Ali Belhadj : « Les policiers ont reçu des ordres de m’interpeller chaque vendredi »
Hadjer Guenanfa, TSA, 23 janvier 2016
Ancien numéro deux de l’ex-Front islamique du salut (FIS), Ali Belhadj revient dans cet entretien sur son arrestation vendredi dernier et les halakates qu’il avait l’habitude de tenir après chaque prière du vendredi.
Pourquoi avez-vous été arrêté vendredi passé ?
C’est la douzième fois au cours de laquelle on m’empêche d’aller à la mosquée pour la prière du vendredi et pas seulement pour le « mot » (prêche, NDLR) que je prononce après la prière. Ils (les services de sécurité, NDLR) m’ont dit qu’ils ont reçu des ordres. Donc ils m’arrêtent à partir de la prière de Dohr jusqu’à la prière d’al Ichaa sans justification. Ils m’emmènent au commissariat où je refuse de répondre aux questions et de signer un quelconque PV parce que je pense que j’exerce mon droit à la libre expression. Nous avons un artiste algérien qui joue de la guitare (au centre-ville) qu’on a interdit. Des gens sont venus (le soutenir), ils l’ont laissé faire. Il faut permettre à tout le monde de s’exprimer librement.
En quoi consiste ce « mot » que vous prononcez chaque vendredi après la prière ?
D’abord, je parle des questions religieuses. Ensuite, je commente les questions politiques nationales et internationales. Il est nécessaire que je commente les événements qui se déroulent dans la région, dans les pays arabo-musulmans et à l’international. C’est mon droit. Ils ne nous ont pas laissés tenir ces halakates en dehors des mosquées. Nous avons combattu l’État des services (de renseignements), nous sommes tombés dans un État policier. Les officiers disent qu’ils ont des ordres. On a encore une police politique ?
Mais la charte pour la paix et la réconciliation vous interdit de faire de la politique…
Pourquoi cette loi est plus importante que la Constitution (qui garantit ces droits) ! Même la justice est devenue un outil entre les mains du pouvoir exécutif. Khaled Nezzar a parlé de crimes. Pourquoi ne l’a-t-on pas sanctionné ? Il faut avoir une logique à défaut d’avoir une religion. La loi doit s’appliquer à tout le monde. Aujourd’hui, on ramène des gens de la Libye qui ont porté des armes, on les met au Sheraton. Ramtane Lamamra dit à travers le monde que la solution est politique et non militaire. Et bien qu’il cherche d’abord cette solution politique en Algérie avant de la chercher pour les pays du voisinage !
Est-ce que vous vous êtes engagé à ne pas tenir des discours politiques s’ils vous laissaient la possibilité d’aller à la mosquée le vendredi ?
Je ne me suis engagé sur rien. Quand on m’a donné une liste de dix interdictions à signer en 2003, j’ai refusé. Dans cette liste, il y avait une interdiction de travailler, de se réunir. On m’enlevait le droit d’être tuteur de mes enfants. L’Occident a des lois qu’il a faites lui-même mais qu’il respecte et qu’il applique sur tout le monde. Nous, on ne suit ni les lois du ciel, ni les lois de la terre. On a des désirs et des humeurs.