Menace de dissolution de plusieurs organisations de la société civile
Nouvelle loi sur les associations
Menace de dissolution de plusieurs organisations de la société civile
Hadjer Guenanfa, TSA, 11 janvier 2014
Le délai de deux ans accordé aux organisations de la société civile pour se conformer à la nouvelle loi sur les associations prendra fin mardi prochain. À partir de cette date, plusieurs ONG nationales et internationales, n’ayant toujours pas pu se conformer, risquent d’être dissoutes, de quitter le pays ou de rentrer dans la clandestinité.
L’article 70 de la nouvelle loi sur les associations, publiée le 15 janvier 2012, au Journal officiel, est clair à ce sujet : « les associations régulièrement constituées sous l’empire de la loi n° 90-31 du 4 décembre 1990, susvisée, sont tenues de se conformer aux dispositions de la présente loi dans un délai de deux ans (…). Passé ce délai, l’autorité compétente prononce la dissolution des associations concernées ». L’article 46 de la nouvelle loi prévoit trois à six mois de prison et une amende de 100 000 à 300 000 DA pour « tout membre ou dirigeant d’une association, non encore enregistrée, ou non-agréée, suspendue ou dissoute, qui continue à activer en son nom ».
Des entraves à la mise en conformité
En fait, de nombreuses associations se sont échinées, des mois durant, à dénoncer la nouvelle loi depuis sa promulgation. Elles ont fini par entamer des démarches afin de s’y conformer pour continuer à travailler dans la légalité en Algérie. Parmi elles, le Rassemblement action-jeunesse (RAJ). Après avoir fixé la date du 27 juin pour la tenue de l’assemblée générale de conformité, il dépose une demande d’autorisation auprès de la wilaya d’Alger, le 12 juin. Une demande qui restera lettre morte. RAJ fait une deuxième tentative pour tenir son AG le 5 juillet avant de recevoir un avis défavorable. La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme s’était, pratiquement, retrouvée dans la même situation à la fin du mois de juin.
Des difficultés de dépôt du dossier au ministère de l’Intérieur
RAJ a fini par organiser son AG de conformité, le 28 septembre, au sein de son siège. La LADDH l’avait organisée, début décembre, au siège du Mouvement démocratique et social (MDS). Après avoir trouvé une parade à cette première contrainte, ces associations se sont retrouvées face à une autre : obtenir un rendez-vous pour déposer leur dossier au bureau des associations au ministère de l’Intérieur et obtenir le « récépissé de dépôt » devant être « délivré obligatoirement par l’administration concernée » selon la loi. « Pour obtenir un rendez-vous, une ligne directe a été mise à notre disposition par le ministère de l’Intérieur. Mais personne ne répond au téléphone. On a fini par envoyer le dossier, le 8 janvier, par voie de huissier de justice et on a eu un accusé de réception », regrette Aïssa Rahmoune, vice-président de la LADDH. RAJ l’a envoyé par poste.
Départ de la Fondation Friedrich Ebert
Le processus de mise en conformité s’est avéré plus ardu pour les organisations étrangères. L’article 63 du texte, par exemple, souligne que « la demande d’agrément d’une association étrangère doit avoir pour objet la mise en œuvre de dispositions contenues dans un accord entre le gouvernement et le gouvernement du pays d’origine de l’association étrangère, pour la promotion de relations d’amitié et de fraternité (…) ». Une embûche que la Fondation allemande Friedrich Ebert n’a pas pu surmonter. Faute d’accord algéro-allemand d’amitié et de fraternité, elle a fait quelques tentatives visant à créer une association nationale. Sans résultat. Cette fondation décide alors de fermer son bureau à Alger le 30 septembre dernier et de quitter l’Algérie.
Rassemblement devant l’APN pour l’abrogation de la loi
Devant ces difficultés, un collectif constitué de plusieurs organisations de la société civile continuent à se mobiliser pour appeler à l’abrogation de ce nouveau texte qui n’a cessé de susciter, depuis deux ans, des critiques. Ce collectif, dont fait partie la LADDH et RAJ, annonce un rassemblement pour demain, dimanche, devant le siège de l’Assemblée populaire nationale (APN) à Alger. « C’est une loi liberticide qui porte atteinte à l’existence même de la société civile algérienne. Elle reflète dans ses dispositions une volonté manifeste de mettre au pas toute la société », écrit-il dans un communiqué.