L’entretien accordé par le président de la république au club de la presse ‘Europe1’
L’entretien accordé par le président de la république au club de la presse ‘Europe1’
(Intégral)
L’entretien par thème:
La concorde civile
La constitution du gouvernement
Le parti principal du président algérien actuellement, c’est l’ANP
Les reformes
Rétablir l’autorité de l’état
Les relations avec la France
La négociation avec l’union européenne
Les relations avec le Maroc
Proche Orient: L’Algérie a une position de principe
« La langue française est un butin de guerre »
Alger, 07/11/99 (aps) – Le président de la république, M. Abdelaziz Bouteflika, a accordé, dimanche, un entretien au club de la presse « Europe 1 » dont voici le texte intégral:
Jean pierre El Kabache: M. Le président Bouteflika, bonsoir. Ce club de la presse d’Europe 1 est réalisé en direct de votre palais, le palais présidentiel a Alger. Avec vous une promesse est une promesse, c’est-à-dire qu’elle se tient. Des juillet, nous avions, en effet, fixe ce rendez-vous d’automne a Alger pour « Europe 1 ».
Depuis, il s’en est passe des événements et il s’en passent, qui marquent la renaissance de l’Algérie et son retour sur la scène du monde. Pas de jour sans dénonciation de mauvaises gestion passées, de scandales, sans mise a l’écart et de nouvelles nominations dans l’administration, dans l’armée, bientôt dans la justice. Pas de jour sans soutien extérieur nouveau, le dernier, après celui de la France, est venu jeudi dernier de la commission européenne de Bruxelles.
L’Algérie et l’Europe vont, donc, négocier leur rapprochement.
L’impulsion vient de vous. Le rythme du changement aussi.
Seulement, voilà, de l’autre cote de la Méditerranée on perçoit, en ce moment, un ralentissement, une difficulté a progresser comme des entraves, mis, et par qui, a certains de vos projets, par exemple, la formation du gouvernement qui doit ressembler a l’adhésion large des algériens a votre politique telle que le référendum du 16 septembre l’avait établie. Qui veut ce retard? Vous, vous essayez de passer de la concorde a la croissance économique.
Vous, vous graciez. Vous ouvrez les prisons. Est-ce que l’Algérie s’installe dans la paix, a l’intérieur et a l’extérieur, avec ses voisins.
On sent, par exemple, monter une irritation entre le Maroc et l’Algérie. Vous nous en parlerez M. Le président Bouteflika comme vous évoquerez les rapports avec l’Europe, avec les états du Proche-Orient y compris Israël, et, naturellement, vous traiterez avec nous des relations avec les Français, des relations toujours singulières, passionnelles et, aujourd’hui, plutôt confiantes.
Pour ce club de la presse, trois journalistes éminents m’ont accompagne a Alger. Serge July (Libération), Catherine Pegard (Le Point), Catherine Ney (Europe 1). C’est elle qui ouvre avec vous cette discussion libre dont on attend beaucoup ce soir.
La concorde civile ——————
Question: M. Le président, quelque cinquante jours après le référendum sur la concorde civile qui vous a donne un accord formidable de tous les Algériens, il y a encore aujourd’hui des attentats, – presque tous les jours- on peut le lire dans les journaux. Néanmoins, diriez-vous que vous êtes sur la bonne voie d’une sécurité recouvrée?
Réponse: absolument, absolument. Les aspects idéologiques et politiques de la violence ont été traites depuis mon arrivée au pouvoir. Ils sont en cours de traitement. Je pense même qu’il y a eu quelques fuites dans la presse et j’ai vu même un semblant de calendrier comme cela. Il n’en demeure pas moins que cette tragédie qui aura bientôt dure une décennie a sécrété une forme de délinquance dans le pays ou vraiment les égorgeurs d’enfants et de femmes n’ont absolument rien a voir avec les partis islamistes ou les intégristes.
C’est vraiment des bandits de grands chemins.
Question: Vous les appelez comme des bandits?
Réponse: Absolument, je tiens a vous dire très clairement qu’Amnesty international ou les droits de l’homme, ou n’importe qui n’empêchera pas les services de sécurité algériens et l’armée algérienne de faire ce qui doit être fait.
Question: Apres le 13 janvier?
Réponse: Apres le 13 janvier.
Question: C’est-à-dire la date qui a été donnée par le référendum?
Réponse: Ca, c’est tout a fait clair. Et ca c’est pour les droits de l’homme. Mais les droits aussi de la société ca fait partie des droits de l’homme.
Question: M. Le président, vous avez fixe le 13 janvier, c’est le délai qui a été donne pour que les égarés – comme que je crois l’expression a été utilisée- déposent les armes?
Réponse: J’ai dit ceux dont le chemin s’est égaré.
Question: Qu’est-ce qui vous est apparu finalement depuis que vous êtes au pouvoir comme plus difficile que prévu? Vous avez annonce plusieurs fois des dates pour la formation du gouvernement et a chaque fois vous les avez reportées. Est-ce que c’était plus difficile que prévu?
Réponse: Non, en aucune manière. D’abord les problèmes de l’Algérie sont beaucoup plus difficiles que ce que je pensais. Ca c’est un premier point. Il faut le noter.
Question: Faire le diagnostic. Vous aviez une vision, tout en étant aussi sombre, plus optimiste.
Réponse: J’avais une vision plus optimiste.
Question: Pardon M. Le président, votre diagnostic n’était pas encore assez pessimiste?
Réponse: (Il) n’était pas assez objectif. Le fait que je sois maintenant dans le bain – si vous permettez l’expression- me donne une vision beaucoup plus claire de la gravite des problèmes a résoudre.
Alors, je voudrai vous dire une chose: il est tout a fait clair que la classe politique de ma génération est relativement dépassée par les événements. La classe montante, c’est tomber de Charybde en Scylla. Et, en réalité…
Question: Ca ne laisse pas beaucoup d’espoir…
Réponse: Non, ce n’est pas que ca ne laisse pas beaucoup d’espoir. Si vous avez un chef, il est la pour régler les problèmes.
La constitution du gouvernement ——————————–
Question: Et, alors en réalité M. Le président qu’est-ce que vous allez faire du point de vue de la constitution de ce gouvernement qui, d’une certaine manière, va incarner votre volonté politique, votre projet ?
Réponse: Non, pas spécialement. Je suis oblige de tenir compte du fait qu’il y a tout de même, quatre partis de la coalition qui m’ont soutenu. Ce qui complique la quadrature du cercle. Parce que en fin de compte, moi je ne suis qu’un candidat indépendant. Je bénéficie de l’acquis populaire, c’est un fait. Mais, il se trouve que, pendant la campagne, j’ai été soutenu par quatre partis très importants et qui ont la majorité aux deux chambres du parlement. Par voie de conséquence, je suis oblige de tenir mon contrat d’honneur et, donc, de les faire participer.
Ce n’est pas comme en France ou M. Jospin a une majorité ou en Grande-Bretagne ou Tony Blair a une majorité. Je suis oblige, en fait, d’aller vers une mosaïque qui ne me convient pas pour l’instant. Honnêtement, je veux un gouvernement homogène. Et un gouvernement d’hommes d’état. Parce que le passage de l’économie dirigée a l’économie de marche, c’est qu’en fin de compte, on vous propose, peut-être, un homme d’affaires pour rentrer au gouvernement.
Ca n’est pas ma conception.
Question: vous ne voulez pas un gouvernement de coalition?
Réponse: Si, si. J’irai vers un gouvernement de coalition. Mais, je veillerai a ce que le choix soit très, très minutieux et très précis. Il y a des membres du gouvernement qui font des affaires. Ca ne me convient pas.
Question: Alors, c’est ca qui retarde ?
Réponse: Il n’y a que cela qui retarde et la dépêche de Reuters, c’est moi qui ai donne des ordres a l’APS de la reprendre pour démasquer celui qui l’avait inspirée, et le soir même , j’en avais ri parce que je l’avais démasqué.
Question: Bien que la dépêche de Reuters laissait entendre que c’étaient des généraux, l’armée… Etc.
Réponse: Oui, mais il faut vous dire ici que la liberté de la presse fait que nous nous accommodons d’un certain nombre d’inepties.
Question: Vous auriez déclaré: je ne nommerais un gouvernement qu’après avoir renforce mon autorité.
Réponse: Absolument.
Question: Donc, est-ce que cela veut dire que le fait que vous ne le nommiez pas aujourd’hui, c’est que votre autorité n’est pas assez forte ?
Réponse: Non, je récupère d’abord mes attributions constitutionnelles qui ont été dispersées a partir de 1989, progressivement, vers le chef du gouvernement, vers le secrétaire général, vers le directeur de cabinet… Etc.
Question: Donc, votre rôle présidentiel…
Réponse: Donc, je reprends – oui absolument, exactement- je reprends votre expression a mon compte. Ce régime algérien, il n’est ni présidentiel, ni parlementaire.
Le président est élu sur la base d’un programme, il nomme un chef du gouvernement qui, lui, présente un programme au parlement. Donc, cela peut être un deuxième programme. Il y a une contradiction immense, immense.
Question: Et pour finir sur ce point, vous présenterez donc quand votre gouvernement?
Réponse: Je vous dirai simplement avant la fin de l’année.
Question: C’est-à-dire avant le 13 janvier. C’est-à-dire en janvier, on commence l’année 2000 avec un gouvernement ?
Réponse: Oui, oui. Ca, très certainement.
Question: Et ce sera un gouvernement remanie ou un nouveau gouvernement Bouteflika ?
Réponse: Je ne voudrai pas trahir ma pensée des maintenant parce que déjà les membres du gouvernement ne font pas grand-chose maintenant.
Question: Sévère pour le gouvernement actuel ?
Réponse: Je suis absolument objectif. Je suis absolument objectif et je joue la transparence.
Question: Mais, alors, vous êtes seul d’une certaine façon avec quelque collaborateurs éminents…
Réponse: Non, j’ai quelques collaborateurs. Il y a quant même des Algériens qui font leur travail. Ce n’est pas un jugement de valeur. Disons que les gens qui ne sont pas surs de rester…
Question:…. Sont démoralisés.
Réponse: Oui, disons qu’ils ne font pas le meilleur, ils ne donnent pas le meilleur de ce qu’ils pourraient donner.
Question: M. Le président vous avez beaucoup dit dans votre compagne que vous étiez seul…
Réponse: Non, non. Quand je formerai mon gouvernement, je serai moins seul. Moins seul, parce que je tacherai quand même de prendre…
Question: … Ca sera le votre ?
Réponse: Oui, je tacherai de prendre quand même quelque gens en qui, disons, j’aurai un peu plus confiance et qui, lorsqu’ils se tromperaient, se tromperaient de bonne foi. Ce qui n’est pas toujours le cas actuellement.
Question: Mais, ca veut dire M. Le président que vous êtes presse d’avoir les vôtres avec vous?
Réponse: Dans une certaine mesure, oui. Mais, dans une certaine autre mesure, non. Pour une raison très simple: c’est que j’ai quelques lois et quelques décrets a changer.
Question: Est-ce que c’est pour toutes ces raisons que vous aviez dit l’autre jour que je ne serai jamais un président trois quart. Qui veut faire de vous, en dehors de ce que vous dites des institutions, un président trois quart ou un président a moitié. Qui réclame l’autre partie?
Réponse: Non, personne ne réclame l’autre partie. Mais, le journaliste qui était en train de me poser la Question me posait la Question de façon un peu tendancieuse. Alors, j’ai tenu a faire une mise au point, peut-être un petit peu imagée, mais je dois dire, ce qui vous intéresse a vous Jean Pierre, c’est le fait de savoir si j’ai des problèmes avec l’armée ou pas. Je n’ai pas de problèmes avec l’armée et l’armée est très heureuse de m’avoir avec elle.
Question: Alors, on va un peu prolonger et préciser, parce qu’il n’y a pas que moi qui m’interroge sur ces Questions. Vous avez l’impression qu’il n’y a de généraux qui résistent ou de colonels, j’en sais rien, aux mesures que vous voulez prendre et qui vous empêchent d’agir?
Réponse: En aucune manière. En aucune manière. Vous savez, les généraux avaient un brasier dans les mains. Quand je suis arrive, ils m’ont passe les braises, je les ai prises. C’est moi qui les ai prises. Je n’attends pas de félonie de leur part.
Question: Outre ces braises, vous ont-ils passe aussi la rente économique, le pouvoir économique?
Réponse: La rente économique est dispersée… Ne soyez pas sévère vis-à-vis de l’armée nationale populaire. Elle est dispersée entre toute sorte de gens parce que le monopole d’état qui était sur le commerce extérieur est devenu un monopole de personnes. Et ne soyez pas trop sévère vis-à-vis de l’armée. Il y a peut-être quelques anciens généraux ou quelques generaux, je ne sais pas. Mais enfin, il y a beaucoup de gens, c’est des organisations.
Question: Est-ce que vous avez toujours confiance dans l’armée? Est-ce que l’armée et les généraux qui comptent ont toujours confiance dans le président Bouteflika?
Réponse: Plus que jamais. Plus que jamais.
Le parti principal du président algérien actuellement, c’est l’ANP
Question: Donc, de ce cote-la, il n’y a pas de tension ou d’épreuve de force, vous le dites solennellement, toujours en cherchant la transparence, comme vous le dites?
Réponse: Absolument. Je tiens a vous rassurer complètement. Et j’ajoute ceci, c’est que très probablement, je voudrais même vous dire que le parti principal du président algérien actuellement, c’est l’ANP.
Question: Ca fait un régime quand même très particulier.
Réponse: Ca ne fait pas. Non, non, non. Ni présidentiel ni militaire, ni rien du tout. Il n’ y a pas de pays au monde, je dis bien même en France, qui ne tienne compte du fait de l’existence et de ce que pense la grande muette. Bon, il se trouve que dans ce cas précis, la grande muette m’est très favorable.
Question: Faites-la parler, alors.
Réponse: En aucune manière. Il n’y a que moi qui ai le droit a la parole.
Question: C’est-à-dire le pouvoir civil?
Réponse: C’est le pouvoir civil et le pouvoir militaire. L’armée, l’ANP est une institution de la république qui est sous l’autorité du chef suprême des forces armées, qui est ministre de la défense nationale, en plus. C’est tout a fait clair.
Question: Vous avez évoqué, M. Le président, je vous cite: « l’armée a joue exceptionnellement, et bien malgré elle, un rôle de sécurité, de police, mais cela doit s’interrompre ».
Réponse: Elle continue a le faire. Je lui dirai de s’arrêter quand les problèmes seront réglés. Mais les problèmes ne sont pas complètement réglés.
Question: A ce moment la l’armée rentrera dans ses casernes?
Réponse: Absolument, absolument. Elle deviendra une armée professionnelle, une armée de métier.
Question: Et cela en quel laps de temps? Fin de l’année?
Réponse: Vous savez, la reconversion d’une armée nationale populaire en armée de métier, c’est quelque chose qui demande entre cinq et dix ans minimum. Mais, les études, les écoles etc…sont déjà, en voie de préparation.
Question: Il y a deux Questions qui sont liées a cela, M. Le président. S’il est prouve que des militaires n’ont pas fait tout leur devoir ou ont commis des excès. Est-ce qu’ils auront eux aussi, affaire a la justice comme tout le monde?
Réponse: Vous pouvez le prouver?
Question: Non, j’ai dit, s’ils ont commis des excès.
Réponse: Non. Est-ce que vous avez des preuves contre qui que ce soit? Je suis prêt a le traduire en justice. Mais je n’aime pas les tracts et je n’aime pas ce que Internet fait a partir de déserteurs de l’armée. Enfin, je trouve que c’est quand même , aussi valable que la lettre anonyme.
Question: La deuxième Question, les anciens terroristes, vous souhaitez qu’ils deviennent peu a peu, des citoyens comme les autres.
Est-ce qu’ils peuvent devenir aussi, des soldats comme les autres? Est-ce que l’aile armée du fis sera un jour intégrée avec l’accord de l’armée ou a la demande l’armée, dans l’armée algérienne?
Réponse: Je ne l’exclus pas.
Question: Est-ce que c’est un élément de l’accord avec l’ais?
Réponse: Non. Non. J’avais dit il y a très longtemps, que j’avais divise le problème en trois catégories: ceux qui voulaient rentrer chez eux, ceux qui essaient dans les prisons et qui n’avaient pas commis de viol, de meurtre, de crime de sang ou déposé des explosifs dans des lieux publics, que j’ai libérés. J’ai dit une fois, que je n’avais plus personne a gracier. En vérité, je n’avais vu que la liste des prisonniers étrangers qui étaient tous coupables d’histoire de drogue etc… Sur lesquelles je ne donne pas de grâce.
Donc, ca n’est pas une contradiction. Quand on m’a apporte les autres listes, j’ai gracie, vous l’avez remarque. La troisième catégorie est une catégorie qui est absolument immune, si vous voulez, de toute responsabilité dans des crimes de sang et dans les crimes qui sont cites par la loi sur la concorde civile. Par voie de conséquence, il y a des jeunes qui veulent servir leur pays en, disent-ils, voulant restaurer l’image de l’Algérie parce que les terroristes leur ont vole leur cause pour la travestir, et en même temps pour restaurer l’image de l’islam qui est devenue intégriste.
Question: Alors, aujourd’hui, personne n’est intègre, au jour d’aujourd’hui ?
Réponse: Au jour d’aujourd’hui, personne n’est intègre.
Question: Aucun élément de l’ais, par exemple ?
Réponse: Mais, je peux vous donner en scoop qu’il y a des breakfast quotidiens entre les uns et les autres. C’est-à-dire…
Question: … Qu’il y a déjà de l’intimité ?
Réponse: Non, il y a une très grande fluidité de relations.
Question: … Entre l’armée, entre les forces de sécurité et…
Réponse: Oui, absolument.
Question: En tout cas, cette partie-la ne commet plus de violence, ne tue plus?
Réponse: Non, depuis 1997, elle ne le fait pas. Moi, je n’ai apporte qu’une seule chose, c’est de donner une couverture juridique et une couverture politique.
Question: est-ce que vous trouveriez normal que ceux qui auraient demande pardon en janvier, puissent former un nouveau parti?
Réponse: Non. Non, le fis est termine et il faudrait peut-être, dire que si le fis est une réaction a une situation de corruption et de destruction de l’Algérie, son intervention et la manière dont il est intervenu sur la scène politique, a fait encore plus de mal a l’Algérie que ceux qui avaient déjà fait du mal dans les années 80 a l’Algérie. Alors, qu’on ne cherche pas a se présenter ici, avec un visage serein, de donneur de leçons. Plus personne n’est bien place aujourd’hui pour donner des leçons a qui que ce soit.
Question: Donc, le fis ne participera pas a un futur gouvernement?
Réponse: En aucune manière. Il n’existe pas.
Question: Tout a l’heure vous disiez que vous n’êtes pas comme dans la situation de Tony Blair ou Lionel Jospin avec une majorité a vous. Est-ce que pour en avoir une, vous pourriez recourir, dans un temps prochain, a des élections générales.
Réponse: ah, a chaque temps sa politique. Pour l’instant, je suis oblige de faire la politique que dictent les données objectives dans lesquelles je me trouve.
Question: M. Le président, c’est-à-dire, vous, vous attendrez combien de temps ?
Réponse: je vous ai dit que d’ici a la fin de l’année, vous aurez un gouvernement. Si c’est le gouvernement qui vous intéresse.
Les reformes ————
Question: Je suppose, M. Le président, que c’est un gouvernement pour faire des reformes très importantes. Les Algériens attendent des reformes fondamentales.
Réponse: …Des reformes très importantes.
Question: Et vous savez déjà qui vous nommerez ?
Réponse: Disons a 50 pour cent.
Question: Et ils en sont avertis ?
Réponse : Non.
Question: ca sera la surprise de Noël ?
Réponse: Je n’ai pas de confidents.
Question: Vous avez limoge récemment des hauts fonctionnaires, une vingtaine de généraux, on dit bientôt des magistrats.
Réponse: Je n’ai pas limoge de généraux.
Question: Vous les avez mis a l’écart, ils sont partis a la retraite ?
Réponse: Non, il y a des mouvements tout a fait normaux. Au niveau de l’armée, il n’y a pas eu de mouvement. Il y a eu des mouvements entre les régions.
Question: Des magistrats qui s’attendent a … Dans cette lutte que vous menez contre l’incompétence ?
Réponse: Ecoutez, moi je voudrai vous dire quelque chose sur les magistrats et la justice. Notre système n’est ni plus mauvais ni meilleur qu’un autre. Notre problème a nous c’est le problème des magistrats. Vous avez un jeune homme ou une jeune fille qui sort avec une licence en droit, avec un système éducatif relativement détérioré et avant ils ne faisaient qu’une année de stage, maintenant ils font deux années de stage. Apres cela, ils sont nommes magistrats et pour juger d’affaires extrêmement graves. Alors, moi je considère que si reforme il y a, c’est de former des magistrats. Donc, j’irai vers une formule ou les gens doivent avoir des diplômes beaucoup plus solides qu’une licence de droit, un concours pour accéder a l’école et la durée de formation sera beaucoup plus longue. J’ai besoin de magistrats. Ce n’est pas le système judiciaire qui n’est pas bon.
Rétablir l’autorité de l’état —————————–
Question: Vous nous avez dit tout a l’heure que lorsque vous étiez candidat, vous étiez plus optimiste sur la situation algérienne et maintenant vous êtes au pouvoir, vous êtes beaucoup plus pessimiste. Alors quel constat avez vous fait?
Réponse: Le constat que j’ai fait, c’est que de façon tout a fait légale, c’est-à-dire par voie de lois, de décrets, etc., on a mis le pays en coupe réglée. Et je suis oblige de faire le chemin inverse, c’est-à-dire d’enlever progressivement un certain nombre de décrets, de lois, pour rétablir l’autorité de l’état. Si les monopoles dont je parlais tout a l’heure – qui étaient des monopoles d’état- sont devenus des monopoles de personnes, ceci ne s’est pas fait illégalement, ca a été fait en fonction de lois qui existent.
Je ne peux poursuivre personne. Je suis oblige de démanteler ce système légal qui a été mis en place pour rétablir une situation saine.
Question: Ca a commence comment cette destruction ?
Réponse: Oh, moi je crois que ca a commence par ce que je n’hésiterais pas a appeler la politique des rois fainéants. Les rois fainéants sont venus s’installer pour régner tout en ayant l’impression de gouverner. Et la constitution de 1989 en particulier, plus que celle-ci, était une constitution de type présidentiel.
D’ailleurs, c’était la constitution de 1976 qui était complètement présidentielle, parce qu’en 1989, il y a eu une deuxième constitution. La constitution de 1976, est la constitution de Boumediene. Elle était complètement de type présidentiel.
Question: Et ses successeurs l’ont vidée ?
Réponse: Je vous dis qu’elle était de type présidentiel au point que je peux dire que le président Boumediene avait tous les pouvoirs de franco. Mais son successeur en ayant les pouvoirs de franco s’est comporte exactement comme la reine d’Angleterre.
Question: Vous montrez bien ce qui va mal a la tête de l’état. Et dans la base de l’état, la société algérienne ?
Réponse: Nous sommes passes par une période de troubles. Les élections se sont passées dans cette période de troubles. Personne ne peut vous dire que ca a été transparent comme de l’eau de roche mais personne ne peut vous dire qu’il y a eu fraude a 100 %. Ce qui est absolument certain, c’est que pour le citoyen normal, l’état commence au niveau de la mairie, de la municipalité et le citoyen ne se sent pas représente au milieu de la municipalité. Par voie de conséquence, si vous voulez, il y a tout un système qui fait que du sommet a la base, il y a eu ce que Marx et Lenine auraient appelé le dépérissement de l’état que nous avons réussi de façon absolument extraordinaire mais nous ne pouvons pas donner la recette.
Question: Vous diriez que le pays est a refaire? Vous diriez que l’Algérie est a refaire?
Réponse: Disons que l’Algérie pour entrer dans le 21-eme siècle est a refaire.
Les relations avec la France —————————-
Question: Est-ce qu’on peut parler maintenant M. Le président des relations avec la France. Vous avez une partie de votre bilan, c’est la fin de la mise en quarantaine de l’Algérie sur le plan international. Est-ce que vous jugez que la France est un peu frileuse dans ce contexte ?
Réponse: Je crois. Moins frileuse qu’avant mais toujours frileuse de mon point de vue. J’ai des partenaires méditerranéens, tels que l’Italie et l’Espagne, qui sont beaucoup plus agressifs et beaucoup plus dynamiques et les Américains marquent un intérêt de plus en plus important vis-à-vis de la région maghrébine de façon générale et de l’Algérie de façon particulière. Ce qui fait que de mon point de vue, il y a des choses qui se font avec la France et c’est tant mieux mais ce ne se fait pas au rythme voulu en tous cas par l’Algérie.
Question: Mais ca, c’est les investisseurs, les chefs d’entreprises, les industriels, ou ce sont aussi les politiques?
Réponse: Au niveau politique, il y a beaucoup de contacts et je dois dire personnellement que je suis très heureux de voir que l’Algérie ne laisse pas indifférent ni la gauche, ni la droite. Nous recevons beaucoup de gens, aussi bien au niveau de maires, des préfets, qu’au niveau des responsables importants et au niveau des partis…
Question: Il y a eu un accord entre les villes d’Alger et de Marseille. Vous avez vu M. Vedrine, vous avez vu le président de la république et M. Jospin. Comment vous les avez trouves a l’égard de l’Algérie et a votre égard ? Est-ce qu’il y a un regain d’intérêt, est-ce qu’il y a les chances d’un renouveau des rapports entre paris et Alger et est-ce qu’il y une date qui est fixée pour le voyage de Lionel Jospin ?
Réponse: Nous n’avons pas fixe de date mais si il me donne une date…
Question: Mais pour l’instant il n’y a pas de date fixée ?
Réponse: Ni d’un cote ni de l’autre.
Question: Mais est-ce que vous avez le sentiment qu’ils vous comprennent ?
Réponse: Moi je crois que si. Moi je crois que si, parce que je pense que lorsque je dis a la France: je ne peux pas accepter le concept de souveraineté limitée, je parle en bon français et il serait très difficile de ne pas me comprendre. Et je crois qu’aussi bien au niveau du président de la république que de M. Jospin qui est un ami de très longue date – je le connais depuis qu’il était dans l’opposition avec le président Mitterand – nous avons eu un entretien extrêmement sérieux, extrêmement important a New-York. Je crois vraiment que le courant passe avec M. Chevenement, avec M. Vedrine.
Bon, je crois que ca va. Ca ne va pas tout a fait au rythme que j’aurais souhaite mais ca va. Je n’ai pas a me plaindre.
Question: Justement, je voulais vous parler du rythme de l’amélioration des relations avec la France et j’avais le sentiment que vous étiez un petit déçu mais vous avez répondu vous-même a la Question mais j’avais quand même le sentiment que vous étiez un petit peu déçu et que vous pensiez que la France était encore un peu trop absente, que vous pensiez que ca irait avec la France qu’avec l’Italie ou avec l’Espagne ?
Réponse: Je pensais qu’en étant sur la même ligne, personne ne pouvait gagner la France sur un 100 mètres quand il s’agit de l’Algérie. Mais Perec n’est pas toujours la.
Question: Dans votre esprit quand vous avez évoqué l’idée d’un plan Marshall pour le redressement économique de l’Algérie, la France était appelée a jouer un rôle très important ?
Réponse: C’est tout a fait clair que la France aurait pu jouer un rôle moteur et ce problème se pose aussi bien avec l’Europe d’un cote qu’avec les Etats-Unis: le plan Eisenstat. Il est tout a fait clair que les pays du Maghreb ont besoin de sentir que cette nouvelle approche de la sécurité européenne et qui devient euro-mediterraneenne, ne fasse pas des pays de la rive sud de la Méditerranée les parents pauvres…nous voulons être des partenaires a part entière. Nous sommes fatigues d’être des observateurs. Et j’ajoute ceci, c’est que nous avons la frustration, pour ce qui est algériens en tous cas, d’avoir été franchement amenés a faire deux guerres mondiales qui nous ont rien rapporte et dans lesquelles nous n’avons rien a voir.
La négociation avec l’union européenne ————————————–
Question: Et le voyage de la commission européenne de Bruxelles, son séjour ici, la décision d’ouvrir des négociations avec l’Algérie.
Apparemment, ca c’est bien passe: on soutient votre processus de réconciliation. Vous trouvez que ce sont des étapes qui ramènent l’Algérie au milieu de toutes les nations souveraines et dynamiques?
Réponse: De toutes les façons, il faudrait vous dire une chose: l’Algérie est la. Et l’Algérie a toujours été la. L’Algérie antique a toujours existé. Il y a eu beaucoup de passagers, d’envahisseurs et de choses… L’Algérie a toujours été la, a toujours été la. Que l’on ait un instant imagine de la mettre en quarantaine, je pense que c’était la mode mais une mode pas toujours très élégante. Parce que, c’était concomitant de l’affaire de l’Irak avec laquelle nous n’avons rien a voir. Et concomitant de l’affaire Lockerbie avec laquelle nous n’avons rien a voir. Donc, en fin de compte, il était absolument immoral de voir un pays qui vit de principes comme la France critiquer par exemple les Etats-Unis pour telle ou telle autre politique en ce qui concerne les deux poids et deux mesures, et elle même pratiquait la politique des deux poids et deux mesures. Bon, l’Europe a marche a cause de ce que l’on appelle l’Europe actuelle et il se trouve que l’on a appelé cela de la solidarité intelligente.
Moi, je trouve que c’est former des coalitions pas très intelligentes contre les petits pays.
Question: Mais cette période la, on en sort, vous l’avez dit tout a l’heure?
Réponse: Il fallu se battre beaucoup.
Question: Et par exemple la, c’est fini ?
Réponse: C’est en voie de… C’est pas fini, c’est en voie de…
Mais nous payerons le prix. C’est tout a fait clair et nos partenaires savent que nous sommes capables de payer le prix.
Question: Ca veut dire quoi payer le prix ?
Réponse: Nous avons arrache notre indépendance les armes a la main. Il est tout a fait clair que personne ne peut négocier avec nous de nouveau notre souveraineté nationale.
Question: M. Bouteflika, est-ce que vous visez dans cette remarque la négociation avec l’union européenne, sur le fait que l’union européenne vous dit qu’il n’y aura aucun favoritisme pour l’Algérie, alors que vous, vous demandez le fait qu’il y ait une spécificité?
Réponse: il y aura la spécificité. Il y aura la spécificité pour une raison très simple, c’est que le Maroc ne peut pas vendre le marche algérien pas plus que la Tunisie n’a le droit de vendre le marche algérien. Il y a spécificité algérienne. La complexité industrielle se trouve en Algérie et les potentialités économiques se trouvent en Algérie. Il y aura spécificité, je tiens a vous le dire.
Question: M. Le président, il y a eu la négociation entre l’union européenne et Israël par exemple pour la création d’une zone de libre échange. Il n’y a pas eu de favoritisme en ce qui concerne Israël?
Réponse: Ah, vous savez, Israël n’a pas la position de l’Algérie vis-à-vis de l’Europe. L’Algérie est aux portes de l’Europe. Israël a d’autres atouts. Mais l’Algérie a aussi ses propres atouts.
Question: Vous avez des engagements précis de l’union européenne sur cette Question?
Réponse: Il est tout a fait clair que seules les négociations nous permettront de savoir vers quelle situation s’acheminent les choses. Ce qui est absolument certain, c’est que nous ne signerons pas n’importe quoi.
Question: Avec la rente pétrolière qui augmente avec le prix du pétrole, vous vous sentez plus fort dans les négociations et pour dire l’Algérie existe?
Réponse: Non. Je suis de ceux qui pensent qu’il faudrait créer une économie de substitution qui vienne suppléer progressivement la rente pétrolière. Les Algériens ont appris a vivre sur la rente pétrolière. Ca ne leur a pas fait beaucoup de bien en ce qui concerne la capacité de créer, de produire et de travailler. Il est tout a fait clair qu’il faut chercher d’autres champs d’action économique, tels que l’agriculture, l’industrie, le partenariat, etc, et la rente pétrolière ne serait qu’un complément dans mon esprit. Elle est la bien venue bien sur mais un complément.
Les relations avec le Maroc —————————
Question: On avait le sentiment que vos relations s’étaient améliorées avec le Maroc et puis on a l’impression maintenant d’un grand refroidissement et peut-être que les déclarations que l’on a entendues ces jours-ci sur le Sahara occidental ne sont pas pour rien dans cette affaire. Est-ce que vous pouvez nous donner votre sentiment?
Réponse: Disons qu’avec feu Hassan II que dieu ait son âme, que je connais depuis 1959, il y avait une fluidité dans les relations parce que nous nous connaissions. Nous nous sommes connu en dehors…
Moi, en tous cas j’étais en dehors du pouvoir, j’étais officier de l’Aln et lui était chef d’état-major de son armée. Ensuite, il a été roi et nous avons travaille ensemble. Nous nous connaissions beaucoup, nous étions des amis et quelques fois, disons que nos rapports ont été marques beaucoup plus par le dépit amoureux que par une inimitié véritable. Il a disparu et je voudrais souligner qu’au moment ou l’Algérie et le Maroc ont été sur le point de régler leurs problèmes, il y a eu disparition du président Boumediene. Une deuxième fois au moment ou le Maroc et l’Algérie ont été sur le point de régler leurs problèmes, il y a eu disparition de sa majesté Hassan II.
Donc, nous sommes dans une situation ou je crois d’un cote comme de l’autre, les dirigeants des deux pays ne se connaissent pas et par voie de conséquence ne savent pas communiquer encore.
Question: C’est-à-dire, vous voulez voir le nouveau roi du Maroc Mohamed VI ?
Réponse: Non, non, non. Je ne suis pas partisan de la politique de la pastilla. Moi, j’ai des dossiers, j’ai des commissions. Il faut qu’on me prépare des dossiers et il faut absolument que je sois sur de ce que je vais signer et de ce que je ne vais pas signer. Je ne commence pas par les « bousboussade » et les embrassades pour terminer dans l’oubli des intérêts supérieurs de mon pays. Vous avez parle du Sahara occidental…
Question: Parce que la, il y a un blocage et une tension?
Réponse: Non, il n’y a pas blocage et tension. Il n’y a pas tension avec l’Algérie. Je voudrais simplement vous faire constater que, d’année en année, le Maroc est en train de renvoyer le référendum. C’est a vous, mes amis journalistes, de répondre. Je crois savoir que les Sahraouis, eux, sont prêts a aller au référendum.
Alors pourquoi le Maroc renvoie. Mais, ca ce n’est pas mon problème.
Mon problème, c’est que l’application des résolutions des Nations Unies, selon les accords de Houston, soit respectée.
Question: Mais c’est les Nations Unies qui ont demande un retard de quelques dizaines de mois, c’est-à-dire en 2002. Le système des recours…
Réponse: Les Nations Unies ne font pas que de bonnes choses je dois vous le dire. Je ne dirais pas jusqu’à reprendre le général qui disait le machin, mais enfin les Nations Unies ne font pas que de bonnes choses.
Question: Mais alors la, est-ce qu’il faut pour que le Maroc et l’Algérie travaillent ensemble une médiation de quelqu’un, de Kofi Annan, de l’Europe et de la France ?
Réponse: Non. C’est un problème d’abord maroco-sahraoui et si le référendum est applique, moi je peux tout de suite vous donner une lettre écrite disant que l’Algérie s’engage a reconnaître les résultats du référendum quels que soient ces résultats. Si par contre, on y allait par une voie non référendaire, c’est-à-dire non conforme a la charte des Nations-Unies et aux résolutions des Nations-Unies, l’Algérie est partie prenante.
Question: Mais apparemment, il y a eu un sommet franco-marocain – c’était lors du voyage de Jospin au Maroc- qui a évoqué la Question du Sahara et on a cru comprendre de la part des Français qu’ils déclaraient que ce n’est techniquement pas prêt de faire ce référendum.
Réponse: Ecoutez la politique de la France, je n’en suis pas responsable. La France a le droit de penser ce qu’elle veut. Mais enfin elle me laisse le droit de penser ce que je veux. Moi je crois que c’est reculer une échéance de laquelle ils ont peur, tout simplement.
Question: Et vous vouliez ouvrir les frontières entre les deux pays. Vous vous rappelez, en juillet, vous disiez peut-être?
Réponse: Non. Je ne suis pas prêt.
Question: Aujourd’hui, non?
Réponse: Non, non.
Proche Orient: L’Algérie a une position de principe ——————————————
Question: Est-ce qu’on peut parler a M. Président Bouteflika d’Israël. Vous disiez, il peut y avoir des relations avec Israël a condition que l’état d’Israël et sa nouvelle équipe, Barak, tienne ses promesses. Or, il est en train d’appliquer les accords prévus avec Arafat, il cherche la négociation avec la Syrie. Est-ce que vous voyez la, si ca marche encore dans ce sens, la possibilité d’une normalisation comme d’autre pays du proche orient avec l’état d’Israël?
Réponse: Vous me donner l’occasion de vous dire très franchement et très amicalement que l’équation a été inversée. Autrefois, Israël recherchait la reconnaissance des pays arabes. Actuellement, ce sont les pays arabes dont les territoires sont occupes qui recherchent la souveraineté sur leurs territoires par Israël. Donc, l’équation a été politiquement complètement inversée. L’Algérie n’est pas un pays de la région. L’Algérie a une position de principe qu’elle a défendue autrefois au Vietnam, en Afrique du sud, dans les problèmes de décolonisation, au Chili. Vous connaissez la politique de l’Algérie.
Dans ce cas précis, pour nous le problème palestinien est un problème de libération nationale. Israël est un état qui existe au Moyen-Orient. Il doit, je dis bien, il doit évacuer le Golan qui est syrien. Il doit, sans conditions préalables, évacuer le sud du Liban.
Question: Et la Syrie doit évacuer le Liban ?
Réponse: Ca c’est un problème entre la Syrie et le Liban. Un problème arabo-arabe. Tout a l’heure on venait d’évoquer un problème arabo-arabe, comme le Maroc et l’Algérie, c’est peut-être moins passionnel. Et ils doivent donner aux Palestiniens le droit d’avoir leur état selon le processus de Madrid. Parce qu’on a commence a Madrid avec une vision particulière et on est a Wye River et a Charm Echeikh et a Oslo et a chaque fois on change des virgules qui changent complètement le sens des choses. Il faut noter que l’équation est inversée et que les Israéliens doivent savoir qu’il n’est plus Question de jouer le rôle de persécuté. C’est eux qui occupent les territoires arabes. Personne ne parle de leur reconnaissance, c’est a eux de reconnaître la souveraineté arabe sur les territoires arabes.
Question: Tant que ce n’est pas fait, il n’y a pas de normalisation ?
Réponse: Ni directe, ni indirecte.
Question: Pas de contacts ?
Réponse: Non plus. Non plus.
Question: C’est-à-dire, vous en avez fait une condition absolue?
Réponse: Ce n’est pas une condition absolue. Je ne veux pas que l’on fasse dans la conduction des genres. Je peux avoir des rapports avec vous M. July pour régler un problème. Mais si je vois que vous vous servez de moi pour isoler Jean-Pierre El-Kabache, je dis M. July, écoutez… J’essaye simplement de vous dire que les Israéliens ne se serviront pas de moi pour isoler ni la Syrie, ni le Liban, ni les Palestiniens.
Question: Mais diriez vous qu’Israël est un persécuteur ?
Réponse: Moi je ne dirais pas, je dis tout simplement qu’Israël n’a plus le droit de jouer les persécutés pour une raison très simple: c’est la seule puissance atomique de la région. Enfin, il ne faut pas me raconter des histoires.
Question: Est-ce qu’on peut revenir un peu a vos relations avec la France M. Bouteflika. Qu’est-ce que vous aimeriez comme initiative. Est-ce que vous aimeriez quelque chose qui vienne de la France officielle ou de la société française. Je veux dire du retour ou des voyages d’artistes et d’intellectuels, de musiciens, d’économistes, de correspondants de journaux français ?
Réponse: Moi, je crois qu’il ne faut négliger aucun secteur. Moi, je voudrais avoir des relations complètes, exhaustives, totales.
Question: Constantes?
Réponse: Constantes. L’Algérie et la France ont des relations privilégiées, il faut savoir les assumer. Mais il faudrait peut-être que je dise quelque chose. Jean-Pierre El-Kabache, vous vous étiez venu, moi je me rappelle j’étais ministre de la jeunesse, et vous étiez venu me dire: voilà, je vais quitter l’Algérie, je vais aller en France…
Question: Vous me racontez mes souvenirs ?
Réponse: Non, non. J’essaye simplement de vous dire qu’il y a Français d’Algérie et Français d’Algérie. D’autres sont partis parce qu’ils étaient oas. Ne sont bien venus que ceux qui n’ont pas été oas. Il faut que ce soit très clair.
Question: Et il est clair aussi que c’est ceux-la qui ont envie peut-être de venir ?
Réponse: Non. Moi je ne suis pas contre mais je leur dirais tout simplement que les conditions ne sont pas réunies. Ca, je dois le dire très franchement. Mais les Français par exemple qui sont partis parce qu’il y avait une psychose de peur ou de…, He bien, ils sont les bien venus.
Question: Il n’ont plus a avoir peur ?
Réponse: En aucune manière. Je m’engage a assurer leur sécurité.
Question: On peut se promener dans Alger ou dans n’importe quelle ville sans être…
Réponse: Absolument. Ils peuvent aller ou ils veulent et je ferais en sorte qu’ils soient traites comme des frères, des amis et d’anciens Algériens.
Question: Monsieur le président, je crois que la Question de Jean-Pierre El-kabache était plus vaste, sur les relations entre les Algériens et les Français. Dans la Question de Jean-Pierre El-kabache, il y avait l’idée que les correspondants de presse française puissent revenir exercer leur fonction en Algérie ?
Réponse: Absolument. La preuve M. July vous êtes la. Tout a l’heure en posant une Question comme ca sur Bedjaoui, je sais que nous avions parle autrefois avant que vous ne créiez « Libération » et je connais la ligne éditoriale de votre journal. Je ne pense pas que ce soit la même ligne éditoriale en ce qui concerne l’Algérie dont on avait parle autrefois.
Question: Il y aura des discussions et des règlements de compte après, hors micro.
Réponse: Je ne règle pas des comptes. J’essaye simplement de dire qu’en fin de compte s’il y a des situations qui se sont créées a cause de la tragédie nationale, c’est parce qu’on a pris fait et cause pour telle école contre les autres.
Question: La Réponse en général M. Le président. Est-ce que le retour des correspondants de presse et pas un journal en particulier…
Réponse: Je suis attaqué dans la presse algérienne parce que, de temps en temps, je m’exprime en français ou, dans un forum international, je m’exprime en français. La langue nationale et officielle dans mon pays est l’arabe. N’ayant absolument rien a envier en ce qui concerne la connaissance de langue arabe a qui que ce soit, je me sens plus a l’aise pour parler en français quand je veux. Et je continuerai.
« La langue française est un butin de guerre » ——————————————–
Question: Et vous continuerez quand vous serez a Monaco dans quelque jours ?
Réponse: Il est tout a fait clair que, pour ce qui est de la politique algérienne, nous ouvrirons les portes de la même manière que nous ouvrirons les porte au livre arabe, nous ouvrirons les portes au livre français et au livre anglais… Etc. Mais, je voudrai reprendre a mon compte l’expression de Malek Haddad qui disait que « la langue française est un butin de guerre ». Et qu’en aucune manière je ne voudrai perdre pour ce qui me concerne. C’est une ouverture immense de l’Algérie sur le monde.
Question: M. Le président, nous allons terminer cette émission. Est-ce que vous sentez autour de vous a la fois l’espoir des Algériens mais, en même temps, une sorte de menace sur vous ?
Réponse: Non. Je ne sens pas de menace et j’ajoute ceci: c’est que je considère qu’un dirigeant lorsqu’il commence a craindre son pays, s’il a un peu de bon sens et un peu de sagesse, il fait mieux de se retirer. Et quand on commence a avoir peur du peuple…
Question: … Et ce n’est pas votre cas ?
Réponse: Non, ce n’est pas mon cas.
Question: L’impatience est violente forcement. Vous dites aux Algériens, il faudra combien de temps pour changer les choses
Réponse: Ecoutez, je voudrais surtout dire aux algériens qu’il ne faut pas qu’ils attendent un miracle céleste. Et je veux que le fonctionnaire fasse son travail, que le paysan fasse son travail et que l’ouvrier fasse son travail et que chacun fasse, du mieux, son travail. Parce que souvent, on me dit comment tu veux qu’on t’aide? D’abord en faisant bien votre travail, en le faisant honnêtement et en étant de bons citoyens. Parce qu’en fin de compte, les algériens, a partir des élections et a partir du 16 septembre, ils attendent le messie. Moi, je ne suis pas le messie. Moi, je ne suis pas le messie.
Je ne peux pas faire des miracles.
Question: Mais, vous avez l’impression que vous avez le temps devant vous ?
Réponse: J’ai le temps que m’impartit l’élection présidentielle. Je pense que je suis encore au début. Mais, je ne pense pas vous avoir donne l’impression d’avoir été un si mauvais élève.
Question: C’est bien, vous n’avez pas dit « si dieu me prête vie », comme disait le général De Gaule.
Réponse: De toutes les façons, vous savez que je suis un homme de foi et que j’évolue dans cette optique.
Question: et le peuple algérien qui a beaucoup souffert, ces dernier temps, de cette tragedie qu’il a vécue etc, aujourd’hui, il espère et même il espère qu’il peut espérer. Est-ce que vous lui donnez raison ?
Réponse: Il doit espérer. Et il est tout a fait clair que s’il se donne la peine de vouloir s’en sortir, il s’en sortira. Je l’aiderai a s’en sortir.
Le journaliste: M. Le président Bouteflika, merci de nous avoir reçus dans votre palais. Merci d’avoir été aussi franc, direct et comme vous l’êtes d’habitude. Bonsoir et merci.
Le président de la république: Merci infiniment