Ali Tounsi et Yves Bonnet : Les adaptations de la police algérienne et «l’Internationale des services»

Ali Tounsi et Yves Bonnet

Les adaptations de la police algérienne et

«l’Internationale des services»

Le Quotidien d’Oran, 29 octobre 2002

Dès l’introduction de son intervention, le patron de la police nationale, M. Ali Tounsi, considère que l’Algérie a été choisie «comme pays pilote pour les visées subversives de prise de pouvoir de l’intégrisme islamique».

Pour lui, «l’annulation des élections législatives de décembre 1991, n’était qu’un prétexte» puisque, affirme-t-il, «les stratèges de la violence terroriste mondiale ont décidé d’accélérer le déclenchement de leurs opérations militaires avant même que le prétexte légal de démocratie bafouée leur en soit donné». «Le tort des services de sécurité, ajoute-t-il, est de n’avoir pas pu prévoir cette situation». Evoquant l’intervention de la police algérienne, après l’instauration de l’état d’urgence, M. Tounsi considère que les effectifs de l’époque (43.000 policiers pour une population de 25 millions d’habitants) étaient «mal déployés et surtout insuffisamment formés, voire non équipés pour cette mission». Il constate que «leur niveau professionnel (était) dangereusement bas». «Dans les rangs, dit-il, s’était également instaurée une anarchie et une indiscipline dues essentiellement à la valeur des cadres, qui affrontaient les événements sans aucune formation ou préparation adaptée à la situation».

Cependant, Ali Tounsi n’illustre pas, par des exemples, les conséquences de «l’anarchie» et de «l’indiscipline» qu’il décrit.

Pour parer à cette situation, la DGSN a «oeuvré au rétablissement de la discipline dans les rangs» par la mise en place d’un système de formation, «pour élever le niveau professionnel», et par l’introduction de «sanction positive», en cas de bravoure, et de «sanction négative» pour «corriger des comportements punissables».

L’acquisition d’armes et de nouveaux équipements, que l’orateur ne situe pas dans le temps, ont permis, selon lui, aux investigations policières «de gagner en efficacité et en célérité». Dorénavant, «ce travail scientifique nous permet également d’aider les Cours de justice, dans leur jugement, en leur fournissant des preuves légales et irréfutables dans les enquêtes criminelles liées au terrorisme».

Entre autres nouvelles techniques, la DGSN a mis en place une structure constituée d’un «centre opérationnel de recherches appliquées et sondage d’opinion (CORSO)».

Pour sa part, Yves Bonnet, l’ex-directeur de la surveillance du territoire française (DST), considérant louable l’initiative de l’organisation de ce colloque, estime qu’il faut, néanmoins, «se dépêcher pour passer du symbolique au pédagogique et du pédagogique à l’opérationnel». Pour lui, la «distinction entre mouvements de libération et terrorisme est très nette», car les premiers «sont massivement suivis», alors que le second «est l’oeuvre destructrice d’un groupe restreint de l’ordre établi».

Bonnet est catégorique quant au «lien entre le terrorisme et les milieux mafieux, notamment ceux de la drogue». «Parce que, dit-il, un acte terroriste a besoin de beaucoup d’argent pour être commis». Pour lutter contre le fléau, «la coopération internationale est incontournable», même si elle pose des contraintes d’ordre politique et déontologique. Expliquant que, sur le terrain, aucune distinction ne doit être faite entre les interventions des uns et des autres.

«Je déplore, ajoute-t-il, le fait qu’on n’ait pas dénoncé le terrorisme des riches, l’embargo et la mise en quarantaine d’un pays sans aucune présomption d’innocence». Yves Bonnet s’interroge enfin : «Y a-t-il une internationale des services indépendante des politiques ?». Une question à laquelle il refuse de donner une réponse, suggérant une entente préalable entre politiques.

M.M.