Machinations contre Salah-Eddine Sidhoum
Campagne Internationale pour la Libération
de Salah-Eddine Sidhoum
Prisonnier d’opinion
Machinations contre Salah-Eddine Sidhoum
Dr. Salah-Eddine Sidhoum a été victime à partir 1994 d’une histoire montée de toute pièce afin de l’éliminer. Différents stratagèmes aboutirent à sa condamnation par contumace à 20 ans de prison en 1997. Depuis 1994, il vit en clandestinité. Afin qu’il puisse retrouver sa liberté, il doit se livrer aux autorités et être rejugé. La Justice algérienne étant assujettie à l’exécutif, aucune garantie de procès équitable n’est garantie.
Tout a commencé le 7 juin 1994, lorsqu’un ami de Salah-Eddine Sidhoum et confrère chirurgien orthopédiste, le Dr Lafri Khaled, a été arrêté à son domicile par la police. Il avait été dénoncé sous la torture par son voisin. On l’accusera de soigner des blessés de groupes armés. Ce chirurgien, sous la torture (voir son témoignage Annexe n° 1), commencera à livrer des noms en vrac de voisins (Belhamri Messaoud, arrêté le 18 juin 1994, Annexe n° 2), de camarades de lycée et de confrères dont le Dr Sidhoum, afin que cesse la torture. Et c’est ainsi qu’une dizaine de jours plus tard, le Pr Moulay sera kidnappé sur l’autoroute le 19 juin 1994 alors qu’il circulait dans son véhicule avec ses enfants. Ils seront séquestrés durant un mois et ce n’est que le 17 juillet qu’ils réapparaîtront à la prison d’El-Harrach.
Dr. Sidhoum ne savait pas qu’il avait été cité par Lafri. Durant toute la période de la séquestration de ces personnes, il était occupé à alerter les ONG et les correspondants de la presse internationale sur ces personnes enlevées. L’un des avocats des victimes l’a prévenu le 17 juillet que son nom avait été cité dans l’affaire Lafri-Moulay et qu’il figurait dans les documents comme étant en fuite et recherché (!!!) alors que pour les autres confrères cités par Lafri et qui figuraient dans le PV de police, la mention, « en fuite et recherché » ne figurait pas. Dr. Sidhoum a néanmoins continué ses activités professionnelles à l’hôpital et à l’université. Puis Moulay lui a adressé de prison son long témoignage, racontant comment, sous la torture, ont été préfabriqués les scénarios (Annexe n° 3) et les accusations graves qui étaient portées contre lui.
A partir de cette date, tout en continuant ses activités professionnelles, Sidhoum commençait à prendre des dispositions concernant sa sécurité. Il partait toujours accompagné au travail. Il ne circulait jamais seul. Un jeune ami à lui, chauffeur de taxi, l’accompagnait souvent. La police ne viendra jamais l’inquiéter ni à son domicile ni au travail, mais il craignait d’être kidnappé.
Parallèlement à son travail hospitalo-universitaire, il poursuivait ses activités de militant des droits de l’homme. Le 5 septembre 1994, il adressait au Président Liamine Zeroual une lettre ouverte sur les atteintes aux droits de l’homme (lettre recommandée avec accusé de réception, Annexe n° 4).
Deux semaines plus tard, jeudi 22 septembre 1994, il fut surpris de retrouver dans le quotidien El Watan son nom dans un article intitulé : Bab Ezzouar : des médecins à la tête d’un réseau terroriste (Annexe n° 5). Cet article était truffé d’inepties (Annexe n° 6). Il y était encore une fois précisé que Sidhoum était en fuite, alors qu’il vaquait régulièrement à ses occupations. Ses voisins furent tout aussi surpris de lire l’article et d’apprendre qu’il était en « fuite » alors qu’ils le voyaient matin et soir dans le quartier. Il s’est avéré que le « journaliste » avait repris le rapport du PV de police figurant dans le dossier de l’affaire Moulay-Lafri, en essayant de le maquiller, violant impunément le secret de l’instruction.
Dr. Sidhoum a immédiatement envoyé un droit de réponse au directeur d’El Watan (lettre recommandée du 24/09/94 n° 96509. Poste d’El Mouradia). Omar Belhouchet, fort de ses appuis à l’époque, refusera de le publier. Des amis journalistes rapportèrent à Sidhoum qu’une chaude discussion avait eu lieu à la rédaction du quotidien, car certains journalistes avaient protesté contre le refus de publication du droit de réponse. Une semaine après l’envoi de ce droit de réponse, Sidhoum a saisi à nouveau le directeur par lettre recommandée (29/09/94), l’informant qu’une plainte allait être déposée pour diffamation et dénonciation calomnieuse.
Parallèlement à cela, Sidhoum avait adressé une lettre recommandée au procureur général d’Alger de l’époque, Sayah Abdelmalek, pour attirer son attention sur ces pratiques et ces graves accusations. Ce dernier ne répondra jamais.
La publication de cet article télécommandé semblait être une réponse à la lettre ouverte de Sidhoum envoyée 17 jours plus tôt au Président Liamine Zeroual. Et cela constituait un véritable appel au meurtre. Il y avait déjà eu des précédents. De nombreux citoyens dont les noms sont apparus dans la presse éradicatrice avaient été enlevés et exécutés.
A partir de ce moment, le message était clair. Salah-Eddine Sidhoum se vit contraint de prendre un congé de longue durée car il craignait d’être kidnappé. Il ne passait que rarement la nuit chez lui et ne venait que dans la journée.
Puis il apprit qu’un ami, kinésithérapeute, avait été arrêté à son domicile en novembre 1994. C’était quelqu’un qui n’avait rien à voir ni avec la politique, ni avec la religion. C’était un bon vivant que Sidhoum avait connu à l’hôpital Mustapha à la fin des années 70. Il a eu le malheur d’appeler un soir au domicile de la famille Sidhoum pour demander de ses nouvelles et assurer sa famille de son aide. C’était Mme Sidhoum qui avait répondu et son appel fut immédiatement localisé car leur téléphone était sur écoute. Cet ami passera une nuit cauchemardesque au commissariat central où il sera sauvagement torturé. Il sera questionné au sujet de Sidhoum durant toute la nuit (ses habitudes, son appartenance politique, son train de vie, la tenue vestimentaire de son épouse….). Ses tortionnaires voulaient coûte que coûte lui faire avouer que Dr. Sidhoum était du FIS. Ils ne réussiront pas. Le lendemain, c’était un vendredi, c’est un colonel de la SM venu de Châteauneuf qui passera la matinée avec lui dans un bureau du commissariat central. Après avoir constaté les dégâts sur le visage du malheureux, il se permettra de lui présenter des excuses et de lui ramener un café et des croissants !!!! C’était la manière psychologique de l’aborder. Un dialogue s’établira alors entre eux durant toute la matinée, autour de la personne de Salah-Eddine Sidhoum dans les moindres détails. Sans contrainte, l’ami lui raconta tout ce qu’il savait sur lui et de manière objective. Une question revenait souvent dans la bouche du colonel : « Etes-vous certain que le Dr Sidhoum n’est pas du FIS ? » La réponse de l’ami a toujours été catégorique : NON. Il sera libéré dans l’après-midi, complètement défiguré. Le malheureux quittera l’Algérie pour se réfugier chez ses beaux-parents en Finlande. Il ne se remettra plus jamais de cette nuit cauchemardesque et mourra, jeune d’un infarctus du myocarde.
Puis d’autres amis médecins et infirmiers de Sidhoum vinrent voir la famille pour demander des nouvelles, suite aux rumeurs insistantes qui circulaient à l’hôpital puis dans son quartier à propos de sa condamnation à mort par les sinistres GIA, responsables de la liquidation de nombreux intellectuels (Abdelouahab Ben Boulaïd, Bouslimani, Ahmed Hambli, etc.). Là, la situation devenait de plus en plus préoccupante. Sidhoum décidait de passer dans la clandestinité. C’était le 14 décembre 1994. Quatre jours plus tard, soit le dimanche 18 décembre 1994, au lendemain de la diffusion du documentaire de la BBC sur canal +, « Algérie, la guerre cachée », diffusé le 17 décembre 1994 dans lequel Sidhoum intervenait, trois civils armés vinrent à sa recherche le matin aux environs de 9h à son domicile. Après avoir constaté son absence, ils menacèrent sa vieille tante avec leurs armes. Un vieux voisin a eu le malheur d’intervenir en voyant la vieille tante crier. Il sera roué de coups et jeté à terre par l’un des trois voyous. Les trois individus finirent par prendre la fuite devant l’attroupement des voisins attirés par les appels au secours de la parente de Sidhoum L’un d’eux lancera en partant : « Nous reviendrons le soir dynamiter la maison et nous aurons le Docteur. »
C’est le lendemain que Sidhoum apprit sur la station radio marocaine Médi I ce qui est arrivé à sa famille. La correspondante du quotidien Le Monde, Mme Catherine Simon, qu’il avait reçue à plusieurs reprises chez lui et à l’hôpital, a rapporté l’information (Le Monde, 20 décembre 1994, Annexe n° 7), tout comme Human Rights Watch avait dès le lendemain adressé une lettre ouverte au général Zeroual (Annexe n° 8). Ce tapage a freiné un tant soit peu les criminels qui n’ont plus importuné la famille Sidhoum.
Dans la même semaine, la Sécurité militaire a arrêté à l’hôpital Zmirli d’El Harrach où Sidhoum exerçait, un de ses élèves, jeune chirurgien. Il sera porté disparu durant cinq mois avant de réapparaître à la prison d’El Harrach. Il sera durant ces mois torturé et interrogé uniquement sur les activités professionnelles et politiques de Sidhoum. A lui aussi, on voulait lui faire dire qu’il appartenait au FIS. Tout comme le kinésithérapeute, il leur dira que Sidhoum n’appartenait à aucun parti, mais qu’il était un opposant et un militant des droits de l’homme.
Le 6 avril 1995, le jeune chauffeur de taxi qui accompagnait Sidhoum, avant que celui-ci passe dans la clandestinité, est arrêté. Il avait eu le malheur d’apparaître dans le documentaire de la BBC, prenant un café avec lui. Il sera séquestré durant six mois au centre de la Sécurité militaire de Châteauneuf et sauvagement torturé. Là aussi, il y avait un colonel de la SM qui participait à l’interrogatoire. Les tortionnaires voulaient tout savoir de Sidhoum, même de sa vie privée. (Voir le témoignage de Mohamed Benmerakchi, Annexe n° 9)
En 1996, eu lieu le procès de l’affaire Moulay-Lafri. L’un et l’autre seront condamnés à trois années de prison pour « organisation d’un groupe armé » ! Sidhoum a dans cette affaire bénéficié d’un non-lieu.
Les services secrets, n’étant pas satisfaits de cela, confectionnèrent un autre dossier concernant l’affaire du jeune chirurgien et d’un malade arrêtés à Zmirli où ils l’impliquèrent à nouveau avec Moulay. Ils seront accusés cette fois-ci de création d’organisation clandestine pour renverser le régime en place afin d’instaurer un Etat Islamique, subversion, participation à des mouvements de rébellion, complot contre l’autorité de l’Etat et tentative de renversement du régime d’Etat et de ses institutions reconnues constitutionnellement, création de cellules illégales attentant à l’unité nationale, atteinte à sa sécurité, à sa stabilité et à l’intégrité de ses frontières, non dénonciation d’une organisation secrète et de ses membres, complicité et participation, des chefs d’inculpation classiques et vagues dans la tradition des cours « révolutionnaires » de Boumédienne à la « cour de sûreté de l’Etat » de Chadli. Moulay et le jeune chirurgien de l’hôpital Zmirli (qui a passé deux années de détention préventive) ainsi que le malade et d’autres inculpés seront acquittés, tandis que Sidhoum fut condamné à 20 années de réclusion par contumace. C’était en février 1997.
Depuis, Sidhoum vit dans la clandestinité. Il continue ses activités de défenseur des droits de l’homme (Annexe n° 10) malgré les intimidations et menaces dont est victime sa famille. Le 13 janvier 2000, il publiait une lettre ouverte à l’opinion publique et aux ONG internationales où il précisait qu’il refusait l’amnistie accordée dans le cadre de la pseudo « concorde civile » dont il ne se sentait pas concerné et se disait prêt à se présenter devant la justice pour peu que des garanties lui soient accordées sur sa sortie et sur l’équité du procès (Annexe n° 11). Les dernières menaces ont eu lieu le dimanche 15 décembre 2002 au matin, quand deux civils munis de talkies-walkies se sont présentés au domicile de Salah-Eddine Sidhoum pour lui remettre une convocation pour le 16 décembre à 14h à la 3e Brigade mobile de la police judiciaire (BMPJ) d’El Madania. (Annexe n° 12).
Il est évident que le pouvoir algérien n’a pu faire cesser les activités de Sidhoum comme défenseur de droits de l’homme. La Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, notamment dans son article 1, stipule que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international ».
Pour cela, les accusations infondées qui ont motivé sa condamnation à vingt années de réclusion doivent être définitivement reconnues comme telles par la justice algérienne. Sidhoum est disposé dans ce but à se constituer prisonnier pour pouvoir être jugé à nouveau, pour autant qu’il obtienne du gouvernement des garanties formelles.
Le comité de soutien à M. Sidhoum demande aux autorités algériennes :
1. d’assurer la sécurité et l’intégrité physique et psychologique du Dr Sidhoum Salah-Eddine et des membres de sa famille;
2. de respecter sa dignité, son droit d’avoir et de défendre ses opinions et sa croyance;
3. de lui garantir un procès équitable et public, par une juridiction indépendante et devant des observateurs d’organisations de défense des droits de l’homme nationales et internationales;
4. de faire respecter les principes de présomption d’innocence, de droit à la défense et de discussion contradictoire des charges, des preuves et des témoignages;
5. de faciliter l’obtention de visas aux observateurs étrangers pour qu’ils puissent se rendre en Algérie sans difficultés et dans des délais raisonnables.
6. d’éviter qu’il soit confronté à de nouvelles machinations dans le but de le condamner à de lourdes peines et le marginaliser.