Un énième procès contre des militants se tiendra le 19 juin

Rassemblement de soutien devant le tribunal de Bab El Oued

Un énième procès contre des militants se tiendra le 19 juin

El Watan, 17 juin 2012

Les défenseurs des droits de l’homme appellent à un rassemblement de soutien avec les quatre militants poursuivis en justice par le parquet d’Alger pour «incitation à attroupement».

Ce sit-in se tiendra mardi 19 juin à 13h30, devant le tribunal de Bab El Oued où Yacine Zaid, Abdou Bendjoudi, Othmane Aouameur et Lakhdar Bouzidi doivent comparaître. Ces quatre accusés avaient pris part à un rassemblement de soutien à Abdelkader Kherba, le 26 avril dernier. Ce dernier avait été arrêté lors d’une manifestation de soutien aux greffiers grévistes, puis avait été inculpé et condamné pour le même motif. «Et la boucle est bouclée», ironise maître Noureddine Benissad, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH).

«Après notre arrestation en avril, des observateurs de l’UE pour les élections législatives ont été alertés et dépêchés au commissariat. Les forces de l’ordre nous ont donc relâchés, mais nous avions refusé de signer le PV. Et là, nous apprenons que nous sommes inculpés et passerons directement devant une cour, tout cela pour un délit d’opinion, pour une manifestation pacifique», relate Yacine Zaid, syndicaliste. Selon lui, cette affaire, ainsi que les poursuites et pressions non médiatisées, sont aussi à lier avec l’affaire Tarek Mammeri. «Ils essaient ainsi de museler les voix discordantes et les opinions contradictoires. Le pouvoir balade les militants de commissariats en tribunaux pour les distraire, pour faire diversion», explique M. Zaid.

«Il y a là un véritable harcèlement et un acharnement judiciaire à l’encontre des militants et défenseurs des droits de l’homme. Ce sont des atteintes aux conventions internationales ratifiées par l’Algérie, notamment la convention des droits civils et politiques. Ces principes de liberté d’expression et de rassemblement pacifique sont pourtant intégrés et garantis par la Constitution algérienne», explique maître Benissad. «Comment des droits fondamentaux peuvent-ils se transformer en délits ?», s’interroge-t-il. La LADDH s’inquiète d’ailleurs des graves dérives et autres répressions enregistrées ces derniers mois, tout comme de nombreuses autres associations, réseaux et ONG internationales. Et même les pays membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU ont soulevé, au début du mois de juin, leurs préoccupations quant aux violations des libertés individuelles et collectives dans le pays.

Et qu’ils soient syndicalistes, membres d’un réseau pour la défense des libertés ou encore simples citoyens soucieux d’exprimer leurs opinions librement, les temps sont durs pour la liberté d’expression en Algérie. «Pendant que Medelci jure à Genève, devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, que l’Algérie est terre d’ouverture et de tolérance, la chasse aux militants bat son plein», déplore Yacine Zaid, syndicaliste, qui comparaît «pour la 36e fois devant un juge pour motif de militantisme». Avis partagé par la LADDH. «Il y a un discours officiel qui est somme toute virtuel. Et il y a la réalité, où il n’y a plus de justice, mais des justiciers qui instrumentalisent les lois et le système judiciaire. Raison pour laquelle l’heure est au rassemblement et aux luttes», insiste maître Benissad.

Ghania Lassal