Le parti d’Ouyahia crée son ONG

Le parti d’Ouyahia crée son ONG

Mohamed Mehdi, Le Quotidien d’Oran, 2 mars 2002

Le RND investit le champ des droits de l’homme. Il a procédé, jeudi à l’hôtel El-Djazaïr, au lancement de son organisation non gouvernementale (ONG) pour la «promotion de la citoyenneté et les droits de l’homme» de manière différente des autres ONG, et compte particulièrement insister sur les «devoirs» des Algériens.

Plusieurs dizaines de personnes étaient invitées au lancement de l’Association algérienne pour la promotion de la citoyenneté et les droits de l’homme (AAPCDH).

13 heures 45. La salle des banquets de l’hôtel El-Djazaïr est à moitié pleine. »On se met là», chuchote un monsieur à ses voisins, leur proposant de changer de place car »ça va passer à la télévision», leur assurait-il. Trois quarts d’heure plus tard, la salle est comble. On aperçoit, parmi les présents, des députés, des sénateurs et des Patriotes du RND, des responsables de quelques entreprises publiques de la capitale, des représentants de plusieurs ambassades. Il y avait également d’autres invités comme le chanteur Mohamed Lamari, des représentants de quelques associations et des corps de la Gendarmerie et la Sûreté nationales.

Prévue à 14 heures, la cérémonie n’a démarré que trois quarts d’heure plus tard. Les organisateurs attendaient la venue de Ahmed Ouyahia, président du RND et ministre de la Justice, et de Abdelhamid Berchiche, ministre de la Jeunesse et des Sports, «membre fondateur» de cette ONG.

La cérémonie commence par une minute de silence. Dans la présentation, M. Osmani qualifie l’AAPCDH »d’association nationale indépendante à caractère social, scientifique et culturel», agréée par le ministère de l’Intérieur le 25 juin 2001. Il lui assigne plusieurs objectifs, dont celui de «la défense des intérêts des victimes du terrorisme» et de «la tragédie nationale», pour désigner les victimes des dépassements des différents corps des services de sécurité, et pour «trouver une solution au problème des disparus». Pour M. Osmani, les Algériens sont appelés à »accomplir leurs devoirs avant de demander leurs droits».

«Loin de tout protocole», M. Ouyahia estime que cette ONG «est un acquis bienvenu pour la société algérienne» et qu’elle «apportera une contribution précieuse à la vigilance pour le respect des droits de l’homme, à la dénonciation des erreurs et des dépassements, à la propagation de la culture des droits de l’homme». Et, sans doute, est-ce là son objectif principal, elle doit faire en sorte que «cette noble valeur soit promue et mise en oeuvre et de moins en moins commercée en politique et surtout en politique politicienne».

Selon le ministre de la Justice, «l’Algérie s’honore, depuis une décennie, d’avoir résolument tranché pour le pluralisme politique et la consécration des libertés et de la démocratie».

Ouyahia place, toutefois, les droits de l’homme dans le contexte de «l’après-11 septembre». «Nous avons souffert, nous avons enterré nos morts, nous avons lutté, nous nous sommes battus pour nous-mêmes et pour d’autres, dans une tragique solitude, dans les vacarmes des procès dont certains ont atteint le seuil de l’insanité», a dit le patron du RND. «Que votre voix s’ajoute et s’affiche d’emblée dans la défense des droits de l’homme, je vous en félicite». Mais, avertit Ouyahia à l’intention des responsables de l’AAPCDH, «sans l’inscrire dans la coquetterie de l’oppositionnisme». Tout naturellement, le ministre de la Justice assure les responsables de l’association de «l’oreille attentive et la disponibilité totale» de son département pour «consolider ensemble et davantage cet Etat de droit que nous voulons».

Invité à prendre la parole, le ministre de la Jeunesse et des Sports, M. Berchiche, ironise sur «la représentativité des partis politiques», dont «4 ou 5 seulement émergent sur les soixante existant». S’adressant au ministre de la Justice, M. Berchiche évoque toutefois la «tendance chez certains magistrats» qui transforment, «de manière involontaire ou par incompétence peut-être, la présomption d’innocence en présomption de culpabilité».

«La preuve de la culpabilité, dit-il, doit être présentée par le ministère public et non pas par l’accusé, à qui l’on demande de fournir la preuve de son innocence». La première action de l’AAPCDH a été de rendre hommage aux «partenaires» de l’ONG, en l’occurrence MM. Ahmed Ouyahia, Abdelhamid Berchiche, le chanteur Mohamed Lamari, Achour Aït Aoudia (représentant de l’association à Tizi-Ouzou), de Toufik, président d’une association de handicapés et, à titre posthume, «au nom de tous les journalistes», à Omar Ouartilane, le journaliste assassiné du journal El-Khabar.

15h 45. Avant d’annoncer la fin de la cérémonie, M. Osmani, président de l’AAPCDH, et comme pour répondre aux «mauvaises langues», précisera que «la totalité des ressources financières de l’association proviennent des contributions de ses membres et de certains sponsors».