Un caricaturiste sous contrôle judiciaire

Pour «offense au président de la république»

Un caricaturiste sous contrôle judiciaire

Le Soir d’Algérie, 14 novembre 2013

Etre poursuivi pour une caricature non encore parue semble invraisemblable et insensé, l’information quelque peu confuse nécessite quelques éclaircissements.
Exerçant dans le journal de La Voix de l’Oranie pour ses deux versions française et arabe, depuis 2007, en tant que caricaturiste, Ghanem Djamel se retrouve aujourd’hui sous contrôle judiciaire, pour avoir dessiné une caricature portant atteinte au président de la République. Seulement, la caricature n’est pas parue.
Selon une source proche de la direction du journal, les faits sont les suivants : «Il y a, certes, un conflit entre le caricaturiste et le journal, et il y avait des tensions dû à cela. L’une de ses caricatures avait été programmée à la publication et avant la mise sous presse, nous nous sommes aperçus que le caricaturiste s’était permis d’aller changer la caricature par une autre à notre insu.
C’est, alors que nous avons porté plainte contre lui pour tentative de nuire à l’entreprise.»
Pour sa part, Ghanem Djamel s’en défend et donne sa version. «Cette caricature, qui n’était en fait qu’une ébauche, était destinée à des journaux électroniques et non à la publication dans le journal en question avec lequel je suis en conflit, car je n’ai pas été payé pour mes publications dans l’un des deux journaux (dans sa version en arabe) et la somme est importante, j’ai alors déposé plainte contre le journal, d’où ces tensions». Selon le concerné, il est aujourd’hui poursuivi en justice pour tentative de nuire à l’entreprise, abus de confiance et offense au président de la République, d’où la décision de le mettre sous contrôle judiciaire.
Nous avons rencontré, hier, Ghanem Djamel qui venait tout juste de revenir du pointage obligatoire dans le cas de mise sous contrôle judiciaire et a bien voulu nous donner plus d’informations. «La caricature en question a été visionnée par le rédacteur en chef par intérim (puisque tout le monde a accès au réseau du journal) et lorsque le lendemain il m’a questionné sur son contenu, je lui ai expliqué que la caricature n’était pas destinée au journal. L’affaire aurait pu en rester là puisque la caricature n’est pas parue, seulement moi, en parallèle, j’avais déposé plainte contre le journal pour non-paiement de mes dus.
J’ai été alors surpris qu’un mois après ces faits, je suis convoqué par le juge d’instruction qui me signifia la plainte et les chefs d’inculpations.»
Pour sa défense, Ghanem Djamel a demandé au juge d’instruction si le fait de penser et de dessiner était devenu un délit en soi ?
Sans avocat, le caricaturiste qui n’était pas préparé à une telle tournure de la situation, dit être plus serein après l’élan de solidarité qui se tisse autour de lui, venant de ses confrères et compte se défendre jusqu’au bout.
Amel Bentolba