France: Affaire Coutant-Peyre

AFFAIRE COUTANT-PEYRE (avocate de Mohamed Chalabi)

Paris, le 27 janvier 1999

POUR LA DEFENSE DE LA LIBERTE D’EXPRESSION

Le 8 février prochain, à 13 h. 30, Maître Isabelle Coutant-Peyre comparaîtra devant la 17 ème chambre du Tribunal Correctionnel de Paris pour y répondre du délit de diffamation envers la Police Nationale. Le document qui a conduit le Ministère de l’intérieur à déposer plainte est un communiqué en date du 8 septembre 1998, de Me Coutant-Peyre concernant le procès de son client Monsieur Mohamed Chalabi. Elle dénonçait l’infamie des procédés employés par les sections spéciales de la justice française sous prétexte de lutte anti-terroriste, comme vient de le dénoncer la Fédération Internationale des Droits de l’Homme dans son rapport du 20 janvier 1999 (voir libération du 21 janvier 1999). Le rapport des deux avocats qui ont enquêté pendant près d’un an est très alarmant selon Patrick Baudoin président de la FIDH et confirme ce que Me Coutant-Peyre dénonçait au nom de son client dans le communiqué du 8 septembre 1998.

Maître Coutant-Peyre, au nom de son client, a également dénoncé ce qui est de notoriété publique, la pratique des rafles à toute heure du jour et de la nuit contre des familles entières y compris des enfants, ainsi que les brutalités policières et les tortures pendant les gardes à vue, dès qu’il s’agit de musulmans pratiquants.

Nous, défenseurs des libertés publiques et individuelles, des Droits de l’homme et du Citoyen, appelons à un large soutien à Maître Coutant-Peyre, victime d’atteinte à la liberté d’expression dans sa qualité d’avocate et de citoyenne et vous demandons de faire connaître cette affaire autour de vous et d’assister à l’audience du 8 février 13 h. 30 devant la 17 ème chambre.

Ci-joint: le texte de ce communiqué ainsi que celui de l’ordonnance à comparaître.

Ginette Skandrani

 

 

COMMUNIQUE: Pour Mohamed Chalabi

Au travers de se qui se passe dans le nouveau palais de justice de la prison de Fleury Merogis, l’opinion publique commence enfin à se rendre compte de l’infamie des procédés employé par les sections spéciales de la justice française, sous prétexte de lutte anti-terroriste.

Pour les besoins médiatico-politico-démagogiques, nombreux ont été baptisés terroristes ceux qui ont une autre opinion politique que ceux des pouvoirs dominants.

Mais au-delà de ce que certains découvrent dans la phase finale publique des audiences du tribunal, il faut aussi parler de ce qui reste dissimulé dans les coulisses des services de la police politique et des juges spéciaux de la 14 ème section, dont la devise a été fixée par Charles Pasqua « Il faut terroriser les terroristes ». Le même déclarait également dans le même temps « je couvrirai les bavures ».

La chasse étant ouverte, la lutte dite anti-terroriste a obtenu carte blanche pour employer des moyens terroristes contre les cibles désignées par le pouvoir, pour ses propres intérêts politiques ou ceux de ses alliés étrangers.

Ainsi, la pratique des rafles, selon des méthodes dignes de la Gestapo et de la Milice, a toute heure du jour et de la nuit, contre des familles entières y compris les enfants, quitte à les habiller de fausses pièces à conviction (comme ce fut le cas des documents glissés par la DST dans la serviette de Kraouche).

Ainsi, les brutalités et les tortures pendant les gardes à vue de quatre jours, sous le contrôle des juges de la section spéciale.

Ainsi, la mise en détention à l’isolement totale, pendant des mois ou des années, sans aucune charge matérielle réelle, sauf celle d’être « capable de… », pratiquement sans audition judiciaire ni a fortiori de confrontations puisque en France, les prétendus accusateurs restent anonymes, ce que les tribunaux considèrent comme normal!

Ainsi les audiences de jugement, pure formalité, puisque les jeux sont joués d’avance, les présumés « terroristes » étant nécessairement dangereux pour l’ordre public, et le volume des dossiers faisant foi du sérieux des accusations, même s’ils ne sont remplis que de charges fabriqués par les juges d’instruction de la section spéciale, sous forme de question comportant par avance les réponses qui conviennent à leur thèse.

Parmi les cibles désignées d’avance, islamophobie oblige, figure en bonne place, ce qui sont de sang arabe, avec la circonstance aggravante d’appartenir à la nation des musulmans, présumés coupables du délit d’opinion religieuse terroriste.

Mohamed Chalabi, (…), ne reconnaît que le Tawhid, mais il est en droit de réclamer justice, comme les autres victimes du terrorisme policier et judiciaire.

Monsieur Alain Marsaud, membre fondateur et ancien chef de la 14 ème section spéciale considère que la révolte qui gronde contre les méthodes terroristes de ses équipes, constitue « une insulte à la justice de notre pays ».

Plus qu’une insulte les pratiques et les manipulations médiatico policières des sections spéciales anti-terroristes, constituent un crime contre les libertés publiques et individuelles. Il est plus que temps pour la France que cesse cette infamie.

Paris, le 8 septembre 1998
Isabelle Coutant Peyre
Avocat à la Cour
Pour Mohamed Chalabi

 

Ordonnance:

Tribunal de grande instance de Paris

 

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