui du statut de la Fonction publique, un projet qui faisait les choux gras du SNAPAP, le syndicat opposé à l’UGTA, qui revendique des dizaines de milliers d’adhérents dans l’administration. Le SNAPAP réclame une conférence nationale devant définir le statut de la Fonction publique.

Le projet de lois relatif aux terres agricoles coïncidait avec l’inscription à l’ordre du jour de l’APN des projets de loi sensibles et controversés dont, entre autres, celles sur le foncier, les hydrocarbures ou le code de la famille, annonçant une polémique déjà à son paroxysme depuis le récent coup de rapière de la centrale syndicale à Bouteflika. Après avoir été son soutien électoral en 1999, l’organisation de Sidi-Saïd avait fustigé la politique de gouvernance du Président et rejeté toute privatisation. Ce qui renseigne sur le risques que pouvait susciter la présentation au Parlement d’un tel projet dans un climat aussi délétère qu’imprévisible et marqué par une farouche résistance à la privatisation d’un secteur, à l’instar des hydrocarbures, considéré comme un patrimoine collectif de tous les Algériens et, de surcroît, relevant de sa souveraineté.

Un principe loin d’être partagé par le RND d’Ahmed Ouyahia qui prône la vente des terres, dans le sillage de la politique de réformes initiées depuis des années par l’Etat pour relancer un secteur qu’il qualifie de moribond et nécessitant d’énormes moyens financiers et technologiques que les pouvoirs publics ne peuvent supporter. Des lors, en préconisant la formule de la concession des terres, une option qui permet à l’Etat de garder ses droits sur les terres, Bouteflika croyait avoir contenté tout le monde, mais le retrait du projet de l’ordre du jour du Parlement donne à penser que la partie n’est pas du tout gagnée. A.-C. M