Ali Drif est réapparu après 10 jours de garde-à-vue au secret
Observatoire des droits humains en Algérie
Ali Drif est réapparu après 10 jours de garde-à-vue au secret
Alger, Paris, le 10 mars 2005
Ali Drif est réapparu après avoir été retenu pendant 10 jours au secret. Il a été libéré et ne semble pas avoir été maltraité.
Expulsé de France le 26 février 2005, il est arrivé le 27 février au matin par bateau à Alger. Il a été emmené au commissariat central où des témoins l’ont vu et parlé. Lorsque son avocat s’y est rendu 4 jours plus tard, le commissaire a nié que Ali Drif ait été gardé à vue dans ce lieu. Personne ne savait où il se trouvait et il était à craindre qu’il subisse des tortures et ne réapparaisse pas après sa garde-à-vue.
En Algérie, la garde à vue dure officiellement douze jours depuis la promulgation du décret du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion et le terrorisme, et très souvent les personnes enlevées sont transférées dans des lieux secrets où ils subissent des tortures et disparaissent pour quelques semaines, des mois, des années ou pour ne jamais réapparaitre. Le nombre de disparus en Algérie est évalué entre 7000 et 20 000.
Rappel des faits
Ali Drif, 44 ans, marié et père de quatre enfants est ingénieur en informatique. En 1995, il est arrêté sur la base de soupçons avec dix-sept autres personnes pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». Il passe vingt mois, du 13 septembre 1995 au 24 octobre 1997, en détention préventive avant d’être libéré sans jugement. Le 30 juin 1998, finalement, le tribunal correctionnel de Paris le relaxe, faute de preuves matérielles.
Le 22 octobre 1999, la cour d’appel de Paris le condamne cette fois-ci à trois ans de prison et une interdiction définitive du territoire français. Mais il n’a pas été convoqué par le juge d’application des peines pour purger le reste de sa peine de prison. Et depuis sa relaxe, il travaille à Decines, comme entrepreneur en menuiserie.
En septembre 2004, un gendarme à la retraite grille un feu et percute la voiture de M. Drif. Toute la famille est hospitalisée et Ali Drif est convoqué par la police. C’est alors que son dossier judiciaire est réouvert. Il est tout de suite incarcéré, le 20 septembre 2004, sur ordre du Parquet de Paris afin d’effectuer son reliquat de peine. Il devait être libéré samedi 26 février 2005. Son avocat, Me Jacques Debray, avait introduit auparavant un recours auprès de la cour d’appel de Paris pour suspendre l’interdiction de territoire. La décision doit être prise le 24 mars prochain. Entre temps la préfecture de Lyon avait engagé la procédure d’expulsion sans en informer le concerné et son avocat. La police aux frontières (PAF) a extrait le 26 février Ali Drif de la prison deux heures avant sa libération et l’a embarqué sur un bateau à Marseille en direction d’Alger.
Nous nous élevons avec vigueur contre la décision française d’expulsion, exécutée illégalement sans que M. Drif ait pu bénéficier des garanties prévues par la loi. Nous demandons que les autorités françaises lèvent la mesure d’interdiction du territoire, application d’une « double peine » en contradiction avec l’esprit de la loi du 26 novembre 2003, et fondée en l’espèce sur des allégations dont la véracité semble sujette à caution.
Nous demandons que M. Drif, s’il le désire, puisse revenir sans délais en France, où il a sa famille, son travail et toutes ses attaches.