Terrorisme: les chiffres d’un général

lors du colloque international d’Alger

Terrorisme: les chiffres d’un général

Le Quotidien d’Oran, 27 octobre 2002

«Le terrorisme n’est pas né de l’arrêt du processus électoral de janvier 1992», a déclaré le général Maïza, le premier officier supérieur de l’ANP à intervenir au cours du colloque international sur le terrorisme. L’école, «avec, dit-il, l’arrivée massive des enseignants moyens-orientaux», et les mosquées sont désignées par le général Maïza comme étant les lieux d’influence du terrorisme.

Selon lui, «l’option violente pour la prise de pouvoir a commencé dès les années 80″ avec le groupe de Mustapha Bouyali. D’ailleurs, ajoute-t-il, «les principaux acteurs de ce groupe, amnistiés en 1989, ont constitué l’essentiel de l’ossature des groupes armés nés en 1991″.

Le général Maïza affirme que «les islamistes ont commis, dès les années 70, les actions (armées) pour s’approprier le pouvoir», et rappelle les «sabotages de lignes téléphoniques et les appels au meurtre de femmes fonctionnaires et assassinats de femmes célibataires». Revenant sur les événements de 1991, le général considère que «le FIS a appelé à l’insurrection» en lançant un appel «pour le stockage d’armes et d’explosifs» et en procédant aux «enlèvements de militaires, de policiers qu’ils ont séquestrés dans des mosquées».

Selon lui, les groupes armés «sont nés sous la bannière du FIS et avec sa bénédiction». Il cite, à titre d’exemple, l’action menée contre le poste frontalier de Guemmar le 28 novembre 1989. Le général affirme que «des casemates ont été aménagées dès 1985-1986».

Il énumère les groupes armés nés depuis 1992, à savoir: le MIA (démantelé en 1994), le MEI (créé en 1991 et décimé en 1998), et le FIDA, «groupe terroriste à l’origine des assassinats de la plupart des intellectuels» (liquidé en 1996). Le général Maïza cite également «des groupes armés autonomes, composés d’éléments marginaux, de désoeuvrés et d’anciens afghans». «Il s’agit, affirme-t-il, de bandes de mercenaires armés, analphabètes et incultes (qui) obéissaient aux fetwas de Cherati». Par ailleurs, le général n’évoque pas de négociations avec l’AIS. Il considère que «le bras armé du FIS» a déposé les armes «dès le début de la loi sur la concorde civile». Le général estime entre 600 et 650 le nombre d’éléments des groupes armés encore actifs. «Les GIA, affirme-t-il, dirigés par Ouakali Rachid, dit Abou Tourab, sont composés de 60 éléments et sévissent dans les régions de Blida, Aïn Defla, Chlef, Médéa, Mascara, Sidi Bel-Abbès et Skikda». L’orateur affirme que les GIA ont à leur actif «le plus grands nombre d’assassinats». Dans sa configuration actuelle, les 60 éléments du GIA «se déplacent constamment, en petits groupes de 4 à 6». Le GSPC de Hassan Hattab compte, selon lui, 300 individus et active dans les wilayas de Tizi-Ouzou, Béjaïa, Batna, Tébessa et Jijel. Le général affirme que le GSPC était, «il n’y a pas encore longtemps, en liaison avec Al-Qaïda».

Outre les GIA et le GSPC, les groupes armés encore actifs cités par le chef d’état-major de la 1ère Région militaire sont: Houmat daawa salafia (HES), le Groupe salafiste pour le djihad (GSPD), composé de 50 à 60 individus, et le Groupe salafiste combattant (GSC). Ces trois derniers groupes essayent, selon Maïza, d’établir des relations avec Hattab. Le général Maïza distingue trois phases de l’action terroriste. «La phase de commencement et de croissance» (92-93-94) qui a consisté dans «la destruction des infrastructures du pays, sabotages de pipelines et les assassinats des hommes de religion, d’intellectuels, de policiers, de gendarmes et de militaires». «Ils ont failli faire disparaître la République», a-t-il dit à propos de cette phase. De 95 à 97, dans «sa phase apogée», le terrorisme a fait le maximum de victimes. «Les terroristes, et les GIA en particulier, ont commis plusieurs massacres collectifs, notamment après les élections présidentielles de 1995». Et d’ajouter que «les terroristes ont essayé d’attribuer les massacres aux services de sécurité, ce qui a donné lieu au «Qui tue qui ?». De 1998 à nos jours, c’est la phase de déclin, affirme Maïza. «Les terroristes n’ont plus la logistique nécessaire pour commettre des assassinats individuels, ni pour pouvoir lancer des attaques contre des zones urbaines et semi-urbaines».

Maïza note que «l’embargo qui a frappé l’Algérie n’a pas permis d’équiper ses unités et ses hommes avec les armes et surtout les équipements de reconnaissance et de vision nocturne leur permettant d’êtres efficaces». Le bilan de 1992 à 2000, le général Maïza l’évalue à 37.000 victimes et 30.700 blessés lors de l’effet de 5.575 bombes, 95 véhicules piégés et autres massacres collectifs. En 10 ans, selon les chiffres de l’orateur, «15.200 terroristes ont été neutralisés et 30.000 autres (dont des éléments de soutien) ont été jugés». Selon lui, la loi sur le repentir et la concorde civile «ont permis à 6.000 terroristes de se rendre aux autorités».

Mohamed Mehdi