FFS à propos de l’invitation de la Présidence pour des « consultations politiques »

FFS à propos de l’invitation de la Présidence
pour des « consultations politiques »

DECLARATION LIMINAIRE

21 février 2002

Le FFS vient de décliner une invitation pour des « consultations politiques » émanant de la Présidence dont les contours et l’objet ne sont pas connus.

Le FFS s’interroge sur les véritables objectifs d’une telle invitation dans un contexte d’impasse intégrale, d’absence totale de volonté des vrais décideurs d’aller dans le sens de l’ouverture politique.

Alors que les algériennes et les algériens s’impatientent de voir le bout du tunnel de l’incertitude et de la souffrance et que s’exprime une volonté politique forte, par la prise de mesures d’apaisement et de détente, le pouvoir continue de concocter de faux dialogues, de fausses échéances, pour de fausses solutions. Une démarche éculée consistant à faire partager la responsabilité aux partis politiques.

Enfermé dans un mutisme cynique aux demandes légitimes de la population et d’une jeunesse révoltée, préférant la stratégie du pire, le pouvoir s’invente des techniques nouvelles de manipulations pour pervertir le sens du combat des algériennes et des algériens, et tenter de transformer les éléments de l’équation : – société contre dictature – en – société contre le politique -.

La campagne hystérique de mensonges, de manipulations et les attaques récurrentes contre la presse et les pluralismes visent à éradiquer toute vie politique en brisant tous les cadres d’expression pacifique et démocratique. Dès lors, l’émeute devient pour la population le seul moyen d’exprimer sa révolte, et pour le pouvoir le prétexte pour mieux la réprimer.

La distribution des armes aux civils, le climat de tension et de violence sciemment entretenu en Kabylie s’inscrit dans la stratégie du pouvoir de pacification et de soumission de l’un des bastions, qui dans le cadre de l’unité nationale, a toujours lutté pour la démocratie, elle même inséparable de la reconnaissance des pluralismes, sans se faire complice des jusqu’au-boutistes de la politique du pire.

C’est une pathologie propre aux régimes dictatoriaux qui, portés par la violence ne se nourrissent que de la violence.

Faute de ne pouvoir soumettre les Algériens par la force, la précarité et la corruption, les tenants du pouvoir leur infligent des sanctions sous le seul chef d’inculpation d’être déterminés à reconquérir leur droit à l’autodétermination

L’opinion nationale n’est pas dupe des stratagèmes du pouvoir qui vise à briser l’élan de la Dissidence citoyenne tentant ainsi d’échapper à une prise de conscience nationale et internationale contre l’impunité, par le recours répété à des manipulations et des diversions criminelles

Nous avons toujours recherché l’ouverture d’un dialogue franc et transparent, précédé par des déclarations déterminées des responsables et des signes concrets en faveur d’une ouverture. Nous considérons qu’aucun prétexte fallacieux, aucune manœuvre clanique ne parviendra désormais à faire reculer l’urgence d’une issue politique et démocratique à la crise.

Il y a quelques mois, nous avons adressé au chef de l’Etat et aux généraux décideurs un Mémorandum pour une transition démocratique pour lequel aucune réponse politique n’a été donnée.

Cette proposition de sortie de crise est susceptible, aujourd’hui plus que jamais, de favoriser la construction de l’Etat et de la Nation sur des bases démocratiques et modernes.

Aucune solution ne peut être envisagée, ne peut avoir de soutien populaire sans la prise de mesures d’urgence préalables à savoir :

– L’arrêt immédiat de la répression et des provocations,

– La levée immédiate et inconditionnelle du dispositif policier,

– L’arrestation et le jugement des commanditaires et des auteurs des assassinats,

– La reconnaissance du statut de martyr à toutes les victimes de la répression.

– Réparation aux victimes des inondations et le jugement des responsables civils et militaires de la catastrophe

– La prise en charge des revendications légitimes du monde du travail

– L’arrêt des harcèlements contre la presse, les journalistes, les militants des droits de l’Homme, les syndicats autonomes…

Ces mesures seront de nature à créer un climat favorable à l’ouverture d’un dialogue entre le pouvoir et les forces politiques et sociales en vue d’amorcer une véritable transition démocratique qui passe inévitablement par :

– Levée de l’état d’urgence et l’abrogation de toutes les lois d’exception

– Ouverture du champs politique et d’opinion, par la levée de toutes les restrictions et entraves à l’exercice des droits d’expression, de manifestation, d’organisation et d’association

– Ouverture du champs médiatique en garantissant l’accès libre et équitable aux médias lourds, notamment la télévision.

– Reconnaissance de Tamazight, l’un des piliers de l’algérianité au même titre que l’arabe, comme langue nationale et officielle.

– Retrait de l’hypothèque de l’agrément préalable qui empêche la constitution de partis, d’associations autonomes et de journaux indépendants.

– Mettre fin au pillage du patrimoine national par le démantèlement de tout le cadre juridique l’ayant favorisé et le retrait de toutes les lois aboutissant au bradage de nos ressources nationales, telle la loi sur les hydrocarbures.

– Engager des poursuites contre les responsables de cette dilapidation.

Les cadres, les partenaires et les objectifs de tout dialogue doivent être définis d’un commun accord.

Le FFS propose que ce dialogue se structure autour de :

1- L’élaboration d’une charte politique sous la forme d’un engagement public et sans ambiguïté des différents acteurs pour :

a- Le respect des libertés fondamentales, individuelles et collectives.
b- Le respect et la défense des droits de l’homme en toute circonstance.
c- Le respect des pluralismes politique, culturel , linguistique et confessionnel.
d- La non utilisation de la religion à des fins politiques par toutes les parties.
e- Le rejet de la violence comme moyen d’expression politique

2. La mise en place d’institutions chargées de gérer une période de transition la plus courte possible:

a – une Convention Nationale de Suivi et de Contrôle de la Transition ( CNSCT)
La CNSCT dont la composition sera définie par les participants au dialogue, sera chargée :

– d’agréer les personnalités devant siéger au gouvernement ;

– d’élaborer l’ensemble du dispositif électoral (révision des listes, découpage électoral, révision de la loi électorale, dispositif de surveillance nationale et internationale du processus électoral)

– de fixer le calendrier électoral dans sa globalité, avec l’élection d’une assemblée
constituante comme première étape.

b – un gouvernement chargé de mettre en œuvre les recommandations de la CNSCT et d’expédier avec le chef de l’Etat les affaires courantes.

Ces deux institutions auront donc pour mission essentielle de réunir les conditions politiques et techniques nécessaires à l’organisation de l’élection d’une assemblée constituante.
Une telle assemblée est une condition sine qua non pour restituer au peuple algérien son droit à l’autodétermination et mettre en place un Etat de droit.

C’est en effet aux Algériennes et aux Algériens, et à eux seuls, qu’il appartient de reconstruire un Etat en lui donnant des fondements garantissant la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la justice, la non utilisation de la religion à des fins politiques, le respect de tous les pluralisme existant dans la société, l’égalité entre hommes et femmes, le respect et la promotion des droits de la personne humaine.

Durant cette période de transition, l’assemblée populaire nationale étant dissoute. le chef de l’Etat peut légiférer par ordonnance sur des questions d’intérêt national avec l’approbation de la CNSCT.

L’institution militaire, partenaire important de cette transition, doit être garante du respect des engagements pris. Elle doit être associée à l’ensemble des étapes du processus. Son retrait du champ politique doit être graduel et effectif.

La communauté internationale doit être également présente, par le biais d’une représentation officielle et permanente du Secrétaire général des Nations-Unies, chargée de l’observation et, éventuellement, des bons offices, dès le début et tout au long de ce processus historique mené par les Algériens, pour les Algériens en Algérie.

Nous resterons au plus prés des souffrances de la jeunesse et de la population dont nous tirons notre essence et pour lesquels vont nos marques de solidarité , de soutien et de compassion. Nous continuerons de travailler à ta recherche d’une solution politique globale à la crise que connaît notre pays.