Injustement détenus à Guantanamo
Injustement détenus à Guantanamo
Victoire morale de six Algériens
contre la raison d’Etat
Le Quotidien d’Oran, 5 avril 2003
Une nouvelle victoire morale pour les Algériens de Guantanamo livrés, au mépris d’une décision de justice, aux forces américaines par les autorités bosniaques.
La cour bosniaque des droits de l’homme a, de nouveau, confirmé, vendredi, que la décision des autorités bosniaques à l’encontre des Algériens, dont certains avaient la nationalité bosniaque, était une mesure arbitraire. La cour a estimé que la Bosnie-Herzégovine et la Fédération croato-musulmane, l’une des deux entités du pays, ont violé plusieurs articles de la Convention européenne des droits de l’homme, intégrée dans la Constitution bosniaque, relatifs notamment à l’expulsion, à la détention illégale et à l’abolition de la peine de mort, dans le cas de Mustafa Aït Idir et Belkasem Bensayah.
Les deux hommes, ainsi que quatre autres Algériens, connus désormais sous le nom des «six de Guantanamo», étaient accusés, sans preuve, d’avoir eu l’intention de commettre des attentats contre les ambassades américaines et britanniques. Emprisonnés en octobre 2000 à Sarajevo, les six avaient été innocentés par la justice bosniaque, mais les autorités bosniaques, sous pression des Américains, ont organisé un véritable enlèvement à leur sortie de prison et les ont livrés aux Américains qui les ont immédiatement déportés dans la zone de non-droit de Guantanamo.
La cour bosniaque des droits de l’homme a demandé aux autorités bosniaques «de prendre toutes les mesures possibles afin d’éviter que la peine de mort soit prononcée ou mise à exécution» à l’encontre des deux hommes. Elle demande également que Aït Idir et Bensayah perçoivent des indemnités de 7.700 et 5.100 euros pour le préjudice subi. La même décision avait été prise en octobre 2002 par la cour pour les quatre autres Algériens. Ce nouveau jugement conforte les six Algériens injustement incarcérés dans le camp de Guantanamo au nom de la simple raison d’Etat. Au début du mois de janvier dernier, la Cour fédérale de Bosnie avait prononcé un jugement rétablissant la nationalité bosniaque à l’un des six Algériens, en l’occurrence Lakhdar Boumédienne, livrés par les autorités bosniaques. Car dans leur voie de fait contre la justice, les autorités bosniaques avaient pris une mesure de déchéance de la nationalité bosniaque pour certains de ces pensionnaires forcés de l’archipel du non-droit de Guantanamo. Saisie par leurs avocats, la Cour fédérale bosniaque avait considéré que ce précédent était illégal et anticonstitutionnel. C’était cette même cour qui avait innocenté, en janvier 2000, les six Algériens des accusations de terrorisme et ordonné leur mise en liberté. Dans une obéissance aveugle aux Américains, les autorités bosniaques les ont extraits de prison pour les remettre aux Américains. Au nom de la raison d’Etat.
M.Saâdoune